ROBLOX, le jeu qui a conquis les enfants (et les adultes) du monde entier - le connaissiez-vous?

Quinze ans après son lancement, le service collaboratif à mi-chemin entre Lego, YouTube et « Minecraft » souhaite se développer en Europe, où de nombreux jeunes joueurs ont déjà succombé à ses charmes.

Créé en 2006, Roblox est encore peu connu en France. La société n’a que récemment traduit sa plateforme de jeu en français, et sa levée de fonds vise à accélérer son expansion internationale. Mais la situation est bien différente dans les pays anglo-saxons. Roblox revendique 90 millions d’utilisateurs mensuels, avec des pointes à 2 millions de joueurs connectés simultanément. La très grande partie de ces internautes sont des enfants et des adolescents, avec un âge moyen inférieur à 15 ans. Roblox reprend la philosophie des Lego: laisser les petits créer leurs propres aventures. Le design des avatars des joueurs s’inspire d’ailleurs largement des figurines en plastiques de la société danoise de jouets.

« Roblox, c’est une institution à la maison ! » Laurent Parlur a 34 ans, français de Miami. Il est le père de trois enfants de respectivement 11, 8 et 5 ans. Tous les trois sont tombés les uns après les autres dans cette plate-forme Internet regorgeant de jeux vidéo pour enfants, conçus par la communauté. « Ils ont commencé parce qu’une nounou avait Roblox sur son téléphone, elle l’a montré à la grande, qui s’est mise à jouer, puis l’a ensuite montré à ses frères, et c’était parti. »

A son origine?  David Baszucki, un ingénieur et entrepreneur américain spécialiste des programmes interactifs de vulgarisation de la physique. « Il s’est rendu compte que ce qui intéressait le plus les enfants, c’était de jouer avec les possibilités ouvertes par ces programmes », relate Chris Misner, PDG de Roblox International. En 2004, Baszucki lance Dynablocks, une sorte de jeu de Lego en 3D rudimentaire, qui sert de prototype au Roblox que l’on connaît.

Plus qu’un jeu, Roblox est une plateforme de création. Une fois inscrit sur son PC, son mobile ou sa console Xbox One, l’internaute peut se prendre pour un développeur en herbe. Roblox lui met à disposition des outils très simples pour composer rapidement un jeu à l’aspect graphique plutôt sommaire. Il peut piocher dans une bibliothèque d’univers déjà bâtis (une ville moderne ou de Far West, un château, une prison….), d’objets déjà modélisés (voitures, arbres, trains…) et choisir son style de jeu (jeu de tir, de courses de voitures, de sport, de survie etc).

Peu médiatique, Roblox se fait vite une place sur Internet grâce à une fonctionnalité dans l’air du temps : la possibilité pour les utilisateurs de créer leur propre petit jeu sommaire et de le mettre à la disposition des autres usagers. En effet, sur le même principe que MySpace, Facebook ou YouTube, Roblox est basé sur la collaboration et l’échange de contenus. L’une des originalités du service est notamment de permettre à des enfants de partager une partie en même temps, y compris s’ils sont à l’autre bout de la planète.

Malgré la frontière de la langue, de nombreux Français connaissent déjà Roblox. Pierre, jeune français de Marrakech, 19 ans, a fait sa découverte dès 2009, un peu par hasard. « A l’époque, j’étais fan du dessin animé Beyblade, je cherchais un jeu flash Beyblade sur Internet, il y en avait un sur Roblox, et voilà ! » Les hommages libres à des séries populaires y sont, en effet, très communs. De plus, Roblox est particulièrement commode pour un geek en culottes courtes : rondelet, gratuit d’accès, peu gourmand, il ne demande aucun équipement spécial, aucun cadeau de la part du Père Noël. « Ça a un peu été ma première machine de jeu », relate Pierre.

Et puis, surtout, Roblox permet à l’enfant de se transformer en apprenti développeur, grâce à une interface graphique très imagée, à défaut d’être vraiment instinctive. « Quand ma grande a compris qu’elle pouvait créer son jeu, elle m’a fait installer l’éditeur et a conçu le truc le plus simple qui soit, un jeu d’obstacle à traverser, narre Laurent Parlur. Puis elle l’a publié, et elle était très fière, ses frères pouvaient jouer à sa création ! »

La carotte pour les adultes : Les Robux, la Monnaie Virtuelle

Du côté des adultes, beaucoup s’y sont mis grâce à la carotte agitée par Roblox : pour personnaliser son personnage, acheter certains jeux ou débloquer des bonus, la plate-forme utilise, en effet, une monnaie virtuelle, les Robux.

Pour en acquérir, deux solutions : sortir la carte bleue (coucou les parents), ou s’inscrire comme créateur. En 2018, après un an de tâtonnement, il lance ainsi Runners’Path, un jeu de parkour – une course acrobatique dans un cadre urbain – ouvertement inspiré du jeu vidéo à grand budget Mirror’s Edge.

Côté créateur, une fois fini, le jeu se retrouve sur la plateforme de distribution de Roblox. Il n’est d’ailleurs pas obligatoire d’être créatif pour s’amuser. Roblox affirme qu’un peu plus d’un million de personnes ont créé des dizaines de millions de titres, accessibles en un simple clic sur son site. Mais dans l’immense majorité, ces jeux ne sont pas finis, peu fonctionnels, voire totalement inintéressants. Beaucoup se contentent de reproduire, avec beaucoup moins de moyens, des succès déjà existants, comme Mario ou Pokémon. Mais certaines créations ont réussi à tirer leur épingle du jeu. Jailbreak, qui permet d’incarner un prisonnier en fuite ou un policier à sa poursuite, est l’un des titres les plus populaires de la plateforme. Il a rapporté à son créateur, âgé de 18 ans, «de quoi payer quatre ans d’études universitaires».

En passant côté producteurs, les utilisateurs de Roblox découvrent, donc, un nouveau monde, où règnent course à l’audience et soif de Robux trébuchants.  Selon les chiffres de l’entreprise, l’ensemble des créateurs européens ont gagné 18 millions de dollars (soit 16 millions d’euros) en 2018. « Certains utilisateurs sont désormais à l’université et gagnent leur vie grâce aux productions qu’ils ont créées, et je suis sûr qu’il y en a plein qui travaillent désormais dans l’industrie du jeu vidéo », déclare Chris Misner à nos confrères du Monde.

Au final, on retient que si elle est d’accès gratuit, la plateforme Roblox regorge de micropaiements. L’avatar du joueur, qui sera le même dans tous les jeux, est personnalisable contre la monnaie virtuelle de la plateforme, les Robux (400 Robux valent 5 dollars, un peu plus de 4 euros). Les créateurs peuvent aussi rendre l’accès à leur jeu payant – ce qui est rare -, ou bien intégrer des mécanismes qui obligent les joueurs à dépenser des Robux. Et ça marche. Au premier semestre 2018, la seule version mobile de Roblox aurait généré 210 millions de dollars. L’application oscille entre la 15e et la 30e place des jeux vidéo les plus lucratifs sur smartphone aux États-Unis, selon l’institut AppAnnie. La plateforme indique reverser une partie de ses revenus aux créateurs: cette somme devrait atteindre 70 millions de dollars cette année. Mais pour devenir millionnaires avant leur bac, les développeurs en herbe doivent mettre la main à la poche. Les Robux qu’ils ont gagnés via leurs créations ne sont en effet convertibles en vrais dollars que s’ils souscrivent à un programme coûtant 20 dollars par mois…

Plus un jeu Roblox est beau et original, plus il est susceptible de devenir populaire et donc de générer de l’argent. C’est ainsi que la plateforme regorge de petites mains, qui proposent aux apprentis développeurs de s’occuper du design de leur jeu contre rémunération. La plupart de ces freelances sont des lycéens ou de jeunes étudiants qui s’exercent sur des projets simples. Sous couvert d’une plateforme sécurisée où les enfants peuvent jouer et créer en toute quiétude, Roblox est aussi une redoutable initiation au monde de l’entreprenariat.

 

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