Lesfrancais.press sont récemment allés à la rencontre des 8 principaux candidats au scrutin sénatorial.
Cette élection, décalée d’un an en raison de la pandémie, aura lieu le 26 septembre 2021.
Elle permettra de renouveler 6 sénateurs représentant les Français établis hors de France.
Dans notre article précédent, nous interrogions les candidats sur le dépôt de la liste et sa composition. Nous abordions également l’impact de la pandémie sur cette campagne inédite. L’état des candidatures a été publié le 14 septembre suite à un arrêté du 13 septembre. 8 listes sérieuses sont déclarées.
Le 18 septembre : un vote très « anticipé »
Pour ce scrutin, auquel prennent part les conseillers des Français de l’étranger, les délégués consulaires, les sénateurs et députés des Français de l’étranger, plusieurs modalités de vote sont prévues.
Le 18 septembre, se tient le vote anticipé. Les grands électeurs peuvent voter de 9h à 11h dans les ambassades et postes consulaires.
Alors que la pandémie est mondiale, ce sera la modalité de vote sans doute la plus utilisée. Certains estiment que plus de 80% des votants y prendront part.
Le secret du vote
Durant cette campagne hors normes, il convient de souligner le secret du vote. Certains grands électeurs craignent en effet que leur vote anticipé ne soit dépouillé avant le 26 au niveau de l’ambassade ou du consulat.
Ségolène Royal a récemment rappelé les détails : « Le bulletin est glissé dans une enveloppe identique dans tous les bureaux de vote, qui ne comprend ni le nom du pays ni bien sûr le nom du votant, et qui est cachetée. Cette enveloppe n’est pas ouverte sur place, elle est envoyée au ministère par la valise diplomatique. Au ministère, toutes les enveloppes sont regroupées dans une seule urne, avant le dépouillement qui est donc globalisé pour tous les pays du monde et qui a lieu dans les conditions habituelles de tous les scrutins. »
Le sénateur Robert del Picchia en a fait de même dans L’Hebdo indépendant du 9 septembre.
PROGRAMMES ET THEMATIQUES
Nous avons interrogé les candidats sur les grands points de leur programme. Voici leurs 5 priorités ! A noter, nous n’avions pas fixé de limite de caractères, certains candidats ont avancé des thèmes, d’autres des propositions. Pour les programmes et propositions complètes des listes, rendez-vous sur les sites des candidats.
L’ordre de présentation est celui du relevé des candidatures. Nous n’avons pas intégré ici les deux listes qui ne comptent aucun élu.
Si vous êtes (ré)élu, comment partagerez-vous votre temps entre la circonscription monde et le travail à Paris ? Serez-vous un sénateur actif sur le terrain et présent à Paris ?
Pour toutes les têtes de listes, la répartition entre le terrain monde et le travail au sénat et en commission est un sujet majeur.
Constance pour Christophe Frassa
Christophe Frassa, qui mène la liste #FrançaisAPartEntière, nous confie « Si je suis réélu, je continuerai à exercer mon mandat en restant très présent sur le terrain auprès des élus et des Français dans le monde, tout en demeurant très actif au sein de la commission des lois où je poursuivrai mes travaux législatifs, en étant régulièrement rapporteur de projets ou propositions de loi. »
Paris au cœur de la vision ASFE du mandat
Pour Jean-Pierre Bansard qui mène la liste ASFE2021 « Il s’agit d’une question de dosage. La façon dont travaille l’ASFE vis-à-vis du Sénat est la suivante : les élus, nos représentants, les Français, nous font remonter quotidiennement leurs problématiques. C’est ce réseau mondial que nous avons constitué qui alimente le travail sénatorial que nous réalisons avec Evelyne Renaud-Garabedian, qui a toujours considéré qu’elle était plus utile à Paris qu’à faire le tour du monde aux frais du contribuable (sans même parler de l’empreinte carbone).
Mais le terrain est essentiel. Simplement, il faut qu’un déplacement ait un sens, qu’il soit bien construit, avec un objectif pour faire avancer un dossier en particulier par exemple, ou pour résoudre une problématique qui nécessite l’intervention d’un Sénateur. Ça ne peut pas être juste pour serrer des mains. Nous ferons donc les deux : travail à Paris et déplacements en circonscription. »
Compensation carbone pour Mélanie Vogel
Mélanie Vogel, qui mène la liste Ecologie, Solidarité, Proximité, convient « Oui, il faut absolument équilibrer les deux pour construire un mandat efficace, être présente sur le terrain pour faire remonter au mieux les préoccupations de nos compatriotes mais aussi être active à Paris pour peser sur les dossiers. Je travaille au Parlement européen au contact d’élu.e.s de nombreux pays dont le mandat nécessite ce même équilibre, je connais bien ce mode de vie. Je suis en constant déplacement en Europe et ma conjointe vit en Allemagne […]
Tout cela nécessitera de mettre en place une compensation carbone de ces déplacements. Contrairement aux élu.e.s en métropole qui ont la possibilité de se déplacer en train, l’empreinte carbone d’un mandat de sénatrice des Français.e.s de l’Étranger ne peut pas être neutre, même en étant sobre. Je développerai donc, avec Aloïs Gallet qui est un élu au Canada expert du climat, une démarche de mesure des émissions de gaz à effet de serre liées à l’exercice du mandat en vue de les compenser. C’est la neutralité dont nous avons besoin selon le GIEC pour éviter l’emballement climatique. Cela permettra aussi de faire de la pédagogie sur l’empreinte carbone et les activités émettrices. »
Les élus de terrain au cœur du projet de Samantha Cazebonne
La candidate LREM qui mène la liste Notre Avenir Ensemble, nous explique « Par expérience, je sais qu’il faut répartir ses forces entre être au Sénat et suivre les projets et propositions de loi pour que la place des Français de l’étranger soit toujours défendue et organiser des déplacements en coopération avec les élus consulaires dans les zones prioritaires, des évènements locaux et traiter les urgences des élus. Un programme de déplacements se fait de concert avec les élus car ce sont eux qui sont nos référents locaux, experts de leur circonscription.
Enfin, je me suis également engagée à réaliser des webinaires réguliers par visioconférence qui offrent, dans un contexte sanitaire compliqué, une opportunité nouvelle et efficace en matière de communication. »
Pour Laure Pallez, tout est une question d’équilibre
Selon Laure Pallez, à la tête de la liste Français de l’étranger : la France et le monde en commun ! les deux sont nécessaires, le temps de présence à Paris pour le travail législatif et institutionnel, les déplacements pour maintenir les liens forts avec les Français établis hors de France et leurs élu(e)s. Elle ajoute « ce contact avec le terrain irrigue et inspirera notre action. Une équipe aux quatre coins du monde habituée au travail numérique et en réseau est déjà au travail ».
Yan Chantrel, la démocratie participative avant tout
Yan Chantrel, qui mène la liste Rassemblement de la gauche écologiste, sociale et solidaire, élabore « Le projet que nous avons élaboré avec notre équipe étant fondé sur le principe de la démocratie participative, il est évident que nous consacrerons le maximum de temps à la circonscription, tout en respectant bien sûr le travail et les échéances des sessions parlementaires ».
Le terrain et l’action au cœur du mandat d’Olivier Cadic
Olivier Cadic, à la tête de la liste Libres et Indépendants, semble avoir été sur de nombreux fronts lors de son mandant. Il nous explique « je compte plus de 400 déplacements lors de mon premier mandat, et j’ai traversé 98 pays. J’ai passé 40% de mon temps au Sénat à Paris, 30% au Royaume-Uni et 30% dans le reste du monde. Fort de l’expérience réussie au travers d’accomplissements concrets, notre programme est avant tout de soutenir les initiatives locales des conseillers des Français de l’étranger, de les accompagner constamment dans la défense des intérêts de nos compatriotes et de prolonger leurs orientations par des textes votés au parlement. Cela nécessite d’aller fréquemment sur le terrain à la rencontre des élus des Français de l’étranger. C’est tout le sens de mon engagement. »
Efficacité pour Ségolène Royal
Ségolène Royal, qui mène la liste Français.es dans le monde, une chance pour la France !, liste citoyenne et écologiste d’union nous confie « C’est l’efficacité qui compte, il faut donc s’adapter en permanence et faire ce qui est utile. En faisant attention au bilan carbone des déplacements. Proximité, réactivité. Et surtout, les liens que j’ai construits pendant cette campagne, entourée d’une équipe joyeuse et travailleuse, me permettront d’entrer tout de suite dans l’action. Si je suis élue, l’équipe sénatoriale sera constituée de tous les élus et élues de tous les pays, quels qu’ils soient. Nous servirons au mieux la cause de nos compatriotes dans le monde parce que c’est une façon de servir la France. Telle est ma conviction et le sens de cette candidature. »
Qu’est-ce qui distingue votre liste des autres ? En réponse à cette question, certains candidats en profitent pour rappeler les atouts de leur liste.
Laure Pallez : une campagne au long cours
Laure Pallez revient sur l’historique de son projet : « Dans le prolongement de nos campagnes consulaires victorieuses, nous avons commencé notre travail très tôt et sommes allés à la rencontre des grands électeurs pour approfondir ensemble les solutions de solidarité à mettre en place et avons discuté avec eux des sujets qui les concernent… Nos valeurs de progrès social et environnemental sont claires, notre engagement aussi ». Elle complète « L’ambiance au sein de notre équipe : joyeusement combattive, passionnée. Plus sérieusement, nous sommes conscients du travail important à faire pour aider nos compatriotes, pour donner corps aux valeurs de solidarité dans un contexte particulièrement compliqué. »
Samantha Cazebonne : un mandat en soutien de la majorité présidentielle
Samantha Cazebonne évoque plusieurs aspects : l’esprit collectif, le respect de nos complémentarités et de nos différences, la connaissance du terrain et l’implantation dans les communautés. Elle termine en ajoutant « la force d’un mandat en soutien de la majorité présidentielle ».
#FrançaisAPartEntière : la liste uniquement composée d’élus
Le sénateur Frassa nous explique « De ce que j’ai pu observer des autres listes dévoilées à ce jour, ma liste, #FrançaisAPartEntière, est la seule liste où l’ensemble des colistiers sont des élus ; la seule liste où l’ensemble des colistiers résident à l’étranger ; la seule liste où l’ensemble des colistiers sont des élus de toutes les régions du monde. La seule liste à l’image de celles et ceux dont nous sollicitons les suffrages. »
ASFE : pas une liste politique
La liste de Jean-Pierre Bansard met en avant l’ASFE en expliquant : « c’est le seul mouvement totalement indépendant entièrement consacré aux Français établis hors de France, présent dans le monde entier. Nous sommes légalement constitués en parti, car c’est la seule façon d’obtenir la LEC, qui est notre principal outil de travail et grâce à laquelle nous sommes en contact permanent avec les Français de l’étranger. Nous n’avons donc pas à arbitrer, au moment de voter, entre les intérêts des Français de l’étranger et les consignes d’un parti. Nous sommes aussi une équipe, et les projets que nous construisons ensemble passeront toujours avant nos égos. »
La liste menée par Mélanie Vogel : efficacité et coopération internationale
La tête de liste EELV mène une équipe « qui veut construire une alternative solide et enthousiaste aux politiques actuelles, pas assez solidaires avec nos compatriotes à l’étranger, pas assez ouvertes aux attentes des CFE, pas assez efficaces face aux urgences écologiques et à la nécessaire lutte contre les inégalités en France. J’aimerais ainsi que l’on utilise mieux la richesse du réseau des élus, des associations françaises, des entrepreneurs hors de France, pour enrichir la coopération internationale. Il y a une césure trop forte à mon goût entre diplomatie et réalité sur le terrain. La coopération vient souvent du terrain, des gens.
[..] J’ai participé à beaucoup de campagnes dans ma vie. J’ai rarement connu une collaboration entre différents partenaires aussi agréable. Cela me donne beaucoup d’espoir pour la suite du travail que nous devons mener ensemble ».
Yan Chantrel : une liste qui vient du travail collectif de terrain
La tête de liste récemment adoubée par le PS nous explique que plusieurs choses distinguent sa liste. « Nous n’avons pas commencé par déclarer une candidature pour ensuite chercher une équipe. Notre initiative se base sur la constatation d’un faisceau d’éléments que nous avons déjà évoqués : nécessité d’une union des mouvements de gauche et de l’écologie, valorisation de l’expérience de terrain et expression de la voix des citoyens. La deuxième constatation étant qu’aucune candidature déclarée ne semblait vouloir tenir compte de ces éléments. A partir de là, une concertation a été menée auprès d’un certain nombre d’élu.es de diverses tendances et la décision de constituer une liste en tendant la main à toutes les tendances de gauche et écologistes, y compris aux partis, a été prise. C’est donc une liste reposant sur un travail collectif. »
Olivier Cadic : déontologie et indépendance
Le sénateur sortant nous explique « C’est aux électeurs et aux commentateurs de répondre à cette question. Je m’interdis de parler de nos compétiteurs. C’est un principe déontologique.
Je m’en tiens donc à décrire notre liste. » Il revient sur sa composition « Elle se compose de personnes ayant incarné une approche libre et proche du terrain qui les a conduits à remporter un grand succès aux élections consulaires. Ils ont démontré qu’une démarche indépendante fondée sur les attentes concrètes de nos compatriotes pouvait l’emporter face à des structures politiques employant des moyens matériels significatifs.
Vouloir être libre, c’est vouloir les autres libres, ajoute le sénateur soulignant son objectif de travail des élus de terrain hors des appareils politiques. « Nous souhaitons simplement permettre au plus grand nombre d’élus de travailler indépendamment de tout appareil partisan et d’accomplir les projets qui leur tiennent à cœur au bénéfice des compatriotes qu’ils représentent. »
Ségolène Royal : une équipe directement opérationnelle
La candidate nous précise : « notre équipe est indépendante et immédiatement opérationnelle. Grâce au travail fait et à l’écoute attentive de tous les élus pour bâtir le pacte de confiance. »
Une campagne virtuelle de terrain
Les campagnes sénatoriales se suivent et ne se ressemblent pas. Cette fois, la pandémie a généré une communication plus virtuelle.
Si certains candidats ont fait quelques déplacements pour voir des élus, la plupart des rencontres se font à Paris avec de nombreux grands électeurs présents lors des vacances d’été mais aussi et surtout par téléphone et par Zoom.
Les têtes de listes font des webinaires et présentations en ligne. Yan Chantrel a par exemple récemment convié les grands électeurs à une réunion sur la pandémie.
Samantha Cazebonne a organisé le 13 septembre une réunion de campagne en présence de Jean-Michel Blanquer et Jean-Baptiste Lemoyne. Cette réunion a permis de présenter les candidats de sa liste en préambule.
Ségolène Royal a mis en place une boucle Telegram où elle partage soutiens de marque (Christiane Taubira) et vidéos d’élus de terrain. Elle envoie régulièrement des infolettres et a débuté un décompte depuis J-7 avec une lettre par jour. Elle a également pris part à plusieurs « rooms » sur Clubhouse où elle met en avant ses priorités en matière climatique.
Olivier Cadic a fait le choix de vidéos thématiques qu’il diffuse sur sa chaine Youtube. Il a récemment également pu compter sur le soutien appuyé de Robert del Picchia dans un article du petitjournal.com. Il diffuse des infolettres régulières.
Christophe Frassa mène une campagne dynamique autour du hashtag #Francaisapartentiere. Il envoie des infolettres à cadence régulière et a compté sur un soutien vidéo appuyé de Ronan Le Gleut. Il a récemment fait l’objet d’une longue interview dans le magazine marocain « les Inspirations éco ».
L’ASFE a fait une campagne en mode teasing et a récemment, par la voix de Sophie Briante Guillemont, envoyé un touffu guide de l’élu des Français de l’étranger.
Laure Pallez a commencé sa campagne il y a plusieurs mois et elle communique des infolettres régulières. Elle a récemment présenté sa liste complète avec l’arrivée de Marc Villard en seconde position.
Mélanie Vogel a récemment présenté sa liste et fait une vidéo partagée sur différentes plateformes. Sa liste a tenu une rencontre virtuelle avec l’Europe 13 septembre, l’Amérique du nord le 14 et l’Europe du sud le 15.
Notre analyse
Au-delà des programmes et ambitions des uns et des autres, ce scrutin est probablement un tournant dans la représentation des Français hors de France au Sénat. Jamais nous n’avons compté autant de colistiers mais surtout de têtes de listes qui ne sont pas de grands électeurs ou des sénateurs sortants.
Les résultats pourront probablement changer à jamais la composition des listes à venir et mettre en péril « l’ascenseur démocratique » qui a vu des élus de terrain devenir sénateurs.
Verdict le 26 septembre vers 17h probablement.