Une crise de la dette publique aux Etats-Unis est-elle envisageable ? 

Une crise de la dette publique aux Etats-Unis est-elle envisageable ? 

Depuis l’épidémie de covid, les États-Unis pratiquent une politique budgétaire expansionniste portant le déficit public à plus de 7 points du PIB. Après le soutien aux ménages en 2020 et 2021, le gouvernement fédéral a mis en œuvre – avec notamment l’Inflation Réduction Act – une politique de réduction des émissions des gaz à effet de serre en encourageant les entreprises à investir sur le territoire américain. L’endettement public des États-Unis connaît une croissance rapide et dépasse désormais les 120 % du PIB. La question de la soutenabilité de cette dette se posera–telle dans les prochaines années ? 

Depuis quinze ans, les États-Unis ont enregistré des déficits publics toujours supérieurs à 2 % du PIB. De 2014 à 2019, durant le mandat présidentiel de Donald Trump qui avait engagé un plan massif de réduction des impôts, le déficit public était passé de 2 à 4 % du PIB. En 2020, en pleine épidémie de covid, ce déficit a atteint 14% du PIB. Donald Trump comme Joe Biden ont lancé de vastes plans de soutien portant sur des milliers de milliards de dollars. Après être revenu à 6 % du PIB en 2022, le déficit a de nouveau augmenté en 2023 pour s’élever à 7 % du PIB.

La dette publique est passée de 102% du PIB à 122%

Cette nouvelle aggravation est imputable aux mesures en faveur des entreprises investissant dans le développement durable. Avec cette accumulation de déficits, la dette publique est passée de 102 à 135 % du PIB de 2010 à 2020 avant de revenir à 120 % en 2022. En 2023, elle s’est élevée à 122 % du PIB. La dégradation des comptes publics de la première économie mondiale est-elle susceptible de se transformer en crise financière ? 

Un endettement public est dangereux si la demande de titres publics devient inférieure à l’offre de titres publics. Pour le moment, les investisseurs résidents et étrangers continuent à acheter des titres américains. Les achats nets des investisseurs domestiques ont atteint 12 % du PIB en 2023 quand ceux des non-résidents ont représenté 2 % du PIB américain. Entre 2021 et 2023, la banque centrale américaine est devenue vendeuse nette de titres publics avec l’abandon de la politique monétaire accommodante mise en œuvre après la crise des subprimes en 2008-2009. Ce changement de statut n’a pas posé de réels problèmes aux marchés.

Etats-Unis
Joe Biden en conférence de presse en janvier 2024 ©AFP

Les taux d’intérêt réels restent inférieurs à la croissance réelle des États-Unis

De 2010 à 2022, l’encours des titres publics détenus par la FED était passé de 1000 à 6000 milliards de dollars. En 2023, ce montant est revenu à 4 800 milliards de dollars. Depuis le début de la crise sanitaire, les titres américains ont bénéficié du rôle de valeur refuge des États-Unis. La guerre en Ukraine a conforté ce rôle. L’évolution des taux d’intérêt confirme l’absence de problème sur la dette publique américaine. 

Les taux d’intérêt réels à long terme des États-Unis restent, à la fin de 2023, inférieurs à la croissance réelle des États-Unis. L’évolution du CDS (Credit Default Swap) souverain des États-Unis qui reflète le risque de déficit sur la dette des États-Unis, ne marque pas une défiance à l’encontre des titres publics. Ils ont légèrement augmenté mais sans excès. 

La poursuite d’une politique de déficits élevés durant plusieurs années serait susceptible de poser un problème de soutenabilité surtout si la croissance ralentissait. Ces dernières années, celle-ci est demeurée supérieure à la moyenne de l’OCDE. Aux États-Unis, compte tenu de la progression de la population active et du maintien de gains de productivité, la croissance potentielle est d’environ 2 % quand elle ne dépasse pas 1 % en zone euro. Cette situation facilite le financement de la dette publique américaine. 

Une crise de l’endettement public américain se traduirait par une baisse sensible du dollar. Les investisseurs seraient alors tentés de s’en détourner au profit d’autres devises ou valeurs, l’euro ou le bitcoin. La dédollarisation rêvée en Russie voire en Chine est pour le moment théorique et ne semble pas se dessiner dans les prochains mois.

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