Les Français qui vivent à Londres savent que leur ville d’adoption est l’une des scènes musicales les plus vibrantes, les plus créatives, les plus accessibles de la planète. Toute la semaine, été comme hiver, deux à trois groupes se produisent chaque soir dans les pubs et autres innombrables petites salles de concert. « Les Londoniens adorent découvrir de nouveaux musiciens, du coup, ici, on n’a pas besoin d’être super établi pour avoir accès à une scène ». C’est du moins ce que déclare, peut-être un peu trop modeste, une artiste française de 24 ans qui s’est fait connaître ces derniers mois sous le nom de Modern Liv.
Si c’est particulièrement dense dans le Nord-Est de la ville (dans le quartier de Shoreditch il y en a tous les 50 mètres), c’est vrai de toute la ville. Beaucoup de bars proposent des sessions d’open mic où chacun peut s’inscrire et tenter sa chance.
Écoutez sa chanson
Franco-canadienne
C’est toujours émouvant, après coup, de se faire raconter Une Etoile est née. C’est encore plus intéressant d’être là au moment du Big Bang.
Olivia, aka Liv, née à Paris d’une mère française et d’un père canadien (d’où son anglais parfait) est installée depuis 5 ans en Angleterre, où elle est allée à l’université.
Avec sa voix de miel au long registre velouté, à la fois pleine et claire, elle y a tenu le pupitre de lead singer dans un orchestre de jazz et un groupe de rock. Comme pour tous les musiciens, son amour pour la musique a commencé dès l’enfance. Elle se rappelle le pianiste qui accompagnait son cours de danse. Et aussi le double blanc des Beatles ouvert pour elle par son grand frère. Elle a appris la guitare classique et la bossa nova, elle a chanté dans des comédies musicales.
L’amour de la scène
L’expérience de la scène, elle l’a eue très tôt, d’abord comme petite danseuse classique, puis dans les cours de théâtre au lycée où elle a appris à regarder la salle, à se mettre en tête ce que le public voit, établir une connexion. On sent cette générosité pendant ses concerts : elle arrive, elle allume sa présence de scène et toute son énergie vient vers nous, nous faisant partager le sentiment qui lui a inspiré sa chanson au moment où elle l’a écrite.
Avec des dizaines de performances sur des scènes minuscules, dans des pubs ou à des fêtes, elle a compris l’essentiel : Il faut mériter le silence.
Les gens viennent pour prendre un verre, écouter de la musique, se rencontrer entre amis. Alors quand ils se taisent pour t’écouter, c’est qu’ils passent vraiment un bon moment avec toi. Ce qui compte, c’est de mettre en valeur l’expérience du public.
C’est ce qu’elle cherche : déclencher un sentiment, produire sur le public ce que la musique produit sur elle.
Indie-rock
Ses compositions personnelles sont plutôt indie-rock, toujours mâtinées de Jazz. Elle écoute d’ailleurs de tout, mais surtout du rock des années 60-70 avec une base de guitare blues, mais aussi beaucoup de chanteuses contemporaines qui s’inspirent du Jazz.
Son nom de scène, Modern Liv, est un hommage à la chanson de Bowie, Modern Love, sa chanson préférée entre toutes, « pour les paroles ». Car Modern Liv est aussi poète, elle a d’ailleurs gagné un prix de poésie. Son écriture poétique retrouve la veine canadienne d’une Joni Mitchell, d’un Léonard Cohen, où le flux de mots, y compris dans le refrain, varie au fur et à mesure que la chanson se déroule.
« Ce qui me plaît ce n’est pas de caler trois couplets et un refrain, mais de créer des images, de capturer des moments en une ou deux chansons. »
Pour pouvoir organiser sa vie autour de la musique, elle met à profit son bilinguisme et travaille comme traductrice, et aussi dans un cabinet médical, comme réceptionniste. Ainsi elle se paie ses cours de chants et les studios qu’elle loue pour enregistrer ses chansons. La première est sortie le 24 novembre, sous le titre Together Tonight.
Est-ce qu’elle est anxieuse de la réception du public ? Non. Ambitieuse, oui. Et travailleuse : elle est déjà en train de produire le deuxième titre.
« En même temps, il ne faut pas prendre tout ça trop au sérieux, dit-elle au moment de nous quitter. La musique, ce n’est pas pour se prendre au sérieux, c’est pour se sentir vivant. »
