Le pari des ennemis de l’Europe

Le pari des ennemis de l’Europe

L’Europe a l’habitude des crises. Il s’agissait jusqu’alors de crises internes, crises de croissance. Cette fois, c’est différent : Jamais elle n’avait eu à affronter de crises extérieures, avec de vrais ennemis.

La crise du coronavirus montre que beaucoup parient sur l’éclatement de l’Europe. La Russie, on le savait depuis l’origine, aimerait une Europe divisée. Elle essaierait ainsi de reprendre pied dans les pays de son ancien glacis, du moins le croit-elle. Alors qu’elle a perdu les pays qui ont rejoint l’Union Européenne, puis la Serbie, puis l’Ukraine, elle rêve encore de panslavisme.

L’Europe a de vrais ennemis

Les Etats-Unis, c’est nouveau, affichent de plus en plus leur éloignement, leur mépris, voire leur adversité. Jusqu’à présent, ils soutenaient l’Union Européenne, mais pensent qu’elle leur échappe. A juste titre. Le Royaume-Uni espère les rejoindre. Si l’Europe échoue et se divise, ils deviendront les brillants seconds de l’Amérique. La Turquie, poussée aussi bien par la Russie que par les Américains s’exercent à un chantage migratoire (en Grèce) et militaire (en Lybie). Quant à la Chine, elle avance pas à pas, sans croire que cette Objet Politique Non Identifié qu’est l’Union Européenne puisse compter sans force, sans parti, ni chef.

Partout où il passe, le coronavirus montre que les Etats réagissent avec l’égoïsme naturel qui est le leur, à courte vue. Sur la crise sanitaire, même si chaque quidam a un avis alors que personne ne sait rien, il faudra attendre quelques mois au moins, la fin de la crise, pour faire le bilan des bonnes et des moins bonnes décisions. Pour l’instant, la catastrophe, heureusement, n’est pas certaine.

Sur la crise économique et financière, en revanche, on sait déjà que l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne, la Belgique, la France, tous les pays en somme, vont devoir affronter une crise économique, financière et sociale. La mise en panne de l’activité a déjà des conséquences. Qui paiera, et comment ?

L’Italie en danger

L’Italie peut elle faire face à une nouvelle crise financière ? Et la France ? Le gouvernement pense que la crise actuelle coutera plusieurs dizaines de milliards. L’Allemagne envisage une récession. Pourtant, elle est la seule à pouvoir apporter, avec ses excédents, garantie financière (pour les dettes) et investissements (pour l’activité). Le fera-telle ?

L’Allemagne a toujours refusé de prendre ses responsabilités de première puissance européenne. Elle. L’économie l’y obligera-t-elle ? Sinon, peut-elle envisager l’Europe sans l’Italie ? Et la France ? Car la situation de la dette française suit la pente italienne et non celle de l’Allemagne.

Le choix de l’Allemagne pour ou contre l’Europe

Ce serait bien sûr son intérêt, car les succès économiques allemands n’existeraient pas sans la construction européenne. Mais l’Allemagne comprendra-t-elle à temps, c’est-à-dire maintenant ? Merkel est sur le départ, sans successeur. L’AFD, créé initialement contre l’Euro, menace le système politique allemand. Les Verts, qui remplacent la gauche allemande, sont obligés de s’en remettre au gaz russe contre le nucléaire et à un antimilitarisme qui les met paradoxalement dans la main … des Américains. Ils votent régulièrement contre les programmes de défense européenne.

Des forces politiques et financières contre l’Europe

Drôle de période pour l’Europe. La Commission débloque des milliards, la Banque centrale aussi, mais tout crédit est une affaire de confiance. C’est le même mot. Qui a confiance en l’Allemagne en cas de crise financière en Italie ? D’autant que le gouvernement italien n’a pas de véritable assise électorale et qu’il inspire une confiance modérée.

Pour la première fois, de grandes forces se coalisent à travers le monde contre l’Europe. Des forces politiques et financières. Ici la guerre en Syrie, la crise migratoire, les batailles du pétrole et du gaz, là-bas une pandémie qui ferme le commerce et les frontières, enfin une dette qui explose. Etats-Unis, Royaume-Uni, hier alliés, attendent la faille financière et la dislocation politique. Seule l’Allemagne a la capacité d’assurer la cohésion européenne. Elle est forte, mais sa solitude en fait le maillon faible. A la France de la convaincre.

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