Le gouvernement a remis aux parlementaires un rapport inventé avec des associations de Français de l’Etranger pour simplifier l’imposition sur le revenu des contribuables domiciliés à l’étranger. Des groupes Facebook, comme « Non-résidents contribuables en France: alerte sur une catastrophe annoncée! » ainsi que la FdEif ou le DINRF, constitués d’expatriés assujettis totalement ou partiellement en France, ont été au coeur de ce process.
Ces collectifs civils ont, pleinement, été intégrés, par les cadres du Ministère du Budget, à l’établissement des solutions proposées ce mardi 28 juillet aux parlementaires. Une première en France, un réel exercice de démocratie participative que les administrateurs du groupe, « Non-résidents contribuables en France: alerte sur une catastrophe annoncée!, ne manquent pas de souligner.
« Ce rapport consacre votre groupe et le principe de co-construction de la réforme. Nous pouvons l’affirmer fièrement, nous avons la chance de vivre en démocratie ! » Nicolas Mariage – administrateur du Groupe
Trois pistes sont offertes aux députés et sénateurs pour une mise en oeuvre en 2021.
Ca serait donc la troisième réforme en trois ans pour la fiscalité des contribuables domiciliés hors de l’Hexagone, 224.000 foyers regroupant 471.000 personnes sur plus de 2,5 millions d’expatriés.
A la demande des parlementaires, qui avaient voté une disposition dans ce sens fin 2019 suite à la levée de bouclier lors du premier vote de la reforme, le ministre délégué chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt, et le secrétaire d’Etat en charge des Français hors de France, Jean-Baptiste Lemoyne, ont remis mardi un rapport dessinant trois scénarios de réforme applicables dès 2021.
« Notre objectif est de trouver une solution conciliant simplification, soutenabilité et justice fiscale « , a expliqué Olivier Dussopt.
Les députés et les sénateurs de la majorité avaient soutenu l’idée d’une simplification des règles de l’imposition sur le revenu. Lisibilité ét équité devaient en être les fils conducteurs.
Jusqu’à aujourd’hui, les non-résidents disposaient d’un traitement allégé pour l’imposition de leurs salaires et revenus du travail, par rapport à ceux qui sont restés en France.
La suppression de la retenue à la source partiellement libératoire (0 %, 12 %, 20 % jusqu’à 43.477 euros de revenus) initialement programmée pour 2020 et reportée avec le moratoire, alignerait les expatriés sur les Français au pays. Mais la modification de l’imposition aurait été trop rapide entrainant soit des défauts de paiement soit des situations financières inextricables pour les familles.
En effet, certains de ces contribuables, qui ont, pour 85% d’entre eux, de petits ou « classiques » revenus, risquaient de voir leur impôt s’envoler. Face au tollé et aux remontées auprès des élus consulaires, les députés avaient voté en catimini un moratoire d’un an sur cette partie de la réforme. Le temps de réaliser une étude complète et apporter des solutions.
Déductions confirmées : Pinel, Pension alimentaire, etc..
Le rapport, retardé deux fois du fait de la crise sanitaire, annonce immédiatement la couleur !
Le gouvernement serait prêt à des aménagements, mais le coeur de la réforme sera conservée.
Pour rappel, le nombre de foyers fiscalisés en France mais dont la résidence est en dehors du territoire national croit en moyenne de 10 %/an depuis 5 années. Ils versent, annuellement, au budget national plus de 1,5 milliard d’euros (principalement de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux, la contribution pour les hauts revenus ne représentant que 10 millions d’euros).
Le nouveau taux d’imposition minimum de 20 % au premier euro sur les revenus français (30 % au-delà de 27.519 euros) rentrerait en application, ce qui fera croitre encore la contribution des expats.
En échange, Bercy laisserai en place des dispositions favorables concédées aux non-résidents dans le cadre de la réforme : déductibilité des pensions alimentaires, réduction d’impôt Pinel, exonération des plus-values immobilières en raison du départ à l’étranger, exonération de CSG et de CRDS sur les revenus du capital. Toute fois, l’ensemble des outils fiscaux disponibles pour les Français en France ne seront toujours pas accessibles aux Français de l’Etranger.
La Décote :
Le premier scénario permettrait de réduire la hausse issue de l’application de la réforme déjà votée sans la remettre en cause. Pour compenser la suppression de la retenue à la source libératoire, les non-résidents bénéficieraient de la décote, ce mécanisme aujourd’hui réservé aux résidents qui diminue le montant de l’impôt afin d’atténuer le choc de l’entrée dans le barème progressif. Aujourd’hui, ils ne sont tenus de déclarer que leurs rémunérations françaises. Ils auraient droit à la décote à condition de calculer leur impôt sur la base de leurs revenus « mondiaux », une méthode alternative qui se traduit par l’application d’un « taux moyen » parfois avantageux.
La décote permettrait de réduire l’impôt des foyers qui déclarent au maximum 25.663 euros de revenus mondiaux pour un célibataire et 45.951 euros pour un couple. Un retraité touchant 2.000 euros de pension par mois verrait ainsi sa contribution passer de 840 euros par mois à 1.088 euros (+30 %), au lieu de bondir à 1.280 euros sans décote.
Cette solution ne reçoit aucun soutien au sein de la société civile.
« La solution 1 ne correspond à rien c’est du double zéro devant l’impact, ca a été mis pour la forme, pour tenir comptes des errances des députés des FdE, mais ca ne compte pas. » – Jean Calvignac – administrateur du groupe FdEif
Un barème progressif propre aux expatriés
Dans ce deuxième scénario, la retenue à la source libératoire serait bien supprimée, mais un barème d’imposition propre aux non-résidents serait créé : par exemple, pas d’impôt jusqu’à 5.000 euros de revenus, puis 11 % jusqu’à 50.000 euros, 30 % jusqu’à 90.000 euros, 41 % au-delà. Ce modèle « continuerait à faire des perdants », entraînerait « une variation injustifiée de l’imposition », et « serait source d’une complexité supplémentaire », souligne cependant le rapport.
Le maintien de la retenue à la source libératoire
La retenue à la source partiellement libératoire serait conservée, afin d’éviter une hausse de l’impôt. Cependant, son fonctionnement serait rapproché du prélèvement à la source. C’est à dire que le calcul du taux moyen sur les revenus mondiaux ayant d’ores et déjà été automatisé, il suffirait de rembourser le trop prélevé à la source ! Ça ne coûterait que 12 millions d’euros sur les 400 millions d’euros collectés chaque année.
Sauf que pour que cela fonctionne, il faut donc fournir à l’administration fiscale l’ensemble de ses revenus mondiaux. Informations que peu de contribuables ont envi de communiquer au Trésor Français. En sus, cela entraine un gain de trésorerie au profit de l’Etat puisque celui-ci ne rembourserai que l’année suivante le trop perçu.
Cependant certains élus comme des associations se rangent derrière cette solution.
« On garde la moitié de la réforme qui est favorable, et on évite l’imposition au premier euro. La réforme est neutre sur le plan fiscal par rapport à 2019, mais on avance sur le prélèvement à la source, la simplification, la déclaration des revenus monde », approuve le député LREM Roland Lescure.
Le groupe « Non-résidents contribuables en France: alerte sur une catastrophe annoncée! » apporte son plein soutien à cette solution. Il propose même à ses adhérents un logo pour promouvoir ce choix.
D’autres sont plus sceptiques.. Même au sein de la majorité présidentielle, car la volonté de simplification, à l’origine de la réforme, semble avoir été abandonnée pour préserver les apparences.
« La simplification, je ne la vois pas trop, mais au moins cela permet d’éviter une brusque hausse d’impôts », commente sa collègue Anne Genetet. La parlementaire regrette cependant qu’« on abandonne l’idée de hausse progressive de l’impôt sur plusieurs années ».
Un dénouement pour cet automne !
Comment on ne sait pas encore.. Mais ce qui est sur que les Français de l’étranger contribueront de façon plus importante au Budget National. Lors de l’examen du budget 2021 en octobre, les députés et les sénateurs trancheront parmi ces solutions ou en inventeront, peut-être, une quatrième..