Manifestations à Hong Kong: des tensions toujours vives

Hong-Kong traverse depuis plusieurs mois la crise politique la plus importante depuis sa rétrocession par les Britanniques en 1997.

Rédigé avec l’AFP, par Catya Martin, Conseillère Consulaire élue à Hong-Kong et Rédactrice en chef du site Trait D’Union

 

La révolte des parapluies de 2014

Dès 2014, le mouvement « la révolte des parapluies » annonçait une amorce d’envie de démocratie au sein de la jeunesse hongkongaise. Deux mois d’occupation de Hong-Kong sans obtenir la moindre concession de Pékin. Puis le calme est revenu sur l’ancienne colonie britannique jusque ce mois de février 2019 où les autorités hongkongaises, menées par la Cheffe de l’exécutive, Carrie Lam, décident de faire passer au vote la modification de la loi sur les extraditions vers la Chine. Dès le mois de mars, les milieux économiques font pression sur la Cheffe de l’exécutif qui décide de réduire la liste des motifs d’extradition.

Réaction vive et inattendue de la population

Très rapidement, et sans aucun signe avant coureur, la population réagit vivement et s’oppose à cette proposition qui ne devait être qu’une formalité.

La première manifestation aura lieu le 28 avril. Le gouvernement décide alors de limiter la possibilité d’extradition aux personnes qui encourent sept ans de prison et promet des garanties sur les procès.

1 million de personnes dans les rues lors de la commémoration de Tiananmen

Le 4 juin la commémoration des 30 ans de la sanglante répression de la place Tiananmen est prise en symbole et dès le 9 juin ce sont plus d’un million de personnes qui défilent dans les rues de Hong-Kong.

La crainte de voir remis en cause le statut un pays, deux systèmes est alors mise en avant et des manifestations de masse s’organisent.

Suspension du projet de loi et escalade des deux camps

Les internautes ont signalé la présence massive de troupes chinoises à la frontière avec Hong Kong

Le 15 juin, Carrie Lam annonce la suspension du projet de loi, là où les opposants demandaient son abandon définitif. Dès le lendemain, 2 millions de personnes sont dans les rues pour demander la démission de la Cheffe de l’exécutif, (le territoire compte 7 millions d’habitants).

L’escalade commence et les deux camps se radicalisent. Hors de question pour la cheffe de l’exécutif hongkongais de céder aux demandes des manifestants. « Nous irons jusqu’au bout pour défendre nos libertés », expliquent de leur côté les opposants.

Près de 80 blessés suite aux affrontements avec la police, une première à Hong-Kong. Le monde entier regarde l’ancienne colonie britannique et réagit.

La communauté internationale réagit, tout comme Pékin

L’Union européenne demande le « respect » des droits des manifestants. Le Royaume-Uni juge « vital » que le projet de loi n’empiète pas sur l’accord de rétrocession (l’ex-colonie pour cinquante ans à partir de 1997, d’un système de gouvernance distinct de celui de la Chine continentale, en vertu du principe un pays, deux systèmes).

De son côté, Pékin « condamne fermement » les « émeutes » et « soutient la réaction » des autorités de Hong Kong, dénonçant « l’ingérence » de l’Union européenne.

Les affrontements continuent avec l’invasion du parlement local (le LegCo), le 1er juillet, date anniversaire (22ème) de la rétrocession à la Chine de Hong-Kong par les Britanniques. Il faudra plusieurs heures à la police pour reprendre le contrôle du bâtiment.

La mafia locale suspectée de peser sur le conflit

Des soupçons pèsent fortement sur la mafia locale, lorsque le 21 juillet, des manifestants sont violemment agressés dans le nord du territoire par des hommes suspectés d’appartenir aux triades.

De là, les heurts entre la police et les jeunes manifestants deviennent quotidiens, et ce, malgré les nombreuses arrestations.

Le 5 août dernier, une grève générale paralyse le territoire (des transports en commun et liaisons aériennes fortement perturbées, magasins fermés …).

« Ceux qui jouent avec le feu périront pas le feu »

La réaction de Pékin est immédiate : « Ceux qui jouent avec le feu périront pas le feu ».

Carrie Lam, Cheffe de l’exécutif

L’économie locale est directement touchée. Les hôtels voient le taux d’occupation de leurs chambres chuter de moitié, le secteur du tourisme étant le premier touché. Carrie Lam n’hésite pas à accuser directement les manifestants pro-démocratie de mettre en danger l’économie du territoire.

«la reprise économique prendra très longtemps » Carrie Lam

Lors de sa conférence de presse, la Cheffe de l’exécutif a déclaré que « les conséquences pourraient être pires que celles de l’épidémie du SRAS (Syndrome respiratoire aigu sévère) en 2003 et de la crise financière de 2008 », et «la reprise économique prendra très longtemps ».

« Ce qui se produit à Hong-Kong  ces derniers mois place l’économie et la population locale dans une situation préoccupante, voire dangereuse », a averti Edward Yau, secrétaire d’Etat au commerce et au développement économique de Hong-Kong.

Paralysie de l’aéroport international

Le week-end du 10 aout, c’est l’aéroport international de Hong-Kong qui est pris d’assaut par des milliers de manifestants qui décident d’y organiser un sit-in qui se veut pacifiste « afin de sensibiliser les voyageurs à leur cause », explique les manifestants. Cette mobilisation s’est prolongée lundi et mardi entrainant une annulation des vols au départ de Hong-Kong.

L’aéroport de Hong Kong paralysé à plusieurs reprises

Suite aux affrontements de plus en plus violent avec la police, les réactions s’enchaînent. La Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Michelle Bachelet dit être « préoccupée par la répression des manifestants » et réclame de son côté « une enquête sur le comportement de la police ».

Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, appelle Pékin à « être prudent ».

Le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, appelle dans un communiqué diffusé le 14 aout, « toutes les parties, en particulier les autorités hongkongaises, à renouer le fil du dialogue afin de trouver une issue pacifique à cette crise et de mettre fin à l’escalade de la violence ».

Une guerre des images est lancée par Pékin avec le déploiement de militaires et de chars aux portes du territoire autonome, dans la ville de Shenzhen. Cette pression ne change en rien la volonté des manifestants pro-démocratie, bien décidé à « résister » jusqu’au bout.

Catya Martin, rédactrice en chef du magazine

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