Le livre « Le premier qui tombera » de Salomé Berlemont-Gilles, publié aux éditions Grasset, vient de remporter le prix littéraire Québec-France Marie-Claire Blais 2022.
Lesfrancais.press sont heureux de vous annoncer que c’est le roman « Le premier qui tombera » de Salomé Berlemont-Gilles qui a reçu le Prix littéraire Québec-France Marie-Claire-Blais 2022. Nous avions évoqué dans nos colonnes l’existence de ce prix qui récompense chaque année un premier roman. Une des spécificités du prix est qu’il possède une dimension participative : ce sont les lecteurs membres de l’association Québec France qui jugent et opèrent un choix. L’association se base donc sur un verdict populaire étendu car elle possède plusieurs dizaines de groupes locaux des deux côtés de l’Atlantique.
L’auteure, Salomé Berlemont-Gilles, a 30 ans et est diplômée de Sciences-Po Paris. Avec Le premier qui tombera, publié aux éditions Grasset, elle a réussi un premier texte fort.
Ce récit de fiction suit les pas de Hamadi, un jeune Guinéen de 11 ans qui fuit le régime de Sékou Touré et s’installe en banlieue parisienne avec ses parents et frères et sœurs. C’est d’abord un roman de l’immigration africaine et du déclassement vécu par cette famille bourgeoise dont le père est un médecin fasciné par la culture française et la promesse républicaine d’émancipation par l’école. La réalité de la vie banlieusarde de cette famille nombreuse qui s’entasse dans un appartement trop étroit se révélera prosaïque et rude. Le chef de famille qui n’arrive pas à retrouver un poste de médecin perd peu à peu son autorité, la mère est obligée de travailler comme caissière et toute la famille se retrouve déclassée. Mais c’est le parcours chaotique de Hamadi qui frappe le plus le lecteur, lui qui subit une véritable initiation au vol et à la violence au sein d’une bande devenue sa famille d’adoption. Le bon élève devient un décrocheur qui méprise le savoir scolaire et ne croit qu’à l’éducation de la rue. L’enfant renfrogné grandit et s’impose comme homme de main d’un proxénète. Sa vie oblique tristement et même l’amour ne peut le sauver d’un destin qui l’entraîne inexorablement vers la chute. Le parcours désenchanté de cet anti-héros dans une France qui manque à ses promesses est particulièrement réussi. Les scènes de violences urbaines, le projet brisé d’Hamadi de sauver une prostituée de son destin de travailleuse forcée comme les scènes de sexe crues sont habitées par un style vif et prenant. Ce roman de presque 300 pages est marqué par une belle densité et il y a peu de passages faibles dans un récit qui est tenu de bout en bout.
Nous avons interrogé Francine Bouchard, responsable du prix Québec-France sur les raisons du choix de ce livre.
Francine, comment s’est opéré le choix final ?
F.B : La compétition entre les trois finalistes de cette édition fut très relevée. « Le premier qui tombera » est un roman qui a été jugé à la fois sensible et empreint d’une grande poésie, il témoigne avec réalisme du choc culturel de l’immigration.
Le roman semble avoir une tonalité très sombre ?
F.B : Bien que l’auteure présente la triste réalité de l’exil et de la vie dans les banlieues, ce roman est lumineux par les valeurs qu’il met de l’avant. Il a chaviré les lecteurs par la richesse de ses personnages et son histoire percutante.
Comment qualifieriez vous le style de l’auteur ?
F.B : On est face à une écriture acérée qui entraîne le lecteur dans la chute sociale du personnage principal, nous sommes plongés dans une tension qui croît de chapitre en chapitre avec un final qui permet de reprendre son souffle. C’est un roman dur, violent mais ô combien instructif, écrit dans un style qui happe le lecteur dès l’amorce.
Il y a beaucoup de maturité pour une jeune auteur, non ?
F.B : C’est en effet un premier roman intense, émouvant, bouleversant, dérangeant d’une jeune auteure confrontée à un sujet difficile qui est traité dans un style qui permet d’entrer facilement dans l’univers des personnes déracinées.
L’auteure, Salomé Berlemont-Gilles, n’a pas répondu à nos questions malgré de multiples relances. Nous lui souhaitons néanmoins bonne chance pour la diffusion de ce roman auprès d’un large public. Le roman a reçu également le Prix Régine Deforges, le Prix de la Vocation et le Prix Version Femina.
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