Le nomadisme, comme vous le savez, c’est le mouvement. Bien sûr, il n’est pas encore question de numériser le nomade lui-même, même si les thuriféraires du transhumanisme ne sont sans doute pas loin de caresser cette idée. D’ailleurs, fin janvier, Elon Musk annonçait que sa start-up Neuralink avait posé un premier implant cérébral sur un patient. Mais comme nous avons sans doute encore un peu de temps avant de pouvoir se pencher sur les conséquences de cette nouvelle source potentielle d’inégalités, nous nous contenterons dans cet article d’aborder le sujet de l’environnement bancaire des nomades numériques.
Et si le nomadisme numérique peut connaître des coûts variables et des modalités très différentes, selon là d’où l’on vient et là où l’on va, il y a bien une chose qui concerne l’ensemble de ses adeptes : la nécessité de bénéficier d’un service bancaire facile d’usage.
Le compte professionnel en France
Un compte professionnel est lié au siège social de votre établissement. Si vous êtes auto-entrepreneurs, dirigeants d’une petite SAS ou SARL domiciliée en France (Numéro de Siret français), vous pouvez-vous tourner vers les nouveaux acteurs comme Qonto qui vous acceptera sans souci. Votre banque actuelle en France peut aussi continuer à vous proposer les mêmes prestations. Pour ces acteurs, la personne morale ou le travailleur indépendant est toujours un résident fiscal français et accède donc facilement à son environnement bancaire.
Si vous décidez de loger votre activité dans un pays tiers, à la fiscalité plus douce, il faudra impérativement passer par une banque locale. Sauf si vous optez pour un pays européen acceptée par les banques en ligne. Pour exemple, Qonto accepte les sociétés domiciliées en Espagne, en Italie ou en Allemagne.
Mais une fois le compte professionnel approvisionné, il faudra bien alimenter un compte personnel pour vos dépenses non liées à votre activité professionnelle. Et c’est là que les difficultés commencent. En effet, actuellement, les banques françaises, et plus généralement européennes, ferment petit à petit les comptes de leurs clients qui ne vivent plus dans l’Espace économique européen (EEE) plus de 6 mois. Ainsi, si vous travaillez depuis le Maroc, les Bahamas, la Thaïlande ou les USA et bien d’autres, votre compte particulier risque d’être fermé ou limité. Alors comment faire ?
Résident dans l’EEE, un vaste choix en ligne
En tant que nomade numérique, que vous soyez en transit, que le pays soit une simple étape ou une migration saisonnière, vous chercherez sans doute à avoir une banque vous donnant le sentiment de vous faciliter la vie.
Si le nomadisme n’est qu’une simple parenthèse, ou une introduction – qui ne dit pas son nom – à une expatriation ou une émigration durable, vous aurez besoin d’accéder à vos comptes bancaires et d’effectuer des transactions, où que vous soyez dans le monde. Les banques en ligne offrent souvent une meilleure accessibilité grâce à leurs plateformes numériques, à conditions d’être toujours résident en France ou dans l’EEE à titre personnel.
Parmi celles-ci, on peut évoquer quelques banques, qui se distinguent par leur inclinaison à accompagner les travailleurs à la bougeotte sans frontières:
-Revolut : Fondée en 2015 par Nikolay Storonsky et Vlad Yatsenko, cette banque britannique couvre 160 pays et régions, et compte près de 35 millions de clients dans le monde. Elle propose des comptes multi-devises, permettant aux utilisateurs de détenir et de convertir plusieurs devises en temps réel avec des taux de change interbancaires.
-N26 est une autre banque mobile, d’origine allemande. Elle propose des comptes courants entièrement gérés via une application mobile. Travaillant en partenariat avec TransferWise, elle permet à ses clients de faire des virements internationaux dans 38 devises.
-Monzo : Monzo est une banque mobile britannique qui offre une gamme de services bancaires, y compris des comptes courants et des cartes de débit, tous gérés via une application mobile. Leurs comptes sont souvent appréciés pour leur facilité d’utilisation et leur transparence en ce qui concerne les frais.
-TransferGo : TransferGo est une autre plateforme de transfert d’argent en ligne qui propose des transferts internationaux rapides et abordables
Ces banques ont en commun d’être toutes récentes, et d’être issues de l’univers des fintech, ces start-up spécialisées dans la finance. Un peu comme le concept de nomadisme numérique, elles trouvent du succès auprès d’une clientèle en grande partie jeune et technophile, grâce à une approche innovante et orientée vers les utilisateurs des services bancaires. Cependant, comme toute entreprise en pleine croissance, elles doivent faire face à d’importants défis, notamment en ce qui concerne leur rentabilité à long terme et leur capacité à répondre aux exigences réglementaires en constante évolution. Et si le contexte d’inflation est favorable à ces banques, qui se distinguent notamment par le peu de frais qu’elles facturent à leurs clients, cela ne règle pas forcément le sujet de leur rentabilité à long terme. Aussi, N26, un des acteurs sans doute les plus florissants de ces fintech, semble avoir dû freiner ses ambitions de s’introduire en bourse.
En effet, la rentabilité de ces acteurs bancaires repose bien davantage sur les produits financiers, qu’ils cherchent à faire souscrire à leurs clients. De quoi se dire, qu’en tant que client, et que l’on soit sédentaire ou non, il est peut-être plus prudent de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier !
Mais que faire si on n’est plus résident de l’EEE ?
Même en vivant hors de France, vous avez toujours besoin d’un compte français. Déjà pour transférer vos bénéfices rapidement et sans provoquer de contrôles de votre résidence, mais aussi pour payer impôts nationaux ou locaux, continuer à profiter des services de streaming français (le pays d’émission de la carte permet chez Netflix, Molotov et d’autres de vous attacher au flux français). Lors de vos voyages en France, les dépenses faites avec des cartes non européennes sont chargées par les émetteurs et les banques avec de nombreux frais.
Si votre banque vous rejette que pouvez-vous donc faire ? Actuellement, il n’y a qu’une solution, faire appel au droit au compte. En effet, la loi stipule que tout Français, résident ou non, a le droit à un compte français et à des moyens de paiements. Mais dans les faits, la procédure est longue et fastidieuse. Si elle aboutit, il y a de fortes probabilités que le compte ouvert sous pression des autorités soit fermé dès la période obligatoire dépassée (3 à 6 mois).
Mais bonne nouvelle, la Caisse des Français de l’étranger, le groupe des Banques populaires, Skiptax (détaxe française homologuée par les douanes françaises) et d’autres acteurs comme Lesfrancais.press ont mis en commun leur expérience et leur savoir-faire pour créer une nouvelle banque en ligne, France Pay. Celle-ci sera disponible courant avril et permettra à tout Français et ce quelques soit son pays de résidence d’obtenir un compte, une capacité de virements et de prélèvements automatiques, ainsi qu’une carte Visa de débit valable à l’international. Avec cette offre, vous pourrez bénéficier sans restriction de l’univers bancaire français (cartes de crédits, assurances, etc.) ! Malheureusement, les contraintes juridiques entraînent des coûts et donc il n’y aura pas d’offre gratuite. Cependant, France Pay est accessible dès 15 euros par mois. A suivre.
Auteur/Autrice
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Etienne Antelme est journaliste indépendant. Après un parcours de formation en sociologie, ses centres d'intérêt et son envie d'écrire l'ont amené vers le journalisme. Avec comme points d'ancrage principaux la culture, les multiples "mondes" du travail, ou encore l'économie sociale et solidaire, il écrit pour différents médias web et print.
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