Les marchés financiers mondiaux traversent leur ajustement le plus douloureux depuis la crise financière mondiale.
S’adaptant à la perspective d’une hausse des taux d’intérêt américains, le rendement du Trésor à dix ans a brièvement atteint 4 % cette semaine, son plus haut niveau depuis 2010. Les marchés boursiers mondiaux se sont fortement vendus et les portefeuilles obligataires ont perdu 21 % cette année.
Le dollar écrase tous les arrivants. Le billet vert est en hausse de 5,5 % depuis la mi-août sur une base pondérée en fonction des échanges commerciaux, en partie parce que la FED relève ses taux, mais aussi parce qu’il joue le rôle de valeur refuge en période trouble.
En Europe, la crainte d’une pénurie d’énergie et une politique budgétaire imprudente pour le Royaume-Uni contribuent également à la dépréciation des devises face au dollar. Les économies endettées de la zone euro et plus globalement d’Europe semblent les plus fragiles depuis la crise de la dette souveraine il y a dix ans. La hausse des taux directeurs par la FED constitue une des raisons majeures de l’appréciation du dollar.
Des taux à près de 4,5 % d’ici la fin de l’année
La banque centrale américaine après avoir tergiversé sur la conduite à suivre face à la résurgence de l’inflation qui aux États-Unis est avant tout le produit des plans de relance engagés par les pouvoirs publics, a décidé d’attaquer plus durement le mal. La banque centrale américaine prévoit de relever le taux des fonds fédéraux à près de 4,5 % d’ici la fin de l’année, précisant qu’elle pourrait si nécessaire poursuivre ce mouvement en 2023.
Aux États-Unis, l’ensemble de la chaîne des taux est touché. Le coût des hypothèques sur 30 ans est de près de 7 %. Les rendements des obligations d’entreprises peuvent dépasser 9 %, ce qui a entraîné le tarissement des émissions de nouvelles dettes. L’augmentation des taux met sous tension la sphère financière américaine avec des pertes de valeur pour les anciennes obligations.
La chute des cours boursiers commence à se faire ressentir pour certains fonds. Le Nasdaq a perdu un tiers de sa valeur depuis le début de l’année.
Chine, Inde, Thaïlande, Singapour, Corée, Japon essaient de défendre leurs devises
L’appréciation du dollar a d’importantes conséquences en-dehors des États-Unis. Elle renchérit le prix des matières premières et de l’énergie pour les importateurs ainsi que le prix de nombreux produits agricoles. De nombreux États essaient de limiter la dépréciation de leur monnaie. La Chine a réagi en rendant plus difficile la vente à découvert du yuan qui, sur le marché offshore, a atteint un niveau record face au billet vert le 28 septembre. L’Inde, la Thaïlande et Singapour sont intervenus sur les marchés financiers pour soutenir leurs devises. Malgré tout, hors Chine, les réserves de change des marchés émergents ont chuté de plus de 200 milliards de dollars au cours de l’année écoulée, selon JPMorgan Chase.
Plusieurs banques centrales ont été contraintes de relever leurs taux pour défendre leur monnaie. En septembre, la Banque centrale suédoise a relevé d’un point ses taux directeurs mais cela n’a pas empêché la dépréciation de la couronne. La Banque centrale de Corée prête des réserves de devises au fonds de pension national afin qu’il achète moins de dollars sur le marché libre et ne fasse pas baisser la devise nationale.
Au Japon, le gouvernement est intervenu pour acheter du yen pour la première fois depuis plus de vingt ans. Ces achats sont rendus nécessaires par le fait que la banque centrale de ce pays maintient des taux d’intérêt bas.
Le dollar fort exporte l’inflation
La Banque centrale européenne en ayant un plan de relèvement décalé par rapport à celui de la FED accepte de fait la dépréciation de l’euro. Cette baisse renchérit les importations extra-européennes mais n’affecte pas le commerce international des États membres qui s’effectue pour les deux tiers en interne.
Un dollar fort, en effet, exporte le problème d’inflation intérieure de l’Amérique vers des économies plus faibles. Ces dernières peuvent être contraintes de soutenir leurs devises en augmentant leurs taux en ligne avec ceux de la FED, mais au prix d’une croissance plus faible.
Le Royaume-Uni qui ne bénéficie plus de la protection de l’Union européenne doit faire face à une baisse de sa monnaie sur fond de déficits publics et déficits courants élevés. Les marchés s’attendent maintenant à ce que la Banque d’Angleterre fixe les taux les plus élevés de toutes les grandes économies occidentales l’année prochaine. La hausse des taux pourrait provoquer une chute brutale de l’immobilier dans ce pays.
Aux États-Unis, l’augmentation des taux commence à se répercuter sur l’économie réelle avec un retournement du marché immobilier. Les annonces des prévisions de résultats en baisse de la part de FedEx et de Ford sont considérées comme deux indicateurs avancés.
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