Pas d'exemption de visa pour les Kosovars

Pas d'exemption de visa pour les Kosovars

Quatre ans après la recommandation de l’exécutif européen de supprimer l’obligation de visa pour les citoyens du Kosovo, la levée de cet obstacle administratif et financier semble toujours hors de portée, bien que la Commission affirme que le pays qui aspire à rejoindre l’UE a rempli sa part du contrat.

Malgré les efforts déployés par Prague pour parvenir à un accord avant la fin de son mandat de six mois à la présidence du Conseil de l’UE en décembre, les perspectives de progrès s’amenuisent pour Pristina à mesure que de nouvelles conditions apparaissent.

Plusieurs États membres de l’Union, dont la France, la Suède, la Belgique, les Pays-Bas et l’Espagne, ont freiné les efforts de la présidence tchèque visant à supprimer l’obligation de visa pour les citoyens du Kosovo, car ils exigeraient des garanties de sécurité supplémentaires.

Le Kosovo reste l’un des rares pays européens dont les citoyens ont encore besoin d’un visa pour entrer sur le territoire de l’Union européenne, que ce soit pour les loisirs, le travail ou l’éducation, et ce même si Pristina a rempli tous les critères requis depuis 2018 déjà.

Cela fait quatre années que la Commission ne cesse de recommander la libéralisation des visas mais rien n’y fait. La dernière impulsion de la présidence tchèque de l’UE n’a pas beaucoup fait bouger les lignes non plus.

« Je suis beaucoup plus optimiste qu’il y a un an », a confié le commissaire européen à l’Élargissement, Olivér Várhelyi, à EURACTIV mercredi (12 octobre) après avoir présenté le rapport annuel sur les progrès du pays en matière d’élargissement, confirmant que le Kosovo avait rempli toutes les conditions pour la libéralisation des visas et indiquant que l’exécutif européen attendrait les discussions techniques sur le sujet.

« Cela portera ses fruits à la fin de l’année, et nous aurons une décision », a-t-il ajouté.

Cependant, cette mesure requiert une approbation unanime des 27 États membres de l’UE.

Cette unanimité sera difficile à atteindre car, outre ceux qui s’opposent à la suppression des visas, cinq États membres du bloc — à savoir la Grèce, Chypre, l’Espagne, la Roumanie et la Slovaquie — ne reconnaissent pas l’indépendance du Kosovo.

Attendre ETIAS

Lors d’une réunion technique du Conseil jeudi (13 octobre), les représentants de la France, qui a bloqué à plusieurs reprises une décision sur la question des visas, ont semblé ajouter un nouveau critère à la liste toujours plus longue des attentes, en demandant instamment que la libéralisation des visas pour le Kosovo soit liée au fonctionnement du système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages (ETIAS).

Ce système électronique permet de vérifier les données des ressortissants de pays tiers qui n’ont pas besoin de visa pour entrer dans l’espace Schengen. Il exige de chaque demandeur qu’il communique son nom, son adresse électronique, sa date de naissance, son passeport et qu’il effectue un paiement au moyen d’une carte de débit ou de crédit. La demande est ensuite examinée, et les autorités décident si la personne peut entrer dans l’espace Schengen ou non.

Actuellement, le système est hors ligne, mais il devrait être en ligne en 2023, sans qu’aucune date précise n’ait été annoncée pour l’instant.

C’est la première fois que le système ETIAS est évoqué dans les discussions sur la libéralisation des visas, bien que le Kosovo soit prêt depuis quatre ans, conformément aux engagements pris lors du sommet entre l’UE et les Balkans occidentaux en juin.

La proposition présentée a été soutenue par des responsables de Madrid, Stockholm, Bruxelles, La Haye et, selon certaines sources, Copenhague.

Contacté par EURACTIV pour savoir ce qu’il pensait de la libéralisation des visas au Kosovo, le ministère français des Affaires étrangères s’est refusé à tout commentaire.

Une notification tardive

Convaincre les États membres les plus réticents d’ici la fin de la présidence tchèque en décembre ne sera pas une tâche aisée, comme l’a clairement indiqué le groupe de travail sur les visas du Conseil de l’UE jeudi.

« Le groupe de travail s’est largement félicité de la réouverture des discussions sur le sujet et a généralement soutenu le processus de libéralisation des visas. Afin de progresser dans ce dossier, il sera nécessaire de clarifier un certain nombre de sujets connexes et de poursuivre la discussion », a indiqué la présidence tchèque dans une déclaration.

Ce dernier revers a probablement surpris la République tchèque, car des sources du ministère des Affaires étrangères ont indiqué que les Tchèques étaient « quelque peu optimistes » avant la réunion de jeudi.

Même si un accord peut être conclu au sein du groupe de travail, les processus au sein du Conseil et les autres négociations interinstitutionnelles signifieront probablement que le Kosovo n’obtiendra pas le feu vert avant la fin de la présidence tchèque, a expliqué à EURACTIV République tchèque Iva Merheim-Eyre, analyste à l’Association For International Affairs.

Les difficultés liées à l’élargissement

Le dernier accroc en date pour le Kosovo intervient alors qu’une frustration croissante dans la région en raison de la lenteur du processus d’élargissement de l’UE, voire du manque d’élargissement tout court.

Lorsqu’ils ont élargi le processus à l’Ukraine et à la Moldavie en leur accordant le statut de candidat à l’adhésion au bloc cet été, les responsables de l’Union ont également promis d’accélérer la procédure pour leurs homologues mécontents des Balkans occidentaux, certains négociant leur adhésion depuis plus de dix ans déjà.

Une étape mineure a été franchie mercredi, lorsque l’exécutif européen a recommandé aux États membres d’accorder le statut de candidat à la Bosnie-Herzégovine.

Cependant, les responsables politiques et les analystes soulignent que la Commission européenne ne répond pas aux attentes dans la région, et que ses rapports annuels sur le processus sont devenus « très peu pertinents ».

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