Pour lutter contre l’épidémie, les gouvernements, partout ou presque, ont demandé à la population de s’isoler et ferment les frontières. Quitte à provoquer un isolement des expatriés ?
Au bout d’un an, la lassitude gagne. En Belgique, au Royaume-Uni, on ferme. Aux Pays-Bas, on manifeste. A Madrid, à Rome, on entrouvre, presque à regret.
Du virus au supplice chinois
Et en France ? Confinera, confinera pas ? Le suspense a duré quinze jours. Virus ou supplice chinois ? In extremis, Castex a reculé les murs, le confinement a été repoussé. Pour l’instant ! Les interdits et les contrôles sont renforcés. La France s’isole. L’exaspération gagne, les dépressions aussi, à cause de l’isolement, des blocages, du manque d’information, des angoisses que cela génère.
Pour les Français de l’étranger, l’éloignement familial multiplie les incertitudes et les impasses. Quand partir ? Peut-on revenir ? Les compagnies aériennes annuleront-elles les vols ? Rembourseront-elles les annulations ? Quand ? Et les tests ? Où ? Combien ?
Le droit de chaque Français à regagner son pays
Le nouveau décret sur les restrictions quant aux voyages a été publié samedi à 23.45. Il est entré en vigueur à minuit. (Voir les articles de Fabien Ferasson de Quental et de la rédaction sur « Le verrouillage des frontières françaises » et « Voyager en France à partir de l’UE »). Inutile de dire que les sites d’information des Consulats et Ambassades ne sont pas à jour. Ni en Belgique (où le gouvernement belge multiplie les interdictions), ni au Royaume-Uni (avec le Brexit en prime) ni en Espagne, au Portugal, au Brésil, en Indonésie (les pays cités le sont en fonction de témoignages reçus, mais je suppose que c’est la même situation, partout ailleurs), les expatriés n’obtiennent de réponses claires. Des élus consulaires se mobilisent, des avocats se concertent, les familles s’agitent, s’entraident. Le droit des Français à rentrer en France ne parait plus garanti. Il semble que ce droit est soumis à conditions.
Une réunion ministérielle hors sol
Cette semaine pourtant, trois ministres se penchaient sur l’enseignement à l’étranger. Rassurants, ils n’ont pas fait transparaitre l’inquiétude qu’ils pourraient légitimement avoir sur la situation financière de certains établissements, sur l’avenir des Alliances françaises, ou sur les effets malencontreux des suppressions de postes. On pouvait espérer que ces ministres, sensibles aux effets immédiats des annonces du Premier ministre, étaient concentrés sur la situation des Français de l’étranger. Non, pas un mot. Comme si de rien n’était. Pas même en « off ». En tout cas rien n’a filtré. Et rien n’a suivi. Comme si les annonces du Premier ministre n’avaient pas de conséquences. Ce premier Conseil d’orientation interministériel de l’enseignement français à l’étranger avait l’air d’être un peu hors sol, avec le charme que pouvait avoir l’orchestre du Titanic. On y a beaucoup parlé de l’enseignement de la langue arabe, on aurait pu y ajouter celui du Berbère.
Pour se consoler, il faut prendre de la hauteur, ce qui distraira -ou inquiétera- le lecteur coincé en quarantaine ou à une escale. L’isolement ne frappe pas qu’à l’étranger. Peut être frappe-t-il moins les Français de l’étranger que les Français de France. Car l’expatriation renforce souvent les liens de solidarité. Ils sont plus que jamais necessaires.
Un problème de santé publique
En France, l’isolement est devenu un « problème de santé publique ». En 2020, sept millions de Français seraient en situation d’isolement, soit 14% des Français âgés de 15 ans et plus, selon une étude du Credoc. Trois millions de plus qu’il y a dix ans.
Avec le confinement, le couvre feu, les restrictions multiples, l’isolement devient la règle. Paradoxalement, ceux qui étaient déjà isolés, selon certains psychiatres, souffrent moins : l’habitude. Il n’empêche : les dépressions, troubles psychologiques divers, fatigues, provoquent des maladies durables et sont en augmentation, ce qui inquiète autant les médecins que la covid.
Une épidémie de dépressions
Il y a une épidémie de dépressions et de troubles psychiques. Les personnes âgées sont les plus affectées, les jeunes sont désormais atteints. Le chômage partiel, la réduction du nombre d’heures de travail, la baisse des revenus, la peur de l’autre comme porteur éventuel du virus, accentuent l’isolement, qui concerne autant les hommes que les femmes et augmente dans toutes les catégories sociales.
Que les Français de l’étranger abandonnés à leur sort se rassurent donc : ils ne doivent pas se sentir isolés de la France, ce sont les Français de l’intérieur, hélas, qui s’isolent. C’est pourquoi il faut être solidaire avec eux et s’en remettre moins aux Consulats qu’au système D.
Et plus que jamais se barder d’optimisme. Le vaccin contre l’isolement : le rompre ! Trouver des failles, ici et là, et l’occasion d’en rire.
Laurent Dominati
A. Ambassadeur de France
A. Député de Paris
Président de la société éditrice du site Lesfrancais.press
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Ce que je trouve particulièrement indécent c’est le manque de communication de la part de notre député des Français pour l’Amérique du Nord, Roland Lescure, aux abonnés absents depuis le début de son mandat. Plus occupé à parader à Paris (il a mis les voiles en mars dernier) qu’à nous informer. Sauf de temps à autre un copier coller périmé chantant les louanges du gouvernement, Gâchis total de l’argent du contribuable !