Papier, stylo, dictée ! 

Papier, stylo, dictée ! 

Pour la première fois, l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE) s’est associée à l’Association des élus de France pour l’organisation de la « dictée géante des élus », ouvrant ainsi aux conseillers des Français de l’étranger la possibilité de participer à cet exercice. 

Au Sénat et en visio

C’est au Sénat que s’est tenue cette dictée avec un accès en visioconférence pour les élus de l’étranger. Et même si la connexion s’est avérée compliquée et la correction de la dictée à distance un peu chaotique, les élus des Français de l’étranger ont apprécié ce moment d’échange et l’amusement procuré par la dictée. 

Noémie Green, conseillère des Français de l’étranger en Suède, « salue l’initiative de rassembler les élus du monde entier autour de l’amour de notre langue française », Annie Michel, élue des Français à New York, s’est inscrite « par jeu et grand intérêt pour notre belle langue française », enthousiasme partagé par Mélanie Montinard, conseillère des Français au Brésil, qui « adore les dictées » et qui apprécie aussi la démarche d’associer les représentants des Français de l’étranger à cette dictée, « c’est un message pour nous dire que nous sommes des élus à part entière ».   

Les élus réunis au Sénat pour la dictée ©LFP/Jérémy Michel

Défendre la francophonie

Plutôt doué pour l’orthographe, David Franck, élu pour les Français d’Ukraine, s’est inscrit pour « montrer l’attachement aux mots même avec la vie pleine de maux » et pour qui « défendre sa langue reste un impératif, surtout en ce moment en Ukraine ». Quant à Jean-Baka Domelevo Entfellner, représentant les Français du Kenya-Ouganda-Burundi-Randa-Tanzanie-Zambie-Zimbabwe, il tient à garder son « agilité avec la langue française », lui qui vit dans un milieu anglophone depuis plus de 10 ans. 

La plupart de nos élus français de l’étranger inscrits ont tous reçu une mention plus qu’honorable, allant de deux à quatre fautes, alors même que les mots « Hippopotomonstrosesquippedaliophobie », « Arachibutyrophobie » et « Tyrosémiophilie » ont été glissés par les organisateurs pour complexifier un peu plus le texte de Léopold Sédar Senghor « la francophonie comme culture » choisi pour la dictée.

La francophonie, c’est aussi ce qui a motivé nos élus à participer à cette dictée 

Mélanie Montinard, grâce à son expérience de Française à l’étranger, trouve que « la francophonie est beaucoup plus coloriée, beaucoup plus diverse que l’image que l’on se fait en France, chacun vit sa propre francophonie ». « La langue française est aussi un point de rencontre » ajoute Mélanie, c’est aussi ce que met en avant Noémie Green : « cela crée du lien, et même si parfois la langue française est difficile à expliquer, c’est stimulant de l’enseigner et de faire partie de la grande famille de la francophonie. »

Ne pas avoir peur de l’orthographe

Annie Michel enseigne la langue française et a réussi à « appréhender (mes) peurs sur l’orthographe » et prépare ses élèves à l’examen de l’Advanced Placement aux Etats-Unis tout en faisant la promotion de la francophonie : « une langue commune permet la compréhension mutuelle et la conscience d’une histoire, d’où potentiellement une solidarité au sein du groupe dont les membres sont unis par cette langue ». 

©LFP/Jérémy Michel

Agnès Firmin-Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, marraine de l’édition 2023, prend aussi le même chemin, celui de la conscience d’un groupe uni autour d’une même langue, citant notamment Albert Camus qui écrivait : « Ma patrie, c’est la langue française ». 

Promouvoir la francophonie c’est aussi comme Jean-Baka Domelevo Entfellner nous le partage « écrire correctement à chaque fois que je m’exprime par écrit ». C’est le même souhait que j’ai à la rédaction de cet article. Et si quelques coquilles se glissent dans ces lignes, David Franck nous alertera sans doute, lui qui « s’amuse (ou s’exaspère) de relever autant de fautes dans les bandeaux des chaînes d’info, ou dans les liaisons impropres que peuvent faire les journalistes ». 

5 interviews d’élu(e)s ayant participé à la dictée

Mélanie Montinard, Conseillère des Français de l’étranger, Brésil 

Pourquoi s’être inscrite à cette dictée ?

Pour le défi et j’ai toujours adoré les dictées quand j’étais à l’école.

Êtes-vous douée en orthographe ?

Cela va ensemble, quand on aime bien, on est souvent douée, et inversement 

La défense de la langue française, et plus généralement de la francophonie, est-ce quelque chose qui vous tient à cœur ?

La défense de la langue française et de la francophonie me tient à cœur. En tant que Française à l’étranger depuis 1998 je me suis rendu compte que la francophonie est beaucoup plus coloriée, beaucoup plus diverse que notre nombrilisme à la française.  Mon mari est tahitien, je travaille beaucoup avec les migrants d’Amérique latine (sénégalais, marocains, congolais…) et chacun vit sa francophonie. C’est aussi le point de rencontre à l’étranger. Les Français sont difficiles à fédérer, et utiliser la langue française est un outil de réunion, de rassemblement.  La francophonie ce n’est pas seulement la France, ni le Canada, la Belgique ou le Liban ou la Suisse. La Francophonie c’est aussi le Congo, Le Sénégal, la Maroc, et je souhaite que les consulats français associent aussi ces partenaires pour les actions de soutien à la francophonie.

 Combien de fautes à la dictée des élus ?

4 fautes 


Jean-Baka Domelevo Entfellner, Conseiller des Français de l’étranger, Kenya, Ouganda, Burundi, Rwanda, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe

Pourquoi s’être inscrit à cette dictée ?

J’aime bien la langue française, et aussi les dictées ! Je suis un gamin de la radio (jamais eu la télé chez moi pendant mon enfance), et donc un grand auditeur des chaînes de radio, particulièrement des chaînes publiques françaises : France Inter pendant mon enfance, et maintenant plutôt France Culture, et RFI. Du coup, j’ai eu l’occasion de participer assez récemment aux dictées de Rachid Santaki qui passaient sur France Culture le week-end en soirée. Je les faisais toujours avec grand plaisir chez moi, sur le premier bout de papier qui me tombait sous la main à l’heure où commençait la dictée.

Êtes-vous doué en orthographe ?

Généralement plutôt bon en orthographe, oui, mais c’est lors des dictées qu’on se rend compte qu’il y a encore énormément de mots qu’on ne sait pas bien orthographier, et puis plein de mots qu’on n’a plus utilisés depuis des décennies, surtout quand comme moi on vit en environnement anglophone depuis des années (5 ans en Afrique du Sud puis 6 ans au Kenya). On perd petit à petit un peu de son agilité avec les mots de la langue française. C’est relatif, bien sûr, et ça s’entretient en lisant en français.

La défense de la langue française, et plus généralement de la francophonie, est-ce quelque chose qui vous tient à cœur ?

Oui, c’est évidemment important ; c’est quelque chose que je porte par mon amour de la langue et qui fait l’importance du parler français dans le monde : le français est une langue avec laquelle on évolue dans toute l’Afrique francophone, par exemple, mais aussi une langue officielle des Nations Unies, etc. En tant qu’élu des Français de l’étranger, je prête attention à la vie de nos établissements d’enseignement français, au Kenya et dans les autres pays de ma circonscription. Chez nous, les établissements d’enseignement français ont souvent une minorité d’enfants de familles françaises, ces établissements participent donc beaucoup du mouvement d’extension de la sphère de la francophonie.

 Combien de fautes à la dictée des élus ?

A priori 1 faute, mais j’ai un doute sur «hippopotomonstrosesquipédaliophobie», je pense que je l’ai finalement bien orthographié. 


Noémie Green, Conseillère des Français de l’étranger, Suède

Pourquoi s’être inscrite à cette dictée ?

Cette dictée est un exercice ludique qui crée du lien et qui présente également de nombreuses vertus. On y découvre des textes, on se penche sur l’étymologie de mots jamais rencontrés auparavant pour en comprendre le sens. En prenant le temps de réfléchir, de s’appliquer à bien écrire le français, on célèbre la langue. L’exercice ne peut être qu’enrichissant.

Êtes-vous douée en orthographe ?

Oui, enfin je crois. J’ai fait une prépa littéraire et je suis professeur de français donc j’espère l’être.

La défense de la langue française, et plus généralement de la francophonie, est-ce quelque chose qui vous tient à cœur ?

Oui, la défense de la langue française me tient particulièrement à cœur. J’aime l’enseigner et la faire découvrir. Je suis très heureuse de faire partie de la grande famille de la francophonie et j’en suis une fervente défenseuse. J’ai créé ma propre école de langue, 123 Voilà, il y a dix ans maintenant. Nous donnons des cours de français aux tout-petits comme aux grands et organisons des événements francophones.

 Combien de fautes à la dictée des élus ?

Je pense avoir fait 5 fautes


David Franck, Conseiller des Français de l’étranger, Ukraine 

Pourquoi s’être inscrit à cette dictée ?

Je me suis inscrit à cette dictée pour montrer l’attachement aux mots, même avec la vie pleine de maux. Aujourd’hui, nous écrivons sur les portables avec des abréviations, des sons… les mots ont un sens, même s’ils ont le même son.

Êtes-vous doué en orthographe ?

Généralement, je suis doué en orthographe et je reprends tous mes amis quand ils font des erreurs. Je m’amuse (ou m’exaspère) de relever autant de fautes dans les bandeaux des chaînes d’info, ou dans les liaisons impropres que peuvent faire les journalistes. 

La défense de la langue française, et plus généralement de la francophonie, est-ce quelque chose qui vous tient à cœur ?

Bien entendu, défendre sa langue reste un impératif, surtout en Ukraine. Notez qu’en Ukraine, après la première phase de la guerre, une des premières mesures du gouvernement a été de supprimer la langue russe comme langue officielle. Le « plan de paix » des Russes envoyé ces derniers jours aux Ukrainiens inclut le rétablissement du russe comme langue officielle en Ukraine…  Les langues sont essentielles dans une société pour se reconnaître et/ou se différencier. Un Français reconnaît d’ailleurs instantanément un Canadien ou un Belge quand il emploie certains termes. 

 Combien de fautes à la dictée des élus ?

Au moins 2.


Annie Michel, Conseillère des Français de l’étranger, Etats-Unis (New-York)

Pourquoi s’être inscrite à cette dictée ?

C’est une inscription par curiosité, par jeu et grand intérêt pour notre belle langue française que j’ai enseignée de 1971 à 2022. Je pense qu’une dictée est une tradition pédagogique incontournable !

Êtes-vous douée en orthographe ?

Maintenant, je le pense (!). Petite, j’ai expérimenté, en CP, la méthode globale : une catastrophe pour moi, j’ai dû faire de gros efforts pour combattre cette crainte devant cet exercice présenté par des enseignants, qui à l’époque, et dans mon école, punissaient au lieu d’encourager, chaque fois, j’éprouvais une grande peur devant les dictées et, en grandissant, je me suis ressaisie et me suis améliorée en orthographe. 

La défense de la langue française, et plus généralement de la francophonie, est-ce quelque chose qui vous tient à cœur ?

Oui, bien entendu puisque je suis professeure certifiée de lettres par amour de la langue française. Toutefois, vivant aux États-Unis depuis plus de 30 ans, le mot francophonie a pris un sens très fort, notamment en enseignant la littérature et la culture francophones, en préparant l’examen Advanced Placement à l’université (AP French Language and Culture) ces six dernières années dans un lycée américain. On dira donc qu’une langue commune permet la compréhension mutuelle et la conscience d’une histoire, d’où potentiellement une solidarité au sein du groupe dont les membres sont unis par cette langue, c’est ainsi que la francophonie unit les francophones.

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