Les conséquences du Brexit pour les expatriés... et les autres.

Les conséquences du Brexit pour les expatriés... et les autres.

Les patrons des supermarchés, des restaurants ou encore des usines alertent le gouvernement britannique sur les problèmes d’approvisionnements qu’ils rencontrent depuis le Brexit et la pandémie de Covid-19.

Les pénuries ont d’ores et déjà entrainé la fermeture de nombreux établissements. Certaines étagères des supermarchés sont vides. Et la fédération britannique de la distribution (BRC) prévient que la situation risque de s’aggraver à partir d’octobre, quand le Royaume-Uni va faire entrer en vigueur de nouvelles vérifications post-Brexit sur les produits d’origine animale importés de l’Union européenne.

Bien malgré elle, les entreprises tentent de s’adapter. Ainsi le géant des supermarchés Tesco ou celui du commerce en ligne Amazon n’hésitent pas à promettre des primes à l’embauche au Royaume-Uni, afin d’attirer les chauffeurs ou magasiniers dont ils ont besoin pour servir leurs clients. Et les industries de la viande envisagent des partenariats avec les prisons pour faire travailler certains prisonniers en vue de leur réinsertion.

De plus, Jonathan Portes, professeur à King’s College London, remarque que ces perturbations liées à la Covid s’observent à travers l’Europe, mais qu’au Royaume-Uni la situation a été aggravée par l’impact du Brexit. En effet, beaucoup de travailleurs originaires de l’Union européenne « ne sont pas revenus et ne veulent peut-être pas revenir. Le système d’immigration post-Brexit pourrait aussi perturber les modes de recrutement des entreprises ». 

Nous avons voulu interroger les expats, de tous les jours, au Royaume-Uni, afin de connaître les changements intervenus dans leur quotidien depuis le Brexit et la deadline pour obtenir la résidence permanente.

Tampons sur le passeport

Charlotte, qui vit à Londres depuis 18 ans, nous explique le retour de son mari et de ses enfants.

“En arrivant en France cet été (aéroport de Nantes), mes enfants et mon mari ont tous eu un tampon sur leur passeport (comme c’est le cas pour les ressortissants hors Europe), et un à la sortie (qui indique les jours d’entrée et de sortie du territoire français). C’est juste la symbolique que j’ai trouvé́ difficile. Sinon franchement rien n’a changé́ pour moi. Mais j’ai le « settled status » obtenu facilement puisque je vis ici depuis si longtemps.”

Charlotte, Française de Londres

“J’ai quitté Londres à cause des formalités du Brexit.”

Angèle explique qu’elle est bloquée depuis un an entre la Covid et les formalités à réaliser.

“On te piste comme un délinquant quand tu veux seulement aller travailler. C’est devenu un vrai bordel, ils perdent la moitié de leur personnel de restauration, car les Français sont réputés et nous sommes nombreux à être expatriés (autrefois pour ma part), mais c’est dommage de ne pas avoir de visa étudiant expats AUPAIR. Les formalités sont incompréhensibles et catastrophiques. L’exclusivité recherchée n’est pas la clef.”

Angèle, Française de Londres

Angèle témoigne du sentiment de rejet que cette situation induit.

“Si je devais décrire ce que beaucoup de mes compatriotes vivent ou ont ressenti c’est un sentiment de rejet et de complications notamment au point de vue administratif et de l’emploi. C’est une horreur, je ne sais pas comment les Anglais ressentent le Brexit, mais de notre côté́ c’est différent. Personnellement je suis attachée à l’Angleterre, c’est comme mon deuxième pays, mais il n’y a plus de visas pour les étudiants expats ou les jeunes AUPAIR. Le marché́ de l’emploi notamment sur la restauration où beaucoup de francophones travaillent est en difficulté, car beaucoup ont plié bagage et les restaurants ont du mal à recruter. Si vous n’avez pas le niveau d’anglais requis, et une entreprise qui vous accepte avec un Pre-Settle Status, vous n’avez aucun accès sauf pour le tourisme et depuis la Covid ça n’arrange rien.

Angèle, Française de Londres

“C’est compliqué de voir notre famille.”

Actuellement, Marieke vit à Guildford, mais avant elle était à Bristol. Elle est venue au Royaume-Uni il y a à peu près un an et elle a le Settled Status.

“En fait, je vis ici depuis 1 an, et j’espérais rentrer souvent le week-end pour voir ma famille… Mais avec le Brexit, il faut tout un tas de papiers, comme le passeport, et il y a trop de douanes… Et quand ma maman veut m’envoyer quelque chose, elle paie super cher. De plus je voudrais rentrer en France pour 2 semaines et j’aimerais que mon copain anglais vienne avec moi… Mais je pense que ça sera une galère.”

Marieke, Française de Guildford

“Obligée de prendre la nationalité britannique”

Nadine, qui vit au Royaume-Uni depuis 33 ans explique que même son fidèle compagnon canin est victime des nouvelles règles liées à l’application du Brexit.

“Notre vie de tous les jours n’a pas vraiment été́ affectée. Par contre, c’est la liberté́ de mouvement et les restrictions lors de nos voyages qui nous affectent davantage. Par exemple, nous partons toujours au minimum 3 semaines avec notre chien qui est âgé́ (17 ans). Il a une nourriture spéciale médicalisée que nous commandons sur internet. Nous sommes maintenant limités à 2kg de nourriture pour chien par personne, ce qui est largement insuffisant pour 3 semaines. Impossible de se ravitailler en France et impossible de changer ce qu’il mange (ça le rend malade). De plus, maintenant il lui faut un certificat de santé à chaque voyage, car les passeports britanniques pour chiens ne sont plus valables pour rentrer dans l’Union européenne. Le certificat coûte environ £180 ! Je me suis sentie obligée de prendre la nationalité britannique il y a 2 ans, juste pour avoir l’esprit tranquille après avoir vécu ici depuis 33 ans. Tout cet épisode Brexit m’a fait beaucoup de peine, car j’ai eu l’impression que mon pays d’adoption que j’aimais tant me rejetait. Maintenant c’est mon mari qui songe à prendre la nationalité française pour les mêmes raisons et pour que nous puissions continuer à partager notre vie entre les 2 pays sans restrictions.

Nadine, Française du Royaume-Uni depuis 33 ans

Fini l’American Dream

Pour Floriane, ce sont les nouvelles conditions d’obtention du visa qui l’inquiètent, pas pour elle mais pour les jeunes Français qui ne pourront connaitre l’aventure britannique.

“Il y a un manque sérieux de visas… Nous sommes obligés d’être sponsorisés par notre travail (donc il faut en trouver un avant de partir). Adieu l’aventure et cet esprit un peu similaire à « l’American dream » où nous pouvions venir faire du volontariat, au pair, des petits boulots, puis grimper les échelons au fur et à mesure que nous apprenions à connaître le pays et à s’intégrer...”

Floriane, Française de Londres depuis 25 ans

Pénuries dans les supermarchés

Sarah, habite à Londres depuis dix années maintenant. Elle a constaté qu’il manque des produits dans les supermarchés.
« Je l’ai aussi senti avec les commandes en ligne, les coûts sont plus élevés à cause des frais de transport dus au Brexit.”

Sarah, Française de Londres depuis 10 ans

Le Brexit a rendu la vie des expats compliquée mais certains ne perdent pas espoir malgré la difficulté de la vie de tous les jours. Le Royaume-uni perdra-t-il de son attractivité ? Les pénuries vont-elle s’aggraver avec l’exécution du deuxième volet des restrictions douanières ? Les Britanniques commencent à peine à découvrir toutes les conséquences de leur choix de 2016.

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