C’était une des promesses de la rentrée 2021 : renforcer le système des « Accompagnants d’Élèves en Situation de Handicap » et rendre cette aide gratuite pour tous les élèves concernés. Après vous avoir présenté en avril dernier le statut et le fonctionnement des AESH, nous vous proposons aujourd’hui de voir où en est la mise en application du texte de loi.
Les AESH, ou Accompagnants d’Élèves en Situation de Handicap sont les personnes accompagnant les enfants dans le besoin, sur la voie de l’autonomie. Ils peuvent gérer un enfant en particulier ou plusieurs à la fois. Si en France métropolitaine, tous les élèves en situation de handicap ont toujours eu droit à un AESH de manière gratuite, il n’en était pas de même pour nos petits expatriés. Effectivement, depuis la création de ce poste en 2005, seuls les élèves boursiers avaient droit à une aide gratuite. Les autres familles devaient se débrouiller pour payer les frais (très onéreux). Pour la sénatrice des Français établis à l’étranger, Samantha Cazebonne, la situation n’était pas acceptable. Lorsqu’elle siégeait en tant que députée des Français hors de France, elle avait fait comme promesse d’étendre cette gratuité à tous les élèves en situation de handicap, dès la rentrée 2021.
Par ailleurs, elle s’était donnée pour objectif d’inscrire l’éducation inclusive dans les missions de l’Agence pour l’Enseignement Français à l’Étranger (AEFE). C’est le cas depuis 2019 grâce à l’adoption de deux de ses amendements proposés et inscrits dans la « loi pour une école de la confiance » promulguée au Journal Officiel le 28 juillet 2019. Ces amendements tendent à renforcer le réseau des AESH et leur statut.
Qu’en est-il aujourd’hui de cette promesse ? Les amendements se sont-ils concrétisés ?
Une promesse tenue
« Jusqu’à présent les élèves en situation de handicap, non boursiers, n’avaient pas un accès gratuit aux assistants éducatifs. Aujourd’hui, grâce au texte de loi, ils y ont droit »
Isabelle Resplendino, présidente de l’Association pour les Français en situation de handicap en Belgique (AFrESHEB)
Effectivement, c’était une des promesses de rentrée. Si la gratuité pour tous n’a pas été mise en place tout de suite après le vote de l’amendement, Mme Cazebonne avait promis qu’à la rentrée de septembre 2021, tous les élèves, boursiers ou non, auraient droit à un AESH gratuit.
« C’est une autre très belle victoire pour tout le réseau et surtout pour ces enfants et leurs familles. »
Samantha Cazebonne
Un budget conséquent
D’après la sénatrice Samantha Cazebonne, le projet de loi de finances qui est en débat au Parlement, prévoit une enveloppe de 104,4 millions d’euros pour le volume total des bourses scolaires, finançant en partie les AESH des élèves boursiers. Une somme égale à celle de l’an dernier. Cependant, elle ajoute qu’un million d’euros supplémentaire a été alloué en septembre dernier, pour prendre en charge l’extension des AESH à tous les élèves non boursiers.
« Il est important de noter qu’il y a une volonté politique de rendre l’école plus inclusive. Que nos élus le fassent apparait comme « normal » mais ce n’était pas une obligation en tant que tel, il faut saluer cela ».
La Fédération Syndicale Unitaire, à travers Patrick Soldat, secrétaire national du SNES-FSU
Combien d’élèves et de postes sont concernés chez les Francais de l’étranger ?
Pour l’heure il est encore impossible de savoir combien d’élèves sont concernés par cette mesure, étant donné que l’expansion de la gratuité des AESH à tous les élèves, vient d’être mise en place. Il en va de même pour le nombre de postes d’AESH créés depuis la rentrée.
Comme nous l’explique Mme Cazebonne, le réseau a besoin de plus de temps pour émettre un premier bilan. Celui-ci sera certainement fait fin novembre, au moment du conseil d’administration de l’AEFE.
« Les postes sont encore en train de transmettre à l’AEFE les dossiers des familles, qui rendra ses décisions début 2022, avec paiement rétroactif en septembre 2021. »
Pénuries de personnel formé sur tous les continents
Pour Mme Resplendino, le problème fondamental avec le système français est que « nous faisons de l’inclusion mais de manière légère ». A ses yeux, il y a un réel manque de personnel qualifié, aujourd’hui « personne ne veut être AESH car c’est un poste précaire, mal reconnu et pour lequel on gagne peu. Personne n’a envie d’un tel statut ».
De plus, elle évoque une refonte du système. Aujourd’hui les futurs AESH suivent une formation de 60h, ce qui n’est pas suffisant aux yeux de la présidente de l’AFrESHEB.
Un problème dans le problème
Pour M. Soldat, le problème est plus compliqué que cela : « nous avons un problème dans le problème. Il ne suffit pas de faire passer des lois en France pour que ça s’applique à l’étranger ». En effet, à l’extérieur, les acteurs de la vie politique doivent jongler entre la politique française et la politique locale. Nous sommes sur un temps plus long et ce, même dans les lycées publics français. Ainsi, « on sent qu’il y a une volonté de la part de l’administration mais elle se heurte à des difficultés importantes. »
D’autre part, à ses yeux, le mieux serait de calquer le modèle des Assistantes dans les Écoles Maternelles et non des AESH. Mais de la même manière c’est difficile à étendre à l’étranger pour des questions de différences de salaires entre les pays, etc.
D’après Madame Cazebonne, les mois qui viennent seront essentiels. Effectivement, l’Observatoire pour les élèves à besoins éducatifs particuliers (OBEP) a pour mission d’observer, sonder et pallier les problèmes encore existants. Il devra « répondre aux interrogations ou uniformisations qui seront peut-être nécessaires ». L’élue nous certifie qu’elle sera extrêmement attentive aux futures modifications et à la résolution des problèmes persistants. Elle souhaite que des formations soient proposées rapidement, dans les lieux où le manque de personnel se fait sentir.
« Nous sommes en « année test » et, si tout n’est sans doute pas parfait partout dans le monde, je crois qu’il faut avant tout saluer et remercier l’ensemble des personnes qui ont œuvré pour la mise en place de ce dispositif ».
Samantha Cazebonne
« Une mission d’exemplarité »
Avec les deux amendements adoptés à l’initiative de Samantha Cazebonne en 2019 et 2020, l’inclusion fait partie des missions officielles de l’enseignement français à l’étranger. De fait, l’AEFE se doit de prendre le relais et de vérifier que les dispositifs réglementaires sont inscrits dans l’ensemble des établissements du réseau.
Finalement, les avancées sont accueillies avec enthousiasme par les différents représentants de la communauté des Français de l’étranger. Cependant, ils sont dans l’attente de futures actions. Pour Patrick Soldat, l’AEFE, en charge de la mise en place des AESH, a « une mission d’exemplarité dans ce dossier. En tant qu’acteurs diplomatiques ils se doivent de reprendre les valeurs françaises partout dans le monde, et l’inclusivité en fait partie. » Avant d’ajouter que « faire des campagnes pour l’inclusion c’est très bien, mais ça ne résout pas tous les problèmes, il faut des actions derrière. »
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