L’Inde, la démocratie gagne, le nationalisme aussi.

Un mois de scrutin. Neuf cent millions d’électeurs. Une campagne vive, mais sans morts. Le Premier ministre Narendra Modi, député de Benares, chantre du nationalisme hindou, espère une deuxième victoire. Il a passé la nuit du vote en méditation pour apparaitre sur fond d’Himalaya en robe de brahmane, devant les journalistes. Alors que 15% de la population indienne est musulmane, certains candidats du BJP, le parti du Premier ministre, n’hésite pas à qualifier l’islam de « virus ». Identité Hindoue contre Islam, Inde contre Pakistan, Modi  a axé sa campagne sur l’identité indienne, forgée depuis l’indépendance de l’Inde en 1948 par la partition du pays, qui fit quelques millions de déplacés entre Pakistan, Inde et Bengladesh, et de nombreux massacres qui se sont comptés en centaines de milliers de morts.

L’Inde est une démocratie depuis cette indépendance. Longtemps gouvernée par l’historique Parti du Congrès, et la dynastie Nehru-Gandhi, elle est passé du coté du nationalisme hindou avec Modi, d’origine modeste et devenu le chef charismatique de son parti.

L’inde comprend 29 Etats. Chaque Etat a son Parlement, mais envoie un nombre de députés proportionnel à sa population au Parlement fédéral. La majorité détermine le choix du Premier ministre. Les élections sont organisées dans toutes les provinces sous le contrôle de la police fédérale et d’une commission indépendante. Comme le mode d’élection est le scrutin uninominal à un tour, comme en Angleterre, les vagues électorales sont amplifiées, ce qui avait permis à Modi d’emporter la majorité absolue.

Le rival de Narendra Modi au poste de Premier ministre est le leader du Parti du Congrès, Rahul Gandhi, fils de Rajiv et Sonia Gandhi, petit fils d’Indira Gandhi, elle-même fille de Nehru, le premier Premier ministre de l’Inde. Le Parti du Congrès, avec cette famille, a dirigé l’Inde pendant cinquante ans, il espère former une coalition avec des partis régionaux pour reprendre le pouvoir. Le Parti du Congrès se veut plutôt socialiste et laïc. Il propose un salaire minimum à 6000 roupies (environ 87$). Le BJP, lui, est nationaliste, et populiste. Cependant, les candidats du Congrès se présentent aussi comme de pieux hindous et apparaissent comme plus bourgeois que le BJP. Modi a agité la ferveur nationaliste par des tensions et des frappes militaires contre le Pakistan. Même s’il n’a pas créé autant d’emplois que promis, l’Inde est sur la voie d’une vraie croissance économique, plus égalitaire -dans un pays aux inégalités phénoménales- et solide.

L’Inde est six fois plus grande que la France, vingt fois plus peuplée. Elle devrait devenir le pays le plus peuplé au monde dans quelques années, devant la Chine. Economiquement aussi, l’Inde devient une grande puissance, avec un taux de croissance qui dépasse 6%. Un tiers de la population reste sous le seuil de pauvreté. La moitié de la population a moins de 25 ans.

Outre son grand rival identitaire pakistanais, l’Inde est toujours en rivalité avec la Chine. Elle passe pour l’instant entre les gouttes de la guerre commerciale actuelle entre la Chine et les Etats-Unis, même si elle affiche elle aussi un fort excédent commercial avec les Etats-Unis. Mais Trump avait aussi souhaité mettre fin au système des préférences généralisées qui permet à l’Inde d’exporter 2000 produits sans droits de douane.

Comme les Etats-Unis se sont traditionnellement appuyés sur le Pakistan, l’Inde a tendance à chercher des alliés ou des partenaires ailleurs, en Europe. Ce fut la Russie. C’est un peu la France. La France a accru sa coopération avec l’Inde, notamment dans le domaine militaire. Outre la vente des avions Rafales, et celle de sous marins Scorpéne, la coopération maritime a été renforcée par un accord de coopération logistique qui permet un accès mutuel aux bases militaires des deux pays. Comme la Chine a constitué un chapelet de bases navales, de Hambantota, au Sri Lanka, à Djibouti en passant par Gwadar, au Pakistan, ce qui déplait fortement à l’Inde, l’accord avec la France intéresse la nouvelle marine indienne, avec Djibouti, Mayotte et La Réunion.

Un accord de partenariat stratégique avait été signé dés 1998. L’Inde accueille deux Instituts français, un accord de reconnaissance mutuelle des diplômes doit permettre l’augmentation du nombre d’étudiants en France, qui sont pour l’instant 5000. Plus de 1000 entreprises françaises sont installés en Inde. EDF doit construire six réacteurs nucléaires EPR. Cependant, les échanges avec l’Inde ne représentent pour la France que deux tiers des échanges avec la Chine, mais sont plus équilibrés. L’ambition de faire de la France « le premier partenaire stratégique de l’Inde en Occident et de l’Inde le premier partenaire stratégique de la France en Asie » reste un objectif plus qu’une réalité.

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