Buenos Aires : faillite et confinement.

Buenos Aires : faillite et confinement.

Depuis quatre mois, la capitale argentine est confinée. Le nouveau Président, Alberto Fernandez, élu il y a sept mois a prolongé la mesure, avec l’appui du maire de la ville, Horacio Rodriguez Larreta, qui fait partie de l’opposition. Jusqu’à présent, le confinement faisait presque l’unanimité.

 

« Il n’y a pas d’alternative », a précisé le Président Argentin

Confinement jusqu’au 16 aout

Le confinement durera au moins jusqu’au 16 août. Le 15, cela fera cinq mois de confinement pour la province de Buenos Aires, 15 millions d’Argentins et 90% du PIB.

D’ici là, l’Argentine aura officiellement fait faillite. Il y a en effet peu de chances qu’un accord soit trouvé avec les créanciers, alors que l’échéance des remboursements a déjà été repoussée jusqu’à début août. Les autorités argentines auraient proposé de rembourser 30% de la dette de 311 milliards de dollars dont 60 milliards au FMI, puis 50%, avec un délai de grâce. Les créanciers ont refusé. Le peso s’est effondré un peu plus, l’inflation dépasse les 50%. Le pays est à l’arrêt.

Est-ce le système de soins, formidable pour le continent, d’excellent niveau  et gratuit, le confinement de longue durée, ou la chance, le virus a relativement peu touché l’Argentine, surtout par rapport à d’autres pays latino-américains : Pérou, Chili, Brésil, Mexique, Equateur, sont parmi les  pays les plus touchés pour le nombre de morts par rapport à la population.

L’Argentine compte 3500 morts dus au Coronavirus, ce qui est évidement beaucoup, mais relativement peu par rapport aux autres. 82 morts par million d’habitants, quand le Brésil et la France en compte 450, cinq fois plus.

 

Faillite en cascade

Le confinement a été décidé très tôt, alors que le pays comptait peu de cas. Le nombre s’accroît progressivement. Certains reprochent désormais au gouvernement d’avoir confiné trop tôt, d’autres réclament un confinement assoupli, ce qui a déjà été le cas, ou encore un confinement réservé aux  populations à risque. Car les effets du confinement provoque aussi ses dégâts médicaux, notamment des séquelles psychologiques comme on les retrouve partout ailleurs, particulièrement chez les personnes âgées. Mais aussi des reports de soins, d’analyses et d’opérations.

Qui plus est, en Argentine, c’est l’hiver. Les maladies classiques du froid sont là. Même si la capacité d’accueil en soins intensifs a doublé, les hôpitaux seraient sous tension.

En réalité, personne n’en sait plus vraiment rien car les informations sont de plus en plus incertaines, contestées, et le consensus politique s’effrite: l’ancien Président, Mauricio Macri, défait par Alberto Fernandez, a soutenu une manifestation accusant le gouvernement de suspendre les libertés en raison du virus. Alberto Fernandez  lui a répondu : « Pour être libres, nous devons d’abord être en vie. » La popularité de Macri reste très faible par rapport à celle de Fernandez (33% contre 55%), mais ce dernier a perdu 15 points ces deux derniers mois.

 

Une argentine résiliente

Les conflits politiques et surtout sociaux vont se durcir dans l’année qui vient, et les accusations réciproques vont forcément s’amplifier : Le PIB argentin devrait encore se contracter de 10% selon le FMI, après -2% en 2019 et 2008, et la Banqueroute annoncée devrait amplifier le drame. S’ajoute cette crise du Coronavirus qui n’en finit pas et le confinement qui achève de ruiner l’économie. Selon l’ONU, 60% des enfants argentins pourraient vivre sous le seuil de pauvreté avant la fin de l’année. 40% des Argentins y étaient déjà avant le confinement. Combien de maladies et de décès seront dus à la pauvreté ? Il faudra des années pour le savoir.

« L’Argentine parvient toujours à se relever» expliquait Alberto Fernandez aux étudiants de Science-po Paris lors de sa visite en France en février dernier, quand il venait plaider pour un report de la dette. On peut presque dire l’inverse : elle n’est jamais parvenue à se relever de sa première faillite. Depuis 1950, l’Argentine a passé un tiers de son temps en récession. Jusqu’à présent, personne n’a réussi à sortir de la crise structurelle qui mine le pays, avec ou sans Covid. Un miracle ? Après tout, le Pape est argentin.

 

  1. Du coté de la France, le Consulat est toujours fermé. Les demandes d’aide exceptionnelles, qui vont de 129€ à 323 € selon les situations personnelles, sont traitées en ligne et par téléphone.
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