Sans la Méditerranée, l’Europe disparait.

Sans la Méditerranée, l’Europe disparait.

La Commission Européenne a présenté fièrement son « Nouvel Agenda pour la Méditerranée », avec une enveloppe de coopération d’un montant -un plafond- de 7 milliards d’euros pour la période 2021-2027. Pour mémoire, depuis 2007, l’UE a octroyé 20.5 milliards d’euros, soit environ 1.5 milliards par an en moyenne pour la rive sud. On ne peut pas dire que les résultats soient à la hauteur : « L’espace de paix et de développement », que cherche la Commission, est un théâtre de ruines traversé par les guerres. Avec ce nouvel agenda, présenté comme un « message crucial sur l’importance que nous envoyons à notre voisinage méridional » dixit le Haut Représentant Josep Borell,  l’effort sera moindre : 1 milliard par an en moyenne, pour toute la rive sud de la Méditerranée. Ce n’est pas un nouveau départ, c’est une fuite devant les réalités, un coupable aveuglement. 

L’Europe prend un risque majeur à minimiser ainsi sa frontière la plus fragile, en laissant se creuser les fossés, en ouvrant le champ aux Russes, Américains, Chinois, Turcs  et autres  Frères musulmans, elle creuse sa propre tombe. 

L’Europe creuse sa propre tombe 

Cette année, la Commission a octroyé une aide de plus d’un milliard d’euros pour l’Ukraine, preuve que l’Union Européenne est toujours obnubilée par l’Est, sans comprendre que les défis, les chances, les menaces, l’existence de l’Europe se jouent au sud. 

La Russie, l’Ukraine, la Biélorussie, la Moldavie, la Géorgie, l’Arménie, c’est important. Mais les guerres, les aspirations démocratiques, la surenchère islamiste, les migrations, les circuits criminels, les risques écologiques, les ressources énergétiques, -le tiers du commerce maritime international- sont au sud. 

La guerre est en Lybie, l’Algérie bouillonne, la Turquie menace, le Liban meurt, l’Egypte étouffe, la Tunisie peine et résiste. 

Plus loin les Forces françaises sont au Sahel face aux clans djihadistes, qui s’alimentent de trafics d’armes, de drogue, d’hommes et de femmes, à destination de l’Europe par… la Méditerranée.

Emmanuel Macron a récemment pris une initiative pour que les grand pays partagent les vaccins. Soit. Il a argumenté expliquant que « 10 millions de Français ont des parents de l’autre coté de la Méditerranée ». Très juste. Mais ce ne sont pas les vaccins qui manquent le plus -même s’ils manquent, notamment en France-, tout manque, avec les crises engendrées par le Covid. 

Sept milliards sur sept ans ne changeront rien. La Cour des comptes européenne regrettait le saupoudrage, ce sera donc pire. D’autant qu’il n’y aucune stratégie réelle, comme peuvent l’avoir les autres puissances internationales. La Commission se voit elle-même comme une agence de coopération ou une ONG bureaucratique. Or il n’est pas un sujet, un défi politique, qui concerne l’Europe et qui ne passe par la Méditerranée.

La cassure entre le sud et le nord 

L’Europe ne risque pas de se casser à cause des pressions de la Russie à l’est, elle risque de déchirer entre l’Europe du sud et celle du nord. L’Italie, l’Espagne, la Grèce, le Portugal et la France sont de plus en plus distants des Pays-Bas, du Danemark, de la Suède et de l’Allemagne. Cette cassure est alimentée de l’accumulation des problèmes venant de la rive sud. Si la Grèce ruinée, achète des Rafales à la France, c’est que la menace est réelle. Elle a vu la guerre éclair en Azerbaïdjan, les milices en Syrie et en Lybie. 

Ce peu de clairvoyance et d’ambition de l’Europe pour la Méditerranée, révèle son manque d’unité. Il est le signe de l’inexistence de l’Europe en matière de politique internationale, ce qui est désormais une menace existentielle. Si ceux qui décident de l’avenir de la Méditerranée ne sont pas européens, ils décideront aussi de la fin de l’Europe, et de l’assujettissement de chacun, selon leurs intérêts.

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