Les États membres ont accueilli avec une grande prudence le nouveau pacte sur la migration et l’asile proposé par la Commission européenne, bien que tous admettent l’urgence de régler une question dans l’impasse depuis plus de cinq ans.
Le sujet a été abordé jeudi 8 octobre lors d’une vidéoconférence des ministres de l’Intérieur de l’UE. C’était la première fois que le nouveau pacte sur la migration et l’asile proposé par la Commission européenne faisait l’objet d’une discussion.
Ce dernier propose une solidarité « à la carte », principalement axée sur l’expulsion des migrants qui ne remplissent pas les critères permettant de demander l’asile dans l’Union, soit deux tiers de ceux qui franchissent actuellement les frontières des 27.
« Je suis optimiste », même s’il faudra « encore beaucoup de travail pour trouver un équilibre entre les intérêts des uns et des autres », a déclaré à l’issue de la réunion Horst Seehofer, le ministre allemand de l’Intérieur, dont le pays assure actuellement la présidence tournante du Conseil de l’UE.
« Nous devons faire en sorte que les deux tiers (des migrants) qui arrivent et qui n’ont pas le droit de rester, repartent le plus rapidement possible », a ajouté le ministre allemand, en soulignant que cette manière de procéder répondait à la fois aux intérêts des pays en première ligne (Espagne, Italie, Grèce, Malte et Chypre) et à ceux des États qui craignent les mouvements dits « secondaires », effectués par les migrants qui entrent par un pays et se déplacent ensuite vers un autre.
L’objectif de l’Allemagne est de parvenir à un accord politique sur l’essentiel de ce pacte d’ici à la fin de l’année. Ainsi, en plus de la réunion déjà prévue en décembre sur ce sujet, une nouvelle rencontre des ministres a été agendée en novembre, et toutes deux se dérouleront « si possible » « en présence » des participants.
Volonté de coopérer
« Il existe une large volonté de collaborer sur la base de cette proposition » qui aborde les points « décisifs » permettant de parvenir à des accords, a assuré Horst Seehofer. Parmi ces points clé, il cite la solidarité, la protection des frontières, les retours et les partenariats avec les pays d’origine et de transit des migrants.
Selon le ministre, les cinq pays d’entrée – dont les représentants se sont entretenus avec lui mercredi 7 octobre lors d’une vidéoconférence – doivent obtenir « la certitude qu’ils ne devront pas garder tous les migrants qui arrivent sur leur territoire ».
Parallèlement, les intérêts des pays du groupe de Visegrad (Hongrie, Slovaquie, République tchèque et Pologne), qui refusent d’accueillir des demandeurs d’asile, devront être pris en compte.
« Nous trouverons une solution avec les uns et les autres »
Host Seehofer
Personne n’est complètement satisfait
Ylva Johansson, la commissaire européenne aux affaires intérieures, a pour sa part reconnu qu’« aucun État membre ne s'[était] déclaré entièrement satisfait » du pacte.
« Chacun a exprimé ses préoccupations et les choses qu’il souhaite changer. C’est ce qui est au menu des mois à venir »
Ylva Johansson, la commissaire européenne aux affaires intérieures
Selon elle, il est trop tôt pour que les pays se prononcent sur la manière dont ils participeront aux efforts de solidarité, car cela dépendra des situations, a-t-elle ajouté.
Fernando Grande-Marlaska, le ministre espagnol de l’Intérieur, a prévenu lors de la réunion du 8 octobre qu’« un système dans lequel la pression [migratoire] se concentre sur cinq pays ne fonctionnera pas ».
« Aucune politique européenne de migration et d’asile ne sera véritablement efficace sans un partenariat vaste et durable avec d’importants pays tiers ; l’efficacité de notre politique européenne de migration et d’asile dépend de cette dimension extérieure », a-t-il déclaré, selon son ministère.
Éviter les erreurs du passé
Le nouveau pacte entend éviter les erreurs du passé, il exclut dès lors de contraindre les pays de l’UE à accueillir des demandeurs d’asile et mise plutôt sur la protection des frontières et l’accélération des retours de ceux qui ne sont pas autorisés à rester au sein de l’Union.
Entre autres nouveautés, il propose de doter l’UE de procédures plus efficaces de contrôle des frontières extérieures et inclut pour la première fois une « évaluation préliminaire » des migrants qui traversent illégalement la frontière ou ont été débarqués après une opération de recherche et de sauvetage en mer.
Il prévoit également un mécanisme de solidarité qui doit être activé lorsqu’un pays est sous « pression » ou dans une situation « d’urgence ».
Dans ces circonstances, les autres États membres (dont la France) seront obligés de choisir entre l’accueil d’une partie des migrants, la participation au refoulement ou le soutien opérationnel, par exemple en finançant la construction d’un camp de réfugiés.
Ce dense paquet de mesures inclut d’autres idées nouvelles, et en particulier celle des « retours sponsorisés », auxquels pourront participer les pays qui ne souhaitent pas recevoir de migrants mais qui veulent apporter leur aide pour les retours.
Cette assistance pourra consister à organiser des vols de retour ou à s’acquitter des indispensables prises de contacts diplomatiques qui doivent faciliter le retour des migrants.
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