Le Royaume-Uni, la nouvelle terre promise de l’intelligence artificielle ? 

Le Royaume-Uni, la nouvelle terre promise de l’intelligence artificielle ? 

Près de deux ans et demi après l’entrée en vigueur officiel du Brexit, le Royaume-Uni tente de tourner la page. Le Premier Ministre Rishi Sunak entend placer son pays parmi ceux en pointe en matière de haute technologie. Il a ainsi déclaré récemment que « le pays sera une superpuissance scientifique et technologique » et a insisté afin qu’il devienne une référence en matière de super-calcul et d’intelligence artificielle. 

À l’opposé de certains pays de l’Union européenne, le Premier Ministre britannique souhaite le développement des applications d’intelligence artificielle afin de doper la productivité. Le pari de l’intelligence artificielle que défend Rishi Sunak vise à reproduire les effets du Big Bang dans les années 1980 qui avait fait de Londres le centre financier de l’Europe.

Avec le Brexit, le marché intérieur est devenu étroit. La concurrence américaine est forte.  

Quels sont les atouts du Royaume-Uni par rapport aux autres pays européens ? Ce pays abrite plusieurs sociétés d’intelligence artificielle importantes, principalement à Londres, comme Google DeepMind. Il possède d’excellentes universités et accueille des chercheurs étrangers hautement qualifiés dont les entreprises ont besoin. L’accès de données est plus facile qu’au sein de l’Union européenne. L’État facilite leur accès. Aucun autre pays ne dispose d’un éventail de données sanitaires aussi important. Les dossiers de santé sont gérés par une seule entité, le National Health Service (NHS). Ils sont particulièrement complets. 

L’essor des entreprises d’intelligence artificielle au Royaume-Uni n’est pas gagné d’avance car le pays doit surmonter quelques faiblesses. Avec le Brexit, le marché intérieur est devenu étroit. La concurrence américaine est forte. La grande majorité des entreprises implantées au Royaume-Uni le sont également outre-Atlantique où elles bénéficient d’un écosystème favorable. 

Ces entreprises américaines privilégient de plus en plus l’Union européenne dont le marché intérieur est bien plus vaste. Même si Oracle dispose d’un centre de traitement des données graphiques nécessaires pour former les applications d’intelligence artificielle générative, aucun des géants du cloud-computing n’a encore choisi la Grande-Bretagne comme base de développement. Le Royaume-Uni manque d’ingénieurs et d’informaticiens pour créer un réel réseau d’entreprises spécialisées dans l’intelligence artificielle. Il doit encore clarifier sa législation qui se situe au milieu du gué entre celle, complexe, de l’Union européenne et celle, beaucoup plus libérale, des États-Unis. L’objectif serait d’instituer un ensemble de règles pragmatiques assurant la sécurité et la libre utilisation des données.

Un sommet mondial sur la réglementation de l’intelligence artificielle 

Rishi Sunak a annoncé, au début du mois de juin, lors d’une réunion à la Maison Blanche avec le président Joe Biden, qu’il organiserait un sommet mondial sur la réglementation de l’intelligence artificielle durant le prochain automne. Il entend d’ici là abandonner tout lien avec la réglementation de l’Union européenne. Le gouvernement britannique doit néanmoins tenir compte des réticences de la population et des Organisations Non Gouvernementales concernant l’exploitation des données personnelles, en particulier dans le domaine de la santé. 

Les entreprises britanniques comme celles installées sur le continent européen souffrent d’un accès compliqué aux microprocesseurs de haute technologie. La création de centres de production prend du temps. Le développement des centres de recherche chargés de l’intelligence artificielle pourrait pâtir de ces goulets d’étranglement. 

« Nous devons nous assurer que l’IA sera développée et utilisée en toute sécurité », a déclaré le Premier ministre britannique Rishi Sunak en déplacement à Washington DC.  ©Photo News

Comme au sein de l’Union européenne, le gouvernement britannique multiplie les subventions pour favoriser l’implantation de centres de production spécialisés dans les microprocesseurs ou l’intelligence artificielle. Jeremy Hunt, le chancelier, s’est engagé à financer à hauteur de 1,1 milliard d’euros un supercalculateur à Édimbourg. Ce montant est malgré tout faible au regard des sommes investies par les GAFAM. Amazon dépense chaque année 25 milliards de dollars pour la gestion de ces données. Les contribuables britanniques ne peuvent pas suivre le rythme du secteur privé. Le gouvernement britannique devrait centrer ses aides sur les infrastructures, sur la formation d’ingénieurs et sur la recherche fondamentale. Il devrait s’assurer d’un approvisionnement fiable en énergie propre et abordable car l’intelligence artificielle en consomme des quantités importantes. Si la Grande-Bretagne n’a pas d’approvisionnement en électricité bon marché, elle aura du mal à persuader quiconque d’y installer de grands centres d’unités de traitement graphique. La file d’attente pour obtenir une connexion au réseau britannique freine les investisseurs potentiels.

Transformer le Royaume-Uni en zone franche 

Pour décarboner son économie, le gouvernement britannique souhaite encourager la captation du CO2 et son enfouissement. Les projets visent à stocker dans les gisements de pétrole et de gaz jusqu’à 78 milliards de tonnes de CO2. 20 milliards de livres d’investissements, en partie publics, auraient été prévus pour financer des investissements de stockage. Le gouvernement britannique souhaite transformer son pays en startup nation à l’image d’Israël. Ce choix est également celui de la France voire de l’Allemagne. Les concurrents sur ce terrain sont donc nombreux. 

Pour attirer les investisseurs, le Premier Ministre anglais, dans le prolongement des promesses de Boris Johnson, propose de transformer le Royaume-Uni en zone franche bénéficiant d’une législation libérale. Cette politique risque de rencontrer l’hostilité de l’Union européenne qui ne veut pas d’un cheval de Troie à ses frontières. 

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