Rencontre avec Guillaume Bazard, Consul général à Londres

Rencontre avec Guillaume Bazard, Consul général à Londres

Le Consul général de France à Londres, Guillaume Bazard, dans la capitale britannique depuis 2018, a répondu à nos questions sur la Covid, le pre-settled status, l’immigration post-Brexit, les déplacements entre le Royaume-Uni et la France, les activités consulaires (renouvellement de passeport ou carte d’identité, visa). Il réagissait à notre article sur les dysfonctionnements que les Français de Londres nous avaient signalés, vous avez été nombreux à y réagir.

Bilan de la pandémie au sein de la communauté française

Pour Guillaume Bazard, la Covid-19 a affecté les Français comme elle a affecté l’ensemble des personnes résidentes au Royaume-Uni et elle a fragilisé l’activité du Consulat comme le fonctionnement des administrations britanniques, des entreprises.

« Toute la société a été impactée. Pour le Consulat, on a été obligés de réduire toutes les activités qui impliquaient un flux de personnes physiques pour des raisons sanitaires tout en gardant une capacité permanence à traiter des urgences. Le Consulat n’a jamais fermé et le Consulat a toujours été ouvert pour les personnes qui avaient des situations urgentes. »

Guillaume Bazard, Consul général de France à Londres

Pour le Consul, il y avait une demande « d’activités nouvelles qui ont été liées au besoin d’information sur la situation sanitaire, sur les conditions de déplacements et sur des sujets connexes. » Pour y répondre, le Consul et son équipe ont mis en place le télétravail afin de maintenir le service téléphonique et les réponses aux mails. Il y a des dizaines de milliers de questions : comment se rendre en France, quelles sont les règles sanitaires dans un pays. Ces nouveaux besoins n’avait pu être anticipés.

Aussi pendant la pandémie, le gouvernement français a décidé de mettre en place des aides financières spécifiques pour des personnes dont la crise sanitaire a dégradé la situation financière. Pour répondre aux concitoyens concernés, l’administration consulaire à Londres a mis en place à partir du deuxième semestre 2020 une cellule pour répondre aux demandes d’aides financièrement pour les 375 familles qui en ont fait la demande. Pour cela une enveloppe budgétaire d’ peu plus de 750,000 Euros a été débloquée.

« Ça c’est quelque chose d’entièrement nouveau. Voilà des exemples dont la crise a affecté la communauté française et le Consulat. »

Guillaume Bazard, Consul général de France à Londres

Pour Guillaume Bazard, la pandémie met en évidence le besoin d’avoir des services qui soient capables de s’adapter.

« Pour ce qui est de l’administration consulaire, il y a des chantiers à mener pour développer le télétravail et des services accessibles à distance. C’est évidemment très encadré par la loi. Une demande de passeport ne peut pas se faire à distance. Il y a une réflexion qui est en cours en France par le gouvernement pour voir si on peut le faire mais c’est compliqué. D’autre part il y a un problème d’accès à l’information. Le modèle c’est un site internet avec tous les domaines pratiques et mis à jour rapidement. La crise sanitaire nous a obligés à faire des mises à jour quotidiennes sur les conditions de circulation, les restrictions sanitaires. Le téléphone a été réservé aux personnes qui n’ont pas accès à internet et aux personnes qui sont dans une situation d’urgence, de détresse. Le Ministère des Affaires Étrangères est en train de mettre en place une plateforme mondiale qui répondra à toutes les questions génériques pour décharger les Ambassades et les Consulats. Pour quelqu’un qui veut une information sur le passeport ou sur l’état civil, la réponse est la même dans le monde entier. »

Guillaume Bazard, Consul général de France à Londres

Brexit

Depuis le Brexit, les conditions de circulation ont changé. Pour les gens qui n’étaient pas résidents avant le 31 décembre 2020, il faut avoir un visa pour s’installer au Royaume-Uni. Pour le Consul c’est « la fin de la circulation avec des cartes d’identité par exemple pour les gens qui n’ont pas le settled-status, ce type de chose très pratique qui complique la vie de la communauté française mais plus largement des gens qui avaient l’habitude de circuler. On est dans un pays très proche avec des communications nombreuses, faciles et très rapides. Donc il y a des flux dans les deux sens. Il y a des gens qui habitent avec un pied d’un côté et un de l’autre. On a des familles avec des enfants. Les parents habitent ici et les enfants de l’autre. Ils sont scolarisés en France ou inversement. La crise sanitaire a été un problème particulier. Ce modèle de mobilité a été perturbé donc ça a nécessité un besoin d’information. »

« Le problème principal pour un consulat c’est la question des droits des citoyens », a expliqué Guillaume Bazard. Pour le Consul, le Brexit est la fin de la liberté de mouvement.

« Ça veut dire que des millions de ressortissants européens qui sont résidents au Royaume-Uni perdaient la base juridique de leur séjour. Ce qui est sans précèdent en Europe au moins depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. On n’a pas vu ces genres de choses. Donc des milliers de personnes deviennent potentiellement  en situation illégale du jour au lendemain. Cela a nécessité un travail d’information important sur leurs droits et la manière de les faire valoir et plus concrètement d’aider des gens a obtenir le statut de résident, le settled-status. C’est ça la conséquence première pour nous. »

Guillaume Bazard, Consul général de France à Londres

Inquiétudes des Français

Pour le Consul, les Français à Londres sont moins inquiets par le Brexit.

« Ça c’est passé maintenant. Il y avait une période de grosse inquiétude tant que les négociations étaient en cours avant qu’il y ait un accord de coopération, quand il y avait la menace d’une sortie sans accord et un Brexit particulièrement dur. On a eu des personnes qui étaient inquiètes sur leurs capacités à voir leur famille, à continuer à recevoir des visites, à perdre leur emploi, leurs aides sociales donc ça c’était le plus gros. Il a fallu les rassurer et sur la pandémie il y avait une vraie inquiétude au sein de la communauté française sur la capacité des services de santé britanniques à faire face à la crise. Beaucoup de Français, qui étaient résidents ici et adhérents au NHS, ont eu peur de la saturation. Un nombre significatif des Français sont allés en France rapidement dès qu’ils ont pu après le confinement ou avant parce qu’ils faisaient davantage confiance au système de santé français. »

Guillaume Bazard, Consul général de France à Londres

Les chiffres des Français qui résident au Royaume-Uni

Il y a toujours un débat sur le nombre des Français qui habitent au Royaume-Uni. Guillaume Bazard a tenu à nous donner quelques chiffres.

« Il y a inévitablement des Français qui sont partis. La pandémie a eu un effet plus immédiat. On a des compatriotes notamment jeunes qui travaillent dans la restauration, dans l’hôtellerie, dans le tourisme, la culture. Ceux sont des secteurs qui ont été sinistrés par la pandémie. Mais ce n’est pas forcément la partie de la communauté française qui a été inscrite au registre. On n’a pas d’indicateurs précis. Le nombre du registre consulaire a baissé de 2%. Ça ne reflète pas les mouvements réels. »

Guillaume Bazard, Consul général de France à Londres

Le Home Office publie des statistiques régulièrement. Les derniers chiffres par nationalité datent de la fin du mois de juin. 232 000 personnes demandes déposés par des Français. 215 000 ont été traités et parmi ces décisions 207 000 ont obtenu soit le pre-settled status soit le settled status. Un peu plus de 2 000 refus. 210 000 avaient donc reçu un statut. Au 30 juin 2021, un peu plus de 218 000 dossiers des Français n’avaient pas été traités. Pour ces Français, on ne connaît pas l’issue. On aura des prochains chiffres trimestriels en décembre 2021.  Il y a 140 000 Français qui sont inscrits au Consulat. Mais il n’y a pas 100% des Français qui y sont répertoriés. On le voit car 210 000 Français ont obtenu un statut sans compter les Franco-Britanniques qui n’ont pas besoin d’avoir le sésame. Le consulat estime que les bi-nationaux sont 250 000. 

Quel est le rôle du Consulat de France ?

Guillaume Bazard nous explique le quotidien du Consulat.

« D’abord la communauté française ! On est un peu comme la Préfecture ou la Mairie des Français du Royaume-Uni. C’est à dire l’administration des Français, la délivrance de cartes d’identité, de passeports, l’état civil. La nationalité française. Des gens qui sont résidents ici demandent à devenir français. Des Britanniques ou non Britanniques. On a un service d’affaires sociales qui s’occupe des bourses scolaires pour les Français qui sont dans des situations difficiles. Des élections. On va devoir en 2022 organiser les élections présidentielles et législatives. La liste électorale au Royaume-Uni c’est 110 000 Français. Organiser des bureaux de vote et le vote par internet pour les législatives. Ça c’est le volet français. Pour les étrangers il y a la délivrance des visas. En tant normal on délivre autour de 120 000 visas à des non Britanniques et fait nouveau depuis le Brexit, on délivre des visas pour des Britanniques qui veulent aller en France pour des longs séjours. »

Guillaume Bazard, Consul général de France à Londres

Les Français détenus. Que fait le Consulat ?

Pour Guillaume Bazard, après le Brexit de nombreuses personnes n’ont pas pu entrer sur le territoire britannique. 3 500 Européens ont vu leur accès refusé.

« Si des personnes essaient de nous joindre, on peut faire une démarche immédiate. C’est arrivé 5-6 fois. On le partage parmi les Européens car ce n’est pas un problème français. Après on intervient auprès du Home Office. »

Guillaume Bazard, Consul général de France à Londres

Des conseils aux Français qui veulent s’installer au Royaume-Uni

« Le conseil qu’ils aient conscience c’est que après le Brexit, ce n’est plus comme avant. On ne peut plus comme le faisaient des milliers de jeunes, chercher un boulot et rester ici 15 ans. C’est terminé. On peut venir sans visa pour 6 mois pour une simple visite. Si on veut travailler ici, il faut avoir un visa, une offre d’emploi et un permis de travailler au Royaume-Uni », nous a expliqué le Consul.

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