Tribune : Le RN est-il si fort? De quoi se nourrit-il ?

L’extrême-droite bascule pour la deuxième fois d’affilée en tête des européennes avec un score un peu tassé en pourcentage, mais en hausse en nombre de voix. C’est le constat assez implacable que n’importe qui pourrait faire.
Une nouvelle fois, on assiste à une confirmation dans les urnes de ce que David Goodhart indiquait dans son récent livre, davantage orienté sur le vote du Brexit, où il distinguait les « somewhere » et les « anywhere », ceux qui sont attachés à un lieu, un terroir, une frontière, une identité et ceux qui sont chez eux partout. On est également sur une carte électorale qui ressemble à celle de Christophe Guilluy et sa « France périphérique » mais aussi de son avant-dernier livre, beaucoup plus « politique » qui s’appelle le « Crépuscule de la France d’en haut » et décrit les Métropoles mondialisées comme étant de nouvelles forteresses médiévales qui se sont protégées en construisant des remparts inaccessibles aux classes moyennes.

C’est ce schéma-là qui, élection après élection, se confirme et coupe la France en deux entre avec un « marécage » entre les deux de plus en plus morcelé.

Mais au fond, pourquoi les gens votent-ils RN ? A quelle offre politique inexistante ailleurs correspond le FN ? Ou plutôt que cherchent ses électeurs ? Quelle offre politique n’existe pas et est prise par le RN ?

Le RN ne peut pas être résumé au vote d’une France qui sent le renfermé. Les quelques secteurs où, occasionnellement, il connait des baisses, sont souvent des communes où les élus locaux sont très attachés aux valeurs républicaines, à la laïcité, au régalien. Ce sont des communes dont les Maires sont courageux, dans le sens sens où ils luttent contre le communautarisme et où ils tentent de résoudre les problèmes de base des habitants : sécurité, économie, emploi, éducation.

Et cela le RN le comprend bien. Son programme n’est pas théoriquement élaboré, il ne parle que des besoins de base des français, il ne s’adresse qu’à ce que les français voient au quotidien, pas à ce qu’ils ne peuvent qu’imaginer.
Alors comment faire baisser le RN ? Déjà, en réfléchissant à ce qui manque politiquement : un pôle laïque et républicain fort. Mais avant de se précipiter tête baissée, réfléchissons de nouveau : qu’est-ce que sont les « valeurs de la République » ? Avons-nous une définition précise de tout cela ? Non. Cette définition n’existe pas car elle semble aller de soi. Elle ne va pas de soi, c’est désormais une évidence.

Un pôle républicain et laïque, qu’il soit de droite ou de gauche, ou des deux, ne peut pas faire l’économie d’une réflexion sur ce que sont ces valeurs et sur ce à quoi elles renvoient de concret. Et ce pôle laïque, n’est pas une lubie : toutes les enquêtes récentes montrent qu’une laïcité républicaine ferme est plébiscitée par les Français. Or, cette option est absente des programmes des partis politiques classiques.

Créer une offre Républicaine qui concurrence le RN, certains l’ont fait au niveau local, inspirons-nous de cela. Sachons enfin réfléchir à ce qu’est la France, ce que sont ses valeurs et ce que souhaite son peuple.

Arnaud Lacheret

Directeur MBA à la French Arabian School (ESSEC) de Bahrein

Ancien chef de Cabinet du Maire de Rillieux-la-Pape  (UMP devenu LR – Banlieue Lyonnaise)

 

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