Le seul député issu des rangs de la droite, Meyer Habib, élu pour la circonscription des Français installés en Méditerranée de l’est (Chypre, Grèce, Israël, Italie, Malte, Saint-Marin, Saint-Siège, Turquie et les Territoires palestiniens), voit son élection annulée ce vendredi 03 février 2023 par le Conseil constitutionnel.
Mis à jour le 4 février 2023 à 13h18
Soutien et assistance
Le Conseil constitutionnel a été saisi par Mme Deborah Abisror de Lieme, candidate pour le parti présidentiel, Renaissance, pour statuer sur la validité des opérations d’assistance au vote qu’avaient mis en place Meyer Habib et sur la légalité des soutiens que ce dernier avait reçus de la part d’élus israéliens le jour du vote.
En effet, en parallèle des dispositifs d’assistance organisés par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères dans le cadre du vote en ligne (messagerie sécurisée, ligne téléphonique dédiée), les équipes du candidat Meyer Habib avaient installé des permanences téléphoniques et des centres d’aide afin d’accompagner les électeurs rencontrant des difficultés pour voter par voie électronique. Les bénévoles, pris de zèle, proposaient donc aux Français les sollicitant de voter par internet à leur place en utilisant leurs identifiants et mots de passe. Si la démarche peut se comprendre, le but était d’aider les personnes frappées d’illectronisme à pouvoir faire entendre leur voix à travers le vote, la position du Conseil constitutionnel s’entend aussi. Comment garantir le libre vote et son secret si le citoyen passe par un tiers pour le réaliser et ce en dehors du dispositif de procuration ?
Autre point que l’instance suprême de notre pays reproche, dans sa décision, au candidat Habib, le soutien de personnalités israéliennes le jour du vote. Car comme en France, les élections législatives hors de France sont soumises aux dispositions L.49 et L.330 du code électoral. Ces dernières précises qu' »à partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de : (…) Diffuser ou faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale« . Si le Conseil constitutionnel reconnaît que les auteurs des messages de soutien à Meyer Habib avaient une « méconnaissance des dispositions précitées« , il retient l’infraction que ces derniers ont commise au profit de Meyer Habib.
C’est donc sur cette base que ce vendredi 03 février 2023 le Conseil constitutionnel a annulé les résultats des 5 et 19 juin 2022 dans la 8ème circonscription des Français établis à l’étranger. Ainsi comme Eléonore Caroit (Renaissance – Amérique centrale, du Sud, et Caraïbes) et Karim Ben Cheïkh (NUPES – Afrique du Nord et de l’Ouest), Meyer Habib devra donc repasser par les urnes s’il veut conserver son siège.
Mais le veut-il vraiment ? Depuis l’annonce, en pleine visite du Premier ministre israélien, les couloirs du Quai d’Orsay bruissent de rumeurs, l’ancien député Meyer Habib se verrait bien ambassadeur de France auprès d’Israël. Son absence de réaction depuis 24h laisse penser que des négociations sont actuellement en cours.
Deborah Abisror de Lieme
Si le candidat malheureux de la droite est silencieux (à l’heure où nous écrivons ces lignes) depuis l’annonce ce vendredi matin, Deborah Abisror de Lieme, elle, se félicite de la décision.
« C’est une victoire pour la démocratie«
Deborah Abisror de Lieme, candidate Renaissance dans la 8ème circonscription des Français établis à l’étranger
Lors de notre échange téléphonique, sa satisfaction comme sa motivation pour cette nouvelle campagne ne faisaient aucun doute. Dans le communiqué de presse, l’ancienne chef de cabinet, pendant la pandémie, d’Olivier Véran, ministre de la Santé, se déclare naturellement de nouveau candidate.
Les autres candidats devraient suivre le mouvement.
Vote en ligne
Cette nouvelle annulation met une nouvelle fois en lumière les problèmes rencontrés par la mise en place du vote en ligne. On le voit, au delà des problèmes techniques qui ont entravé la réception des codes en Algérie ou en Argentine, cette fois c’est le dispositif de vérification de l’identité du votant qui est mis en exergue. En effet, l’envoi de deux codes sur deux terminaux électroniques ne garantit pas que c’est le réceptionnaire qui va les utiliser.
Du côté de Docapost, la filiale de la Poste en charge de le l’organisation du vote, on reconnaît cet écueil, même si on en limite la portée (il faut que le réceptionnaire les communique à un tiers). Une solution pourrait exister en généralisant l’utilisation de l’Identité numérique qui combine passeport, reconnaissance faciale et code personnel. Mais à ce jour, l’app n’est pas disponible dans l’ensemble des pays, un risque de discrimination existe donc et pourrait conduire à de nouvelles annulations.
Et pourtant le vote en ligne est indispensable pour les Français de l’étranger, les bureaux de vote physiques étant concentrés dans les capitales ou les grandes villes des pays et donc peu accessibles facilement par tous nos compatriotes. Sans ce dispositif, la participation risque de s’effondrer.
On aura sûrement l’occasion de le constater lors des partielles, la possibilité de vote en ligne s’éloignant de jour en jour. Espérons qu’une solution sera trouvée rapidement, les premières élections législatives partielles auront lieu en mars 2023. A défaut, les candidats sortants seront favorisés et en particulier Meyer Habib qui dispose d’un large réseau dans le principal pays de sa circonscription, Israël.