Depuis le 1er janvier 2021, le Brexit a bouleversé le quotidien des expatriés en appliquant une politique migratoire plus stricte.
Mais quand la bise du Brexit fût venue, elle a grippé toute la chaîne logistique de l’entreprise. Depuis l’accord de commerce et coopération entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, les démarches administratives se sont multipliées, impactant la fluidité douanière.
Selon un article publié dans le journal The Guardian ce week-end, les exportations britanniques vers l’UE ont chuté de 68% en janvier depuis le Brexit.
S’expatrier, ce qui change !
Au 1er janvier 2021, le Royaume-Uni a mis en œuvre un système d’immigration à point qui traite les citoyens européens et non européens de manière égale. Ce dispositif donne la priorité aux compétences et talents personnels plutôt qu’au lieu d’origine. Il permet d’adapter l’immigration au besoin de l’économie britannique.
Ces transformations majeures ont un impact sur les entreprises qui souhaitent embaucher des citoyens de l’Union européenne.
Selon Hélène Berard, avocate et directrice à Berard & Lovell solicitors, “les entreprises ne pourront plus embaucher des citoyens de l’Union européenne sans s’interroger sur leur statut migratoire et devront procéder à d’ultimes vérifications avant leur embauche.”
D’après elle, les citoyens de l’Union européenne déjà présents au Royaume-Uni avant le 1er janvier 2021, n’ont besoin que d’une carte d’identité ou d’un passeport en cas d’embauche. Mais après le 1er juillet 2021, ils devront montrer à leurs futurs employeurs un pre settled-status ou un settled-status.
Concernant les autres catégories de citoyens de l’Union européenne arrivés sur le territoire après le 31 décembre 2020, ils pourront venir au Royaume-Uni et travailler à condition d’obtenir un visa. Le plus simple ? Trouver une entreprise qui deviendra le « sponsor » du candidat !
En effet, les entreprises britanniques qui veulent embaucher des salariés en dehors du Royaume-Uni après le 1er janvier 2021 doivent obtenir ce qu’on appelle la « sponsoring licence ».
Qu’est-ce qu’une licence de sponsor?
C’est le moyen par lequel une société britannique est autorisée d’employer des personnes extérieures au Royaume-Uni.
Cette licence leur permettra d’être considéré comme un partenaire autorisé par le Home Office (Ministère de l’Intérieur). Ce qui permettra de recruter des gens partout dans le monde. Sans elle, une société de droit britannique ne pourra pas salarier des citoyens d’une autre nationalité.
Pour obtenir ce droit, l’entreprise de Londres, de Glasgow ou d’Ulster, devra démontrer une absence de savoir-faire sur les iles britanniques ou faire valoir des compétences spécifiques attendues. En sus, elles doivent proposer un salaire élevé (au dessus de 28 400 euros/an).
Dans tous les cas, sponsors ou non, lors de la signature du contrat, l’employeur britannique devra vérifier le statut d’immigration et demander les documents attestant de la situation conforme du postulant. Désormais l’employeur aura l’obligation de conserver les documents prouvant qu’il a bien procédé aux vérifications.
Les Français sur le départ ?
“Les entreprises déjà implantées au Royaume-Uni s’adaptent. Il faut juste penser différemment, la liberté de circulation des marchandises et des personnes ayant disparu. Ce sont des contraintes qu’il faut prendre en considération et c’est compliqué. Mais les entreprises ne plient pas bagage pour autant. Sachant que le Royaume-Uni est un pays commerçant à la base, je suis persuadé qu’après le premier choc lié à ce changement, il saura rebondir. »
Hélène Berard
Morosité et tristesse
La Fédération des Associations Françaises en Grande-Bretagne regroupe une cinquantaine d’associations à but non lucratif. Ainsi elle représente une grande diversité d’organisations françaises dans le domaine humanitaire et social, comme dans les arts, ou dans le droit. Implantée partout au Royaume-Uni, elle rayonne surtout à Londres.
Son Président, Jean-François Le Gal partage son sentiment avec nous :
« Il est vrai qu’on sent poindre une certaine morosité au sein des associations françaises et francophones« . Ceci est notamment le fait du « départ d’un certain nombre de français dû au Brexit. Même s’il y a toujours eu des départs au cours des années passées, liés aux cycles de vie des expatriés, ceux-ci étaient auparavant compensés par un nombre au moins équivalent, sinon plus important, d’arrivées. Ce n’est plus le cas depuis le Brexit. Et ce phénomène a évidemment été renforcé par la pandémie »
Jean-François Le Gal
L’éducation : pénurie de professeurs
Lors de notre entretien avec Jean-François Le Gal, le domaine éducatif semble être le futur secteur sous tension.
Selon lui des associations à vocation éducative, comme les écoles FLAM, qui emploient des professeurs de français et ont besoin de recruter des francophones, risquent d’être lourdement touchées par la nouvelle politique migratoire.
Face à cette incertitude, l’inquiétude grandit pour la prochaine rentrée. Sans liberté de circulation et un système de permis à point est en vigueur, la situation, les associations mais aussi les écoles du réseau AEFE risquent de recourir un peu plus aux contrats locaux au dépend de professeurs formés à la française.
Complexités du nouveau statut
Comme nous l’indiquions plus haut, les expatriés arrivés après le 1 janvier 2021 doivent obtenir leur visa ! Cependant, ils sont peu nombreux parmi les candidats à l’expatriation a avoir saisi les conséquences du Brexit.
“Les équipes du Consulat ont effectué un travail absolument remarquable d’information, notamment à destination de la communauté française basée au Royaume-Uni. On peut donc espérer que ces personnes sauront naviguer dans le nouveau système. Le risque est davantage pour les futurs arrivants : de nombreux Français, basés aujourd’hui en France mais souhaitant venir s’installer au Royaume-Uni, ne semblent pas être au courant des nouvelles contraintes migratoires. Ils pensent pouvoir s’installer au Royaume-Uni comme avant le Brexit. Ce n’est pas exact« .
Jean-François Le Gal
Sur des pages Facebook de Français à Londres, on peut constater l’ampleur des dégâts. En effet chaque jour, plusieurs commentaires de personnes sont postés par des Français fraichement débarqués désorientés par les changements post Brexit.
Pour les futurs arrivants, la situation devient complexe surtout pour ceux qui n’ont effectué aucune démarche. L’inquiétude grandit au sein du Consulat. Ils craignent que ces futurs expats se retrouvent dans une situation épineuse en se mettant en infraction avec les règles migratoires britanniques.
Et en Irlande du Nord?
L’Irlande du Nord, même si elle reste dans l’espace douanier européen, afin de préserver la paix avec l’Eire (Irlande du Sud), elle ne dérogera pas aux règles d’immigration. Mais dans cette partie du Royaume-Uni, c’est bien plus la pandémie qui fait fuir les Français.
Jean-Pierre Carré, ancien propriétaire d’une pâtisserie française à Belfast, Chouxchoux, a récemment fermé sa boutique.
“Le Brexit est infime, mais que la pandémie fait beaucoup plus de dommages.”
Jean-Pierre Carré
Un autre français habitant à Belfast depuis 2009, lui aussi, chef d’une pâtisserie française, constate que l’approvisionnement venant du continent accumule les retard.
S’adapter
Avec le Brexit, les Français au Royaume-Uni doivent s’adapter pour y travailler et y vivre. Il y a de nombreuses démarches administratives à la douane ou en prendre en compte pour valider son immigration. Même en étant arrivé avant le 1 janvier 2021, il y a des démarches à faire avant le 31 juin 2021. Pour les nouveaux, le visa est obligatoire, aucun moyen d’y déroger. Les entreprises, elles, vont devoir repenser leur chaîne d’approvisionnement voir leur « business-model ».
Mais les expats ne baissent pas les bras !
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