Violeta Bulc veut exclure la 5G des voitures connectées

La Commission européenne souhaite que le WiFi, plutôt que la 5G, soit la norme pour les voitures connectées. Violeta Bulc assure que le WiFi est l’option la plus fiable pour sauver des vies.

Violeta Bulc est commissaire européenne en charge du transport.

Pourquoi avez-vous plaidé avec autant d’insistance en faveur du WiFi par rapport à la 5G dans le débat sur les voitures connectées ?

Le WiFi est une technologie qui a fait ses preuves et qui n’est pratiquement plus brevetée. Il est disponible dès maintenant, facile à mettre en œuvre et bon marché. C’est abordable pour tout le monde. L’un des principaux points politiques de mon mandat a été l’amélioration de la sécurité routière et la mise en place d’une approche systémique de celle-ci. Je souffre personnellement quand je vois que 25 000 personnes perdent la vie chaque année et 137 000 sont gravement blessées.

Maintenant, les gens veulent que nous attendions trois ou quatre ans au cas où la nouvelle technologie deviendrait disponible. Nous disposons d’une technologie qui peut être déployée maintenant et qui peut sauver des vies.

Le nombre de décès diminue dans l’UE, mais à un rythme décroissant. Est-ce une solution ?

Ce que nous avons vu, c’est que l’approche actuelle a épuisé les outils existants, alors nous devons aller de l’avant. En tant qu’ingénieur de profession, je suis ennuyée par les informations trompeuses qui disent que le WiFi remet en question les modèles économiques existants de la 5G. C’est faux : les objectifs des deux réseaux sont différents. Je préconise que la signalisation de voiture à voiture soit gratuite. Ce service devrait être offert au même niveau que les appels d’urgence, personne ne devrait en tirer profit.

Pourquoi fallait-il choisir entre 5G et le WiFi ?

Le WiFi est la seule option disponible. Nous lancerons un appel à tester la 5G, mais il n’y a aucun produit sur le marché aujourd’hui que nous pourrions tester, déployer ou pour lequel nous pourrions établir des normes. Il n’y a rien sur le marché, y en aura-t-il dans deux, trois, quatre ans ? Je ne sais pas. C’est trop risqué.

Les grands constructeurs automobiles allemands soutiennent la 5G et ont fait part de leurs inquiétudes à Berlin. Ils craignent notamment de perdre leur avantage concurrentiel par rapport à la Chine ? Que dites-vous de ces inquiétudes ?

Il s’agit de sécurité routière ! La 5G sera bientôt associée à un grand nombre de services à valeur ajoutée. Pourquoi ne se concentrent-ils pas là-dessus ? Pourquoi ne s’engagent-ils pas avec nous et ne livrent-ils pas des produits pour que nous puissions commencer à les tester afin de développer une mobilité autonome à part entière ?

Il ne s’agit pas ici de mobilité autonome, mais simplement d’un moyen simple de sauver des vies. Je suis très favorable à C-ITS [Cooperative Intelligent Transport Systems] parce qu’il est abordable pour toutes les gammes de prix des voitures, pour les piétons, les cyclistes et ainsi de suite.

Si la 5G était effectivement adoptée, cela créerait-il un système de sécurité à deux niveaux ?

Évidemment, ils doivent avoir un modèle économique en tête puisqu’ils se battent tellement pour ce dispositif de sécurité. Mais je ne pense pas que cette fonctionnalité devrait être à vendre. Elle ne doit pas être réservée aux voitures les plus couteuses.

Quel genre de réactions avez-vous observées de la part des États membres ?

Jusqu’à présent, ils ont été très positifs au sujet de C-ITS et seules l’Espagne et la Finlande ont soulevé des questions de compatibilité. Pour le reste, on verra. Mais je ne m’attendais pas à ce que l’industrie des télécommunications s’y oppose autant.

J’ai travaillé dans les télécommunications pendant des années, mais je ne comprends pas leurs arguments. Le 5G est un concept révolutionnaire pour l’industrie mobile, mais je ne comprends pas cette lutte pour un signal qui sera utilisé pour des raisons de sécurité.

En quoi cette mesure législative était-elle vraiment nécessaire ?

Il s’agit d’établir un cadre normalisé. Prenons l’exemple du Japon. Lorsqu’ils ont introduit le système en 2016, ils ont réduit le nombre d’accidents de 30 % la première année. Une étude de l’Université du Michigan a montré que les États-Unis pourraient réduire le nombre de décès de 12 % par an si cette technologie était mise en œuvre.

Pourquoi n’avançons-nous pas avec quelque chose qui est déjà disponible ? La seule raison que j’ai entendue est que le design des produits inclut déjà le 5G et qu’il n’y a donc pas de place pour que la puce WiFi soit incluse. Je suis ingénieur. Ce n’est pas une raison suffisante. Cela me porte à croire qu’il s’agit d’une question de principe et que je m’en moque quand il s’agit de vies.

La commission des transports a récemment voté contre la proposition, le Parlement dans son ensemble votera en plénière le 17 avril. Êtes-vous confiante ?

On ne peut jamais avoir confiance en rien ici. J’essaie juste d’être entendue. Fait intéressant, j’ai invité des sociétés de télécommunications à venir en discuter avec moi, mais personne n’a voulu trouver le temps pour cela. Ils ont parlé à mon équipe technique, mais pas avec moi.

Sam Morgan à Strasbourg

Un article publié sur le site de notre partenaire

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