Hier, le 8 mai, le Président de la République, et plus généralement les Français, ont rendu hommage à ceux morts pour la France au cours de la Seconde guerre mondiale. L’occasion pour Lesfrancais.press de vous présenter quelques lieux de mémoire à travers le monde. Sans surprise, c’est en Afrique qu’ils sont les plus nombreux.
Gammarth, en Tunisie
Le cimetière de Gammarth, en Tunisie, est situé à 15 km au nord-est de Tunis, aux abords de Carthage, sur une colline dominant la mer entre la Marsa et Sidi Bou Saïd.
Le service des Anciens Combattants et Victimes de Guerre auprès de l’Ambassade de France en Tunisie gère et entretient ces 8,5 hectares commémoratifs.
Cette nécropole a été créée le 5 janvier 1944 pour recueillir les sépultures des soldats de l’Armée d’Afrique tombés au cours de la campagne de Tunisie (1er décembre 1942 – 13 mai 1943). Elle a été réaménagée dans les années 1950 puis entre 1965 et 1971, lors des opérations de regroupement des corps des 2 268 soldats inhumés dans les cimetières tunisiens de Bab el-Khadra, Bizerte, Djerba, El-Assel, Gabès, Gafsa, Kairouan, Le Kef, Mahdia, Medenine, Sfax, Sidi Yahia, Sousse et Tataouine.
Le site de Gammarth a été réalisé selon les plans établis par M. Zehrfuss, inspecteur général des bâtiments civils et palais nationaux, et M. Acérès, architecte. Le cimetière de Gammarth abrite 4 289 corps de soldats :
- 1.976 tombes individuelles de militaires morts pour la France au cours des opérations et principalement lors de la campagne de Tunisie (décembre 1942 à mai 1943) ;
- 1.214 corps de soldats non identifiés (1914-1918 et 1942-1943) déposés dans un ossuaire ;
- 1.099 corps de soldats décédés en garnison hors des périodes de guerre et regroupés dans un columbarium.
Gammarth abrite aussi la tombe du Soldat Inconnu de la campagne de Tunisie, le mémorial et la tombe collective de l’équipage du sous-marin « Morse », coulé le 17 juin 1940 au large de Sfax, ainsi que des monuments ou des plaques commémoratifs anciennement implantés dans d’autres cimetières tels les monuments aux morts de Bizerte ou de Hammamet. S’y trouve aussi le monument aux volontaires des Corps Francs d’Afrique, érigé à l’origine à Bizerte.
Les cimetières militaires à Madagascar
Le cimetière militaire de Diégo-Suarez à Madagascar abrite les tombes de 921 soldats français, européens et indigènes, enterrés entre la fin du 19e siècle et les années 60.
Cette nécropole nationale française témoigne de soixante-cinq ans d’histoire commune franco-malgache, entre 1895, date de la colonisation de l’île et 1960, celle de son indépendance.
Elle est située à la limite de la ville, au centre du cimetière municipal, en bordure du boulevard Dupleix. Elle compte 921 sépultures de militaires réparties en trois carrés : français, européen et indigène. Ces hommes sont décédés entre la fin du 19e siècle et les années 60.
149 sépultures ont été ajoutées à l’enclos des autochtones, situé au bord du cimetière civil. Il existe par ailleurs un caveau où sont inhumés des légionnaires. Un monument aux morts « A la mémoire glorieuse des enfants de Diégo-Suarez morts pour la France », accueille le visiteur à l’entrée du carré militaire. Un autre, en forme d’arche, rappelle les combats de la libération de l’île durant la Seconde Guerre mondiale.
Dans un rayon de 35 km autour de Diégo-Suarez, 1 664 autres tombes de militaires ont été aménagées dans les cimetières du Cap Diégo (1411 tombes), Anjianema (157), Joffreville (51) et Sakaramy (25). Un projet de regroupement des sépultures françaises de la région en un seul site est en cours d’étude.
Le Consulat Général de France à Diégo-Suarez assure la gestion et l’entretien du site grâce à la dotation budgétaire annuelle octroyée par le ministère de la Défense.
Autres cimetières et carrés militaires sur l’île
Avant toute chose, il convient de saluer le travail remarquable de l’ambassade de France à Madagascar, celui du Souvenir Français (dirigé par le commandant (CR) Patrick Deleplanque), celui des élèves du lycée français de Tananarive (en particulier la classe STG1), celui de nombreuses associations patriotiques, d’anciens militaires et bien entendu du détachement de la Légion étrangère de Mayotte (liste non exhaustive).
Les principaux autres sites à Madagascar sont les suivants (là-encore, liste non exhaustive) :
- Ambalavao : un monument rappelle l’accident en 1947 de l’avion des militaires suivants : lieutenant-colonel Lequesne, capitaine d’aviation Guillot, sous-lieutenant (infanterie) de Tournadre, adjudant-chef d’aviation Gourcerol, sergent-chef d’aviation Allard, sergent-chef Katsia (seul le sergent Anizet survécut au crash).
- Ambato-Boeny : carré militaire qui rassemble, sans précision, une cinquantaine de tombes individuelles et un ossuaire. Monument commémoratif du 2e régiment de génie. Un monument avait été élevé à la mémoire des officiers, sous-officiers et sapeurs du 2e RG ayant participé aux opérations de 1895. Il a été détruit il y a quelques années par un camion et il n’en subsiste aucune trace.
- Ambodimadiro : tombes militaires identifiées à Ambodimadiro (au nord de Mandritsara, à mi-chemin entre Tananarive et Diego-Suarez). Le cimetière rassemble également 10 autres tombes sans indications nominatives concernant des tirailleurs malgaches.
- Ambohitra : Joffreville, actuelle Ambohitra, était une petite ville de garnison. Sur la route vers Diego-Suarez se situait le centre d’entraînement de la Légion étrangère, abandonné depuis 1973 pour le Centre d’entraînement à la forêt équatoriale, en Guyane. Les derniers occupants militaires français ont été les légionnaires du 3e R.E.I. qui entretenaient sur place cet ancien cimetière où reposaient leurs aînés du Bataillon de marche de la Légion qui avaient séjourné ici de 1901 à 1905.
- Ambositra : tombes militaires recensées dans le cimetière d’Ambositra, concernant notamment des légionnaires du IV/4e R.E.I.
- Andapa : le 30 mai 1958, un avion de transport de type Douglas C-47A qui effectuait une liaison s’écrase à 25 km d’Andapa, à l’ouest de Sambava et Antalaha (au nord-est de Madagascar). Tout son équipage périt dans l’accident. Les quatre aviateurs sont inhumés dans le cimetière d’Andapa.
- Andriba : monument commémoratif, 13e R.I.Ma, 2e R.A.Ma et 38e R.A.C. A la sortie d’Andriba au bord de la route, au point kilométrique 224 (P.K.224), stèle élevée à la mémoire des officiers, sous-officiers, soldats et canonniers de ces régiments, morts pour la France en 1895.
- Anjiamena : cimetière militaire de Ramena qui rassemble 159 tombes, pour la plupart datant du début du siècle, mais très peu ont conservé leurs plaques nominatives (les autres n’ont plus). Longtemps laissé à l’abandon, l’endroit est maintenant entretenu, notamment, grâce aux efforts réguliers du Détachement de la Légion Étrangère à Mayotte (D.L.E.M.).
- Ankaboka : monument sans noms situé près de l’emplacement d’un important cimetière disparu de la conquête (1200 tombes dont il ne subsiste aucune trace).
- Anketsabe : le cimetière militaire d’Anketsabe, situé près du village de Sarodrano sur l’île de Nossi-Komba, au nord-ouest de Madagascar, rassemble une centaine de tombes de militaires décédés au cours de la seconde expédition de Madagascar en 1895.
- Antananarivo : dans le cimetière civil d’Ambohipo (commune de Tananarive), propriété de la mission catholique, sont enterrés environ 13 officiers et sous-officiers français dont seuls deux ont encore des sépultures identifiables.
- Betafo : tombes militaires identifiées recensées dans le cimetière militaire de Betafo, commune située au centre de Madagascar, à l’ouest d’Antsirabe.
- Hell-Ville : stèle commémorative installée dans le cimetière de Hell-Ville, sur l’île de Nosy-Be (au nord-ouest de Madagascar). Texte porté sur le monument : « A l’officier qui sut vivre et mourrir digne son nom, Pierre Jean BART, lieutenant de vaisseau du Roi, commandant de la corvette Sarcelle, mort en servant son pays le 3 juin 1843 – [érigé par la] Division navale de Madagascar et les Français de Nosy-Be en septembre 1846 ».
- Maevatanana : quinze tombes de militaires français se trouvent dans le cimetière communal de Maevatanana
- Mahatsinjo : monument commémoratif du 1er R.C.A. Il s’agit d’un village situé sur l’axe Tananarive-Majunga. Le monument a été érigé sous le commandement du Gouverneur général Léon Cayla et du général Roucaud, commandant supérieur des troupes à Madagascar, avec l’aide du Souvenir Français. « Aux officiers, sous-officiers, brigadiers et cavaliers du 10e escadron du 1er Chasseurs d’Afrique morts pour la France en 1895 ».
- Majunga : monument aux soldats de l’expédition de 1895 morts pour la France. Bâti sous Gallieni à côté du cimetière de la ville (Route Corniche) devient aussi ensuite celui des soldats morts durant la Grande guerre.
- Marovoay : à proximité de la Poste se trouve un ossuaire surmonté d´inscriptions française et malgache – « Morts pour la Patrie » – « 1896-1945 » – La porte est ornée de l’ancre des troupes coloniales – Aucun nom n’est enregistré, mais près de 1.400 militaires reposaient dans deux grands cimetières à Marovoay et il n’en subsiste plus aucune trace.
- Sakaramy : petit cimetière où une vingtaine de tombes sont identifiées, les autres n’ont plus d’indications nominatives.
- Vohemar : tombes militaires répertoriées à Vohemar, commune côtière située au nord-est de Madagascar. Sur six tombes, seules deux sont nominatives (dont une collective rassemblant trois militaires).
En Macédoine
Qui se souvient que des soldats français ont fait la Première Guerre mondiale dans les Balkans, et que celle-ci a d’ailleurs duré jusqu’en 1919 ?
A la fin de l’année 1914, la situation semble inextricable. Après les offensives et les longs mouvements de conquête et de retraite de l’automne, les Alliés, comme les armées des Empires centraux, se sont enterrés dans des tranchées. Au cours de cette première année de guerre les pertes sont déjà phénoménales. L’Autriche a vu mourir plus de 500 000 de ses soldats.
Winston Churchill, alors Premier lord de l’Amirauté (ministre de la Marine britannique), défend l’idée de l’ouverture d’un second front en Europe, et du côté des Balkans. Dans un triple objectif : ravitailler l’Armée russe via la mer Noire ; contourner les Empires centraux ; occuper Constantinople, capitale d’un Empire ottoman, considéré comme le « grand malade » du continent et par ailleurs allié de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie.
La Macédoine, indépendante depuis 1991 avec l’éclatement de la fédération yougoslave, a sur son sol deux cimetières militaires français principaux (il existe çà et là, dans des villages, des monuments à la mémoire de soldats français tombés en ces lieux).
Le cimetière militaire de Skopje (Uskub).
Skopje est la capitale de la République de Macédoine. 700 000 personnes y habitent, c’est-à-dire environ un tiers de la population totale de ce pays de 25 713 km². Au cœur de la vallée du Vardar, qui se jette dans la mer Egée, Skopje est située à mi-chemin entre Athènes et Belgrade.
Il y a quelques années, une mission du Sénat français s’est déplacée en République de Macédoine afin de contrôler l’état du cimetière de Skopje et de Bitola. Sur Skopje, il était ainsi remarqué : « Le cimetière est installé sur un coteau. Il est arboré et parsemé de rosiers et de buis entre les tombes. Le monument aux morts, édifié sur la hauteur, domine vers l’autre versant le fleuve Vardar qui arrose la capitale. Un obélisque, à la mémoire des inconnus morts pour la France, y est érigé sur l’un des deux ossuaires. Le petit musée, contenant des souvenirs du front d’Orient et des commémorations et visites à la nécropole, a été restauré par les militaires. Dans son ensemble la nécropole est bien entretenue ».
Chaque année, au 11 novembre, des cérémonies sont organisées par l’Ambassade de France. Le cimetière militaire de Skopje contient les restes de 960 officiers, sous-officiers et soldats de l’Armée d’Orient, ainsi que deux ossuaires, regroupant chacun environ 5 000 corps.
Le cimetière militaire de Bitola (Monastir).
Bitola est une ville du sud-ouest de la Macédoine, à environ 15 kilomètres de la frontière grecque. Peuplée de plus de 100 000 personnes, Bitola est un important centre administratif, industriel et commercial. Deuxième ville du pays derrière Skopje, Bitola est connue pour son université. Située dans la plaine de Pélagonie, Bitola est sur la route qui mène de la mer Egée au cœur de l’Europe centrale.
Le cimetière militaire français de Bitola regroupe les restes de 6 262 corps et deux ossuaires contenant 5000 corps chacun. Un vaste monument est situé au centre du cimetière, sur lequel est inscrit : « A la gloire de l’Armée d’Orient ». Des soldats, sous-officiers et officiers des unités suivantes se trouvent parmi les sépultures : 17e division d’infanterie coloniale (DIC) avec la 33e brigade d’infanterie coloniale (BIC), et les régiments d’infanterie coloniale 54e et 56e RIC ; la 21e BIC avec le 35e et le 44e RIC.
En Asie, Rangoon
Il y a peu, le Délégué général du Souvenir Français pour la Chine et l’Asie, Monsieur Claude Jaeck, alors en mission professionnelle à Rangoon en Birmanie, découvrait avec étonnement la tombe d’un soldat français au beau milieu du cimetière militaire anglais de la ville.
Il s’agissait du caporal Philibert Methia, du 10e RICM, mort pour la France le 27 octobre 1945 (parcelle 2 – Rangée A – Tombe n°4). Pourquoi un Français là ?
L’offensive victorieuse de 1945 dans la région venait de deux fronts : au nord, les divisions chinoises et anglo-indiennes enfoncent les lignes japonaises en quelques semaines. Au centre du pays, les troupes alliées provenant d’Inde immobilisent à Mandalay de nombreuses divisions japonaises. Ils se battent avec une ardeur désespérée. Ils profitent de la situation pour détruire une grande partie des édifices religieux de la ville. Bientôt, à cours d’artillerie et de munitions, laissant des milliers de morts, ils se retirent vers l’est.
Une nouvelle fois avec l’appui de l’aviation américaine, Winston Churchill, Premier ministre britannique, ordonne à Lord Mountbatten d’envoyer des milliers de soldats à la reconquête de la capitale Rangoon. Des commandos, ceux de la Force 136 (principalement des Anglais, mais aussi plusieurs dizaines de Français), participent à cette offensive. Il s’agit d’être à Rangoon avant la mousson. Par ailleurs, le nationaliste Aung San change de camp et prend contact avec les alliés. Il s’agit maintenant de l’appuyer, après l’avoir combattu…
Au cours du mois d’avril 1945, les Japonais décident de quitter Rangoon. Il n’est que temps : les troupes alliées sont à 30 kilomètres de la ville. Le 2 mai, la mousson débute vraiment, rendant impossible toute manœuvre militaire d’importance.
Au total, plus de 144 000 Japonais trouvent la mort dans ces campagnes, soit deux fois plus que les Alliés. Ils sont enterrés dans de nombreux cimetières militaires, dont celui de Rangoon.
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