Laissez-passer : toujours au compte-gouttes

Laissez-passer : toujours au compte-gouttes

Depuis la mi-septembre, les consulats ont commencé à délivrer des laissez-passer pour les couples binationaux séparés à cause de la fermeture des frontières par la Covid-19.

Ces laissez-passer ne sont pas des visas. Ils ne confèrent pas de droit de résidence mais simplement le droit de pénétrer en France. En plus de ne pas être conforme à la réglementation Schengen, ce dispositif, au par avant réservé, aux Français qui avaient perdu leurs passeports ou aux cas exceptionnels, n’a pas été prévu pour un déploiement à grande échelle.

Pour réduire au maximum le nombre de candidats, des critères difficiles à remplir ont été mis en place. La solution magique de Jean-Baptiste Lemoyne c’est transformée en enfer administratif. Beaucoup sont, donc, encore en attente d’une solution. La situation est particulièrement tendue pour les couples dont l’un des membres est issu du Maghreb. Tour d’horizon des blocages !

La peur d’une immigration clandestine

Au coeur de l’été, le 8 août, Jean-Baptiste Lemoyne, sensibilisé par les nombreux collectifs « Love is not tourisme », avait annoncé la mise en place immédiate de Laissez-passer à destination des partenaires non-français et non-mariés.

Il aura fallu plusieurs semaines pour que la circulaire soit émise. Pourquoi ? Car la Direction des étrangers en France, émanation du Ministère de l’intérieur, a décidé de prendre la main sur ce dossier. Sa crainte ? Que s’organisent des filières clandestines d’immigration.

Même les couples pascés sont confrontés au problème, toute l’administration étant sur le qui-vive depuis l’annonce de ces laissez-passer distribués à tous les amoureux. Catherine, française de la Réunion, pascsée depuis plus d’un an, avec son compagnon sénégalais, est confrontée à une impasse. Le visa, accordé à un « pacsé » usuellement, a été refusé, du fait de la Covid-19, et le laissez-passer fût aussi refusé par manque de garantie de retour. Pourtant son partenaire est professeur des écoles au Sénégal.

Autre pays sous la loupe : l’Algérie. En effet, les clauses du traité d’Evian (indépendance de l’Algérie) prévoient qu’un Algérien, une fois sur le territoire national, ne sera pas obligé de retourner dans son lieu de résidence usuel pour demander un visa long séjour. Anais 31ans, française ancienne fonctionnaire de police actuellement en situation de handicap a dû, ainsi, annuler mon mariage. L’administration française n’a pas pu délivrer de visa au futur époux de nationalité algérienne. Et ce alors qu’ils avaient toutes les autorisations de mariage mixte de l’état Français et de l’état Algérien, et ce après des enquêtes. Le certificat de capacité de Mariage délivré par le procureur de la République, les bans publiés en France et pourtant, son futur mari est toujours en Algérie.

Nicolas Perret, administrateur du groupe « Love is not tourisme – France », s’insurge, comme ses membres, contre ces blocages incompréhensibles qui s’accumulent. Une des conditions pour obtenir son laissez-passer est d’être venu en France.. Et donc d’en être reparti au moins une fois. Des candidats à l’immigration illégale ne seraient pas repartis.

Une initiative contre-productive

A ces peurs des services d’immigration, il faut ajouter la lourdeur de la procédure. Cette nouvelle démarche vient parasiter le système des « visas tourisme » (incluant les visites familiales ou à des amis proches) qui a démontré son efficacité depuis des décennies.

Pour les juristes du groupe « Love is not tourisme », la délais induits par le traitement des laissez-passer est contraire à l’article 6 §1 de la convention européenne des droits de l’homme qui énonce que: “Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial“.

Le dossier complet, qui est demandé : preuve de relation, billets d’avions, etc, est aussi perçu comme intrusif et en infraction avec le RGPD.

Comme évoqué plus haut, ces suspicions confirment les aspects illégaux au niveau européen de la circulaire Lemoyne. Pour exemple, il faut être Français, alors que, normalement, tout citoyen européen doit être traité avec égalité et à cela s’ajoute une définition du couple qui n’est pas la même dans les droits français et européen.

Des familles déchirées

Il n’y a que des couples, transis d’amour, qui sont victimes de cette politique. Des familles crées pendant l’expatriation, aux parents non-mariés, sont aussi confrontées à des dilemmes cornéliens.

Comme Hugo, expatrié depuis 2017 aux Philippines. Sur place, il trouva l’amour et une petit fille en est née, il y a 3 mois. Victime de la crise économique, il ne peut plus travailler aux Philippines. Il est donc face au un choix difficile : se séparer de sa famille pour travailler ou bien de rester avec sa famille sans revenu. Sa situation ne rentrant dans aucune case prédéfinie par les autorités française, sa famille et lui désespèrent.

Fin de l’effet de zèle

Confrontés à tous ces dysfonctionnements, les collectifs « Love is not tourisme » ont deux revendications :

  • Soit un traitement plus rapide des laissez-passer avec une communication aux candidats des critères d’évaluation. La Direction des étrangers en France a communiqué les dits critères aux consulats sans les autoriser à les transmettre aux postulants ou aux proches en France.
  • Soit un retour au traditionnel Visa « Tourisme » avec une exemption aux mesures Covid-19 en fournissant la preuve du lien avec le citoyen Français

Se préparant à un long combat face à un gouvernement, tout puissant en cette période d’Etat d’urgence sanitaire, le collectif « Love is not tourism – France » a engagé Jean-Baptiste Soufron du cabinet FWPA (Paris) pour mener le combat devant le Conseil d’Etat. Si vous désirez les soutenir vous pouvez participer au financement de l’action judiciaire via cette cagnotte (cliquez ICI)

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