L’ultime claque pour Boris Johnson

L’ultime claque pour Boris Johnson

En quelques heures l’avenir du Royaume-Uni a basculé jeudi 7 juillet 2022 avec la démission de son Premier ministre, Boris Johnson, qui a aussi quitté la tête du Parti conservateur, trois ans après le départ de Theresa May. Mais il a annoncé devant le 10 Downing Street qu’il resterait Premier ministre jusqu’à l’arrivée de son successeur.

“ J’ai essayé de convaincre mes collègues que changer de Premier ministre serait “excentrique” au moment où notre gouvernement réalise tant de choses, mais sans succès”

Boris Johnson, démissionnaire.

Du 05 au 07 juillet, une cinquantaine des ministres de Johnson ont démissionné, ainsi il a perdu la confiance de son parti parlementaire.

Élection d’un nouveau leader du parti

Le Premier ministre est normalement élu grâce aux Législatives. Mais outre-Manche, les dernières élections générales ont eu lieu en 2019. Le Parti conservateur avait obtenu une majorité absolue, ce qui avait permis à Boris Johnson de remplacer Theresa May au poste de Premier ministre et d’accélérer le processus du Brexit. Ces élections étaient anticipées.

En Grande-Bretagne, les Britanniques se rendent normalement aux urnes tous les cinq ans pour les « general elections », l’équivalent des élections législatives. Il s’agit d’un mode de scrutin uninominal majoritaire à un tour.

Dans la situation actuelle, comme les conservateurs sont majoritaires à la Chambre des communes, ils peuvent désigner un nouveau Premier ministre. Les prochaines élections générales doivent avoir lieu en 2024.

Le puissant comité d’arrière-ban de “1922”, composé de députés conservateurs, décide du calendrier de la direction du Parti conservateur et se réunira plus tard.

Certains députés font pression pour que le processus soit raccourci, les membres ayant peut-être un mois, plutôt que tout l’été, pour prendre une décision concernant le nouveau chef afin de faire sortir Boris Johnson du n° 10 Downing Street le plus rapidement possible.

Une source a déclaré : « Cela n’aura pas d’importance s’il dit qu’il restera jusqu’à l’automne. »

Quel est le profil des candidats ?

La course pour le remplacer à la fois comme chef du Parti conservateur et comme Premier ministre est grande ouverte. De hauts responsables du gouvernement de Boris Johnson, dont le chancelier récemment démissionnaire Rishi Sunak et la ministre des Affaires étrangères Liz Truss, sont susceptibles de se présenter, et des rivaux de Johnson comme l’ancien ministre des Affaires étrangères Jeremy Hunt devraient également entrer dans la course. Il pourrait aussi y avoir Sajid Javid, l’ancien ministre de la santé démissionnaire, Tom Tugendhat, ou Nadhim Zahawi, qui a été récemment nommé Chancelier de l’échiquier. Il a été chargé des vaccins et de l’éducation. D’autres noms circulent comme Dominic Raab, Suella Braverman, l’Attorney General et Ben Wallace, chargé de la Défense, qui est populaire selon un sondage.

La première étape de l’élection à la direction commencera avec le vote des 358 députés conservateurs pour réduire à deux la liste des candidats déclarés. Ensuite, environ 180 000 membres cotisants du Parti conservateur voteront pour élire le prochain leader.

Cela pourrait prendre environ six semaines ou plus, selon le nombre de candidats pour le poste. Lors du dernier vote de ce type en 2019, 10 candidats étaient en lice et six tours de scrutin ont été nécessaires avant que les deux derniers candidats n’émergent.

Celui qui remplacera Boris Johnson héritera d’une économie secouée par une crise du coût de la vie avec une inflation qui s’accélère à un rythme croissant depuis quatre décennies. L’agitation parmi les travailleurs est déjà en train de monter, alors que le personnel des chemins de fer, les postiers, les enseignants et les avocats plaidants déclarent tous des grèves ou projettent de le faire. Certains font même un parallèle avec les années 1970 et l’hiver du mécontentement où des grèves massives avaient causé un grand désordre dans le pays. Un énorme défi attend le nouveau chef du Parti conservateur et Premier ministre. Il devra également réparer un parti fracturé et à bout de souffle après douze années au pouvoir et qui a souffert alors que l’administration de Johnson a vécu de crise en crise. Et ils devront réparer les relations avec l’Union européenne qui ont été tendues par les menaces de Johnson de revenir sur l’accord du Brexit qu’il avait négocié.

Que pensent les Français au Royaume-Uni ?

Lucie, qui habite à Londres depuis quelques années, nous a dit : “Bon vent. C’est une honte qu’il soit resté au pouvoir avec tant de casseroles au derrière. Au Royaume-Uni nous appelons aux urnes pour élire le Premier ministre tous les 5 ans. Et en cas de décès ou démission alors il y a une « by-election ».

Elle ajoute : “22 ans dans ce pays plutôt stable et depuis le référendum sur le Brexit de 2016 nous en sommes à la deuxième élection législative. Vous imaginez deux fois les présidentielles en 6 ans ? Quand nous pensons que post Brexit le slogan des conservateurs c’était “ strong and stable leadership”… C’est une blague.”

Quant à Mehdi, habitant à Londres depuis 11 ans, “Boris Johnson a été le porte-voix du Brexit alors qu’il était conscient de toutes les conséquences du départ de l’Europe. Il n’a pas arrêté de donner des consignes de lockdown alors qu’il a organisé des fêtes en plein confinement. Il a été lié à plusieurs scandales. Il n’a fait que mentir aux Anglais.”

Gouvernement corrompu

Guillaume, qui habite à Londres depuis 8 ans, estime que Boris Johnson est un “Brexiter par opportunisme, qui ne s’est pas soucié un instant des effets négatifs dont il était conscient (il avait promu l’UE juste avant). Gouvernement corrompu par les oligarques russes, contrats frelatés des PPE pendant la Covid, ouvertement au service des sponsors du parti… Une absence totale de moralité et de responsabilité. Avec Cameron (encore un génie !), ils représentent l’arrogance de classe d’Eton. Seule chose, il est peut-être sympa pour boire une pinte, mais franchement minable comme dirigeant. Les Français réagissent parfois trop rapidement et trop vivement, mais je suis resté consterné de voir les British prendre connaissance des frasques de Bojo et toutes les oublier. Ce sont quelques bières dans le jardin qui ont outré le pays !”

Peu de candidats charismatiques

Pour Guillaume Loyau, “Je n’ai pas eu l’opportunité de suivre en détail le feuilleton politique de ces derniers jours, car j’étais trop occupé à travailler. Cela faisait longtemps que de nombreux politiciens du parti conservateur essayaient de se débarrasser de Boris Johnson à la tête du pouvoir (pour diverses raisons). Jusque-là il avait réussi tant bien que mal à se maintenir en place. Ce qui va être intéressant dans les prochaines semaines, c’est de voir qui va émerger comme nouveau leader du parti conservateur (il y a peu de candidats charismatiques) et avec quelles politiques (notamment sur le plan économique)”

“Il faut de nouvelles élections…”

Pour Charlotte Minvielle, Co-Secrétaire d’EELV UK, “la démission de Boris Johnson est une bonne nouvelle. Il avait perdu la confiance du peuple britannique et des membres de son propre parti. Mais nous ne pouvons pas attendre qu’un nouveau leader soit en place puisqu’il dit partir maintenant. Et surtout, de nouvelles élections doivent se tenir au plus tôt, car c’est toute la gestion désastreuse du pays par les conservateurs qui doit être remise en cause’

Qu’en pense le député des Français, Alexandre Holroyd ?

Alexandre Holroyd
Alexandre Holroyd, Député des Français des iles britanniques, des pays baltes et de Scandinavie (Renaissance).

Alexandre Holroyd estime que “le Royaume-Uni est un partenaire essentiel de la France : nous partageons les mêmes défis, les mêmes enjeux, les mêmes problématiques, mais aussi et surtout une histoire et des valeurs communes. Ces dernières années, à la faveur d’une certaine gestion du Brexit outre-Manche, les relations entre nos deux pays ont pu être parfois tumultueuses. Nous avons maintenant l’occasion de tourner la page et de relancer les choses sur une base plus sereine, plus sérieuse et plus stable. Il nous faut saisir cette occasion.”

Des questions restent à résoudre. Boris Johnson partira-t-il vraiment du 10 Downing Street après l’arrivée du nouveau leader fraîchement élu ? Dans cet avenir sombre, la seule certitude, c’est que Larry le chat de Downing Street sera toujours présent.

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