Bien-être animal, élevage, abattage rituel  : qu’en pensent les candidats à l’élection présidentielle ?

Bien-être animal, élevage, abattage rituel  : qu’en pensent les candidats à l’élection présidentielle ?

Le combat pour le bien-être animal est inscrit dans tous les programmes. De la surveillance à la fin de l’élevage industriel en passant par l’interdiction de l’abattage rituel, EURACTIV a relevé convergences et divergences chez les prétendants au second tour de l’élection.

C’est un sujet qui s’impose dans la société, surtout depuis que les scandales sanitaires et les révélations de maltraitance animale entachent le secteur.

Selon un récent sondage IFOP pour l’ONGI CIWF France, 84% des Français estiment que « l’élevage en cage est une des pires pratiques de l’élevage intensif, et qu’il faut y mettre fin ». Une question qui transcende les clivages politiques : 79 % des Français ayant l’intention de voter Eric Zemmour souscrivent à ces changements, 93 % pour les sympathisants de Yannick Jadot.

Pour autant, d’un candidat à l’autre, la traduction politique de cette aspiration générale varie et révèle certains clivages.

Sortie de l’élevage industriel

Les candidats Jean-Luc Mélenchon (LFI) et Yannick Jadot (EELV) sont les seuls à vouloir sortir de l’élevage industriel.

« Les animaux terrestres ou marins vivent un martyre que notre humanité nous oblige à faire cesser », note Jean-Luc Mélenchon dans son programme. Il entend ainsi interdire ces « fermes-usines », pour des raisons de lutte contre la maltraitance animale, mais aussi pour limiter le développement de zoonoses, ces maladies favorisées par la promiscuité.

Il promet d’empêcher « immédiatement » l’installation, l’agrandissement ou la réunion d’exploitations, en particulier celles contenant plus de 150 truies ou vaches laitières. Il s’attaque également aux « mutilations et pratiques les plus cruelles » comme l’épointage des becs, le meulage des dents de cochons, l’écornage des veaux, la castration à vif des porcs, etc.

Son calendrier est clair : une sortie de l’élevage intensif d’ici « 2027 au plus tard », de même qu’une sortie de l’élevage en cage à l’horizon 2025. Le candidat ajoute l’obligation pour toute nouvelle exploitation de donner la possibilité aux animaux d’avoir un accès à l’air libre au quotidien.

Sur ce terrain, le candidat écologiste Yannick Jadot n’a pas d’autres ambitions. Ils se donne 10 ans pour remplacer l’élevage industriel par un élevage agroécologique, et pour interdire l’élevage en cage. Les deux candidats s’accordent aussi sur l’interdiction de l’exportation d’animaux vivants hors UE, et sur la limitation dans le temps de transport d’animaux vivants à huit heures.

Pour Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot, ces transformations s’inscrivent dans une volonté de diminuer la consommation de protéines animales. Rien de tel chez les autres candidats, même si Valérie Pécresse (LR) insiste sur le développement de repas végétariens dans la restauration collective, qu’elle a défendu ces dernières années à la tête de la région Ile-de-France.

Le renforcement des contrôles dans les élevages

À droite de l’échiquier politique, les candidats se déclarent attachés à l’amélioration des conditions de vie des animaux. Sans sortir de l’élevage industriel, ils souhaitent tout de même renforcer les contrôles pour s’assurer de l’application des normes existantes.

Du côté du Président sortant, celui-ci devrait rester dans la continuité de son « pacte pour la biosécurité et le bien-être animal » inscrit dans le plan de relance post-Covid « France Relance » en 2020. La feuille de route contient des aides consacrées à la « modernisation des abattoirs », afin de mieux protéger les animaux et de former les professionnels à la protection animale.

Les associations s’étaient réjouies en 2017, lors de la campagne d’Emmanuel Macron, de sa volonté d’interdire la vente d’œufs issus de poules élevées en batterie. Ce qui devait être fait… d’ici à 2022. Si d’immenses progrès ont été réalisés ces dernières années, 36 % des poules étaient encore élevées en cages en 2020. Les associations de défense des animaux mettent tout de même au crédit du Président actuel le décret du 15 février dernier relatif à l’arrêt de mise à mort des poussins mâles à la naissance.

Chez les autres candidats, Eric Zemmour a inscrit dans son programme la volonté de renforcer les contrôles dans les élevages, et Valérie Pécresse avait affirmé lors d’une interview sur France 3 le 12 décembre dernier : « Je leur [l’association L214 qui demandait à la candidate des éclaircissements sur le sujet] ai dit que j’étais prête à m’engager à ce qu’il y ait un vrai contrôle, notamment sur les abattoirs… pour vérifier que le bien-être animal soit respecté. Mais là encore, il y a énormément de normes… »

Quant à Marine Le Pen, elle a fait du sujet du bien-être animal un point cardinal de son programme. Elle affirme que « l’État s’engagera pour améliorer les conditions de sécurité et de travail des salariés, pour augmenter le nombre d’abattoirs de proximité et d’unités mobiles, tout en assurant le respect des normes de bien-être animal ».

Fin de l’abattage sans étourdissement

La mise à mort des animaux d’élevage est un sujet hautement sensible. Emmanuel Macron avait présenté à l’été 2021 son plan abattoir qui vise à renforcer les contrôles, et le cas échéant les sanctions, « accompagner et investir massivement dans les abattoirs » . Plus concrètement, le plan prévoit la création d’une « force nationale d’intervention avec des contrôles généralisés ainsi que le développement de la vidéoprotection ».

Pour Jean-Luc Mélenchon, il faut également renforcer les contrôles, jusqu’à rendre obligatoire la vidéo ou encore « interdire l’abattage des femelles au-delà de 40 % de leur gestation ».

Hormis les contrôles, tout le monde s’aligne sur le fait que l’abattage sans étourdissement ou abattage rituel pose problème. Pour y mettre fin, Valérie Pécresse privilégie la « concertation » avec les représentants des cultes pour « trouver un accord ». « Je pense que si cette question était facile à résoudre elle aurait été résolue depuis longtemps » répondait la candidate dans l’émission Élysée 2022, le 24 mars dernier.

Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot et Marine Le Pen – pour qui « aucun gouvernement n’a jusqu’à présent eu le courage de régler cette question » – s’engagent à interdire ce type d’abattage sans étourdissement. Les deux premiers précisent qu’ils le feront aux termes de discussions avec les autorités religieuses. Valérie Pécresse, Marine Le Pen ou Yannick Jadot proposent de généraliser l’étourdissement réversible, une méthode qui ne tue pas l’animal, mais le rend momentanément insensible à la douleur. Méthode tout à fait compatible avec les rites religieux (kasher et halal).

Eric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon ajoutent la traçabilité de la mise à mort, par un étiquetage sur les produits précisant, entre autres, le mode d’abattage.

Et la pêche ?

Les propositions sur la pêche répondent aux mêmes logiques philosophiques et politiques que l’élevage. Si Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon entendent développer les techniques de pêche « non destructrices », sélectives (pêche à la ligne, casiers) pour protéger les ressources et limiter les dégâts écologiques, Eric Zemmour insiste dans son programme sur la volonté d’obtenir des quotas européens plus favorables à la France. Le candidat Reconquête souhaite également augmenter les concessions de parcs d’élevage et développer « l’aquaculture innovante ».

Les deux candidats plutôt situés à gauche souhaitent enfin lutter contre la pêche illégale, le braconnage et préserver les écosystèmes. Jean-Luc Mélenchon compte protéger au moins 30% du territoire maritime français, majoritairement en réserves intégrales de façon à restaurer les ressources et la biodiversité. De son côté, Yannick Jadot veut protéger les eaux territoriales, en particulier des navires de pêches chinois « qui n’hésitent pas à piller la ressource et contribuent à faire disparaître les grands prédateurs comme les requins ».

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