Le monde d’après sera-t-il vert et numérique ?

Le monde d’après sera-t-il vert et numérique ?

La crise sanitaire conduit à une accélération des tendances qui avaient cours avant la digitalisation et la transition énergétique. La première s’impose comme une évidence du fait de la mise en place des contraintes sanitaires, le virtuel permettant de limiter la diffusion du virus. La seconde est devenue un thème incontournable de la relance postCovid même si, en soi, elle n’a pas de lien avec le virus. 

Avec l’épidémie, l’opinion publique est plus sensible à la question de la vulnérabilité de l’environnement. Les pouvoirs publics estiment, en outre, que la transition énergétique est un facteur de relance économique, sachant que son coût peut être passé dans la dette « Covid ». 

La digitalisation incontournable de l’économie 

Le chiffre d’affaires du e-commerce en France en 2020 a dépassé 110 milliards d’euros. L’année dernière, ce mode de distribution a représenté 13,4 % du commerce de détail (source Fevad). En prenant en compte les services, le commerce en ligne capterait près d’un cinquième des dépenses de consommation des ménages. 

En Chine, ce pourcentage dépasse 25 %. La crise sanitaire a modifié le comportement des consommateurs. Même après le retour à la normale, certaines habitudes perdureront. Le succès des loisirs en ligne (vidéo à la demande) devrait résister à la réouverture des salles de cinéma. De même, la livraison des courses devrait se perpétuer voire s’amplifier tout comme celle des repas qui connaît un vif succès.

20% de télétravailleurs 

L’offre de services numériques ne peut qu’augmenter avec l’accroissement du marché. De plus en plus de créateurs d’entreprise se spécialisent dans ce type d’activités. Pour les entreprises existantes, l’épidémie amène à des modifications d’organisation et de stratégies. De 2009 à 2019, la proportion de salariés pratiquant régulièrement le télétravail est passée de 7,5 à 9%. Avec la crise sanitaire, ce taux est passé à plus de 20%. Si une décrue intervenait après la crise, il n’en demeure pas moins que le télétravail, une à deux journées par semaine, pourrait à terme devenir la norme, ce qui amènera les entreprises à revoir la taille de leur établissement et leur structuration. 

Pour rester compétitives et pour capter une partie des éventuelles relocalisations, les entreprises industrielles devront poursuivre leur robotisation. De 2002 à 2019, le nombre de robots pour 100 emplois industriels est passé de 1 à 2,2, au sein de la zone euro. Ce ratio est faible par rapport à celui constaté en Corée (8,5) ou au Japon (3,6). Dans la zone euro, l’Allemagne se démarque de ses partenaires avec un ratio de 3,4 contre 1,7 pour la France qui figure dans les derniers rangs. Le taux de robots est, de 1,9, en Chine.

Robotisation de l’industrie européenne  

Une mise à niveau de l’industrie européenne suppose un effort important dans les investissements dans les techniques de l’information et de la communication qui se sont élevées à 3 % du PIB en 2019. Ce taux est inférieur de 2 à 3 points à celui constaté aux États-Unis, au Japon, en Corée ou en Chine. 

La réduction des émissions de CO2 de 55 % d’ici 2030 et l’obtention de la neutralité carbone d’ici 2050 supposent un effort d’investissement sans précédent. Depuis 1990, la zone euro a réussi à réduire de 25% ses émissions en prenant en compte l’année 2020 qui est atypique. En 2019, la réduction n’était que de 18%. Les mutations digitales et environnementales sont deux sources d’inquiétudes pour les États membres de la zone euro. Cette double évolution peut conduire à une nouvelle déformation de la demande de biens et services au profit de biens et services importés et accentuer la désindustrialisation de l’Europe.

Dépendances européennes

Les importations en provenance des pays extérieurs de la zone euro ont déjà fortement progressé ces vingt dernières années en passant de 16 à 27 % du PIB du fait, en particulier, de la montée en puissance du commerce avec l’Asie du Sud Est. La zone euro est très absente de la production des produits et services électroniques (ordinateurs, semi-conducteurs, plateformes Internet). Parmi les sept premiers producteurs mondiaux d’ordinateurs, l’Europe n’a aucun représentant. Les États-Unis placent trois entreprises, Taïwan deux, et la Chine une tout comme la Corée du Sud. 

Pour la production de microprocesseurs, l’Europe est dépendante à 95 % des États-Unis, de la Corée, du Japon, de la Chine et de Taïwan. La capitalisation boursière des valeurs technologiques européennes est vingt fois plus faible que celle des États-Unis. Pour les énergies renouvelables, l’Europe est dépendante pour les équipements solaires des États-Unis ou de l’Asie du Sud Est. En ce qui concerne l’éolienne, la situation est un peu plus équilibrée grâce aux entreprises danoises et allemandes.

Risques d’appauvrissement 

L’Europe est également en retard pour les batteries. Ses capacités de production s’élèvent à une dizaine de Gigawatts (dont près de la moitié provenant de Pologne) quand celle de la Chine dépassent 217 Gigawatts et celle des États-Unis 50 Gigawatts. 

La zone euro est confrontée à un risque réel d’appauvrissement si des entreprises européennes n’arrivent pas à développer rapidement des filières que ce soit au niveau des énergies renouvelables ou dans le domaine des technologies de l’information. À défaut de pouvoir entrer en concurrence avec la Chine, les États-Unis ou la Corée, la zone euro dépendra de plus en plus des services domestiques à faible valeur ajoutée. La dépendance des États d’Europe du Sud au tourisme a montré ses limites avec la crise sanitaire. Cette dépendance est, en outre, de plus en plus mal supportée par la population locale en raison des nuisances qu’elle génère.

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