Ursula von der Leyen (Allemagne, droite) pour la Commission européenne. Charles Michel (Belgique, libéraux) pour le Conseil européen. Christine Lagarde (France, droite) pour la Banque centrale européenne
. Josep Borrell (Espagne, gauche) pour la diplomatie européenne. Après 3 jours de sommet sous haute lutte pour les Vingt-Huit chefs d’Etat afin de nommer les nouveaux dirigeants l’UE des cinq prochaines années. Un cinquième visage émergera demain avec l’élection par,les eurodéputés de leur président.
Après deux premiers conseils européens infructueux (28 mai, puis 20 et 21 juin), le troisième (30 juin) a finalement été le bon pour élaborer le casting qui dirigera l’Union européenne pour les cinq prochaines années. Il aura toutefois fallu trois jours d’interminables discussions et plusieurs interruptions de séance pour aboutir à une configuration acceptable par l’ensemble des Etats membres et respectant un équilibre gauche-droite, femmes-hommes et Est-Ouest.
S’agissant de la parité, « cela valait la peine d’attendre » la conclusion des longues négociations, a déclaré Donald Tusk, président sortant du Conseil européen lors de la conférence de presse de clôture, appelant désormais les parlementaires à élire une femme pour la première fois à la tête de l’exécutif européen.
Le compromis von der Leyen
En effet, s’agissant de la présidence de la Commission européenne, la conservatrice allemande Ursula von der Leyen, a été approuvée par les chefs d’Etat et de gouvernement. Membre du Parti populaire européen (PPE, droite), très expérimentée, francophile et résolument pro-européenne, l’actuelle ministre allemande de la Défense, ne manque effectivement pas d’atouts pour le poste. Même si elle n’était pas la cheffe de file officielle (Spitzenkandidat) de son camp et que son nom n’a jamais été évoqué avant… le 2 juillet !
Incontestablement, Ursula von der Leyen est un choix de compromis, pour ne pas dire un plan B. C’est en effet son compatriote Manfred Weber qui a mené la campagne du PPE et qui briguait par conséquent la tête de l’exécutif européen. Mais Emmanuel Macron lui a opposé une fin de non-recevoir. Quant aux autres Spitzenkandidaten et notamment le socialiste néerlandais Frans Timmermans qui, jusqu’au 1er juillet, semblait en mesure de rafler le poste, ils ont également été écartés. Pour les conservateurs, qui constituent le premier groupe au sein de l’assemblée parlementaire, il était impensable d’à la fois renoncer à M. Weber et laisser la gauche s’emparer de ce poste clé de l’UE.
Ce dernier a déclaré que cela avait été un « honneur » de conduire la campagne du PPE, indiquant son intention de continuer à présider son groupe au Parlement européen. De la même manière, Michel Barnier, longtemps envisagé pour le poste de président de la Commission et largement apprécié partout en Europe, a adressé ses « félicitations » aux quatre personnalités choisies.
La ministre allemande de la Défense dispose maintenant de deux semaines exactement pour aller à la rencontre des eurodéputés et s’assurer du soutien d’une majorité d’entre eux. Car si les Vingt-Huit se sont entendus sur son nom, il revient bien au Parlement européen d’élire formellement le président de la Commission européenne. Et si le respect prévaut à Strasbourg pour parler d’Ursula von der Leyen, le fait est qu’obtenir cette majorité ne sera pas nécessairement une formalité. Les élus européens souhaitaient en effet maintenir le système des Spitzenkandidaten, tandis qu’une personnalité encore plus centriste aurait été appréciée.
Afin d’équilibrer politiquement les nominations, le socialiste espagnol Josep Borrell est proposé par les Vingt-Huit pour le poste de haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères. Mais cette nomination sera-t-elle suffisante pour convaincre les parlementaires sociaux-démocrates d’approuver Mme van der Leyen ?
Si elle est élue par les eurodéputées, Ursula van der Leyen succédera à Jean-Claude Juncker le 1er novembre prochain, après validation de son collège de commissaires par le Parlement européen.
La balle passe dans le camp du Parlement européen
La réponse à cette question paraît d’autant plus incertaine que c’est un libéral, en la personne du Premier ministre belge sortant Charles Michel, qui a été choisi pour présider le Conseil européen à partir de décembre prochain. Tandis que Christine Lagarde, actuelle directrice du Fonds monétaire international et ancienne ministre de Nicolas Sarkozy, est proposée pour diriger la Banque centrale européenne (BCE) à partir du 1er novembre prochain.
Quelques minutes avant l’annonce des nominations par le président du Conseil sortant Donald Tusk, Udo Bullmann, eurodéputé et figure importante des sociaux-démocrates, déclarait que la désignation d’Ursula van der Leyen était « inacceptable« . Instantanément après la fin du marathon de négociations au Conseil européen, la balle est donc passée au Parlement européen de Strasbourg. L’institution se prononcera le 16 juillet prochain sur la candidature de la ministre allemande de la Défense, avec la possibilité de lui opposer un veto.
Le choix d’Ursula von der Leyen a été approuvé par 27 Etats membres sur 28. En effet, seule Angela Merkel s’est abstenue afin de ménager la coalition entre son parti et le Parti social-démocrate.
En attendant, dès mercredi 3 juillet, les eurodéputés éliront leur président à bulletins secrets. Le Conseil européen n’a pas évoqué de nom, mais suggère qu’un socialiste soit nommé pour la première partie de législature, avant qu’un membre du PPE ne le remplace pour la seconde. Une répartition gauche-droite habituelle au Parlement européen. Une personnalité telle que Serguei Stanishev, ancien Premier ministre bulgare, est évoquée au sein de la gauche européenne pour le poste. D’autant que, pour l’heure, aucun poste ne revient à un dirigeant venu des pays d’Europe orientale. Les candidats pour la présidence du Parlement européen ont jusqu’à 22h ce soir pour se déclarer.
Mais quoi qu’il advienne le 3, puis le 16 juillet au Parlement de Strasbourg, une refonte des procédures européennes, et plus particulièrement du Conseil européen, est à prévoir, du moins en ce qui concerne les nominations aux postes clés de l’UE. Comme Emmanuel Macron l’a très directement affirmé le 1er juillet devant un parterre de journalistes après une nuit blanche et stérile de discussions, les dirigeants européens donnent « une image qui n’est pas sérieuse » avec des réunions trop longues et qui n’aboutissent à rien. Pour le chef de l’Etat, réfléchir à la « simplification des procédures » est indispensable, au risque de ne pas être « crédible » sur la scène internationale.
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