La transition énergétique et ses obstacles

La transition énergétique et ses obstacles

La réduction des émissions de CO2 dans les pays de l’OCDE est à peu près deux fois plus lente que ce qui était prévu dans les accords climatiques internationaux. En vingt ans, les Etats membres de l’OCDE n’ont réduit leurs émissions que de 20%. Pour atteindre la neutralité carbone d’ici le milieu du siècle, des efforts majeurs sont indispensables. Les Accords de Paris ont fixé un objectif de décarbonation des activités humaines. Ce pari visant à limiter le réchauffement climatique est un véritable défi comportant de nombreux obstacles.

La décarbonation, qui impose de manière arbitraire et réglementaire une substitution d’énergie, est une première dans l’histoire économique contemporaine. La réduction des émissions des gaz à effet de serre passe par le développement des énergies renouvelables. Elle conduit à un sous-investissement dans les énergies fossiles qui demeurent indispensables durant la période de transition.

Le montant des investissements pour le pétrole divisé par deux

Le montant des investissements pour la recherche pour l’exploration et la production de pétrole a été divisé par deux entre 2012 et 2022 au niveau mondial. Ce sous-investissement provoque une augmentation des prix de l’énergie, phénomène renforcé par la guerre en Ukraine. Pour pallier ce problème et échapper au risque de pénurie, les Etats sont tentés de recourir à des énergies polluantes, dont le charbon.

La transition énergétique est d’autant plus délicate à mener que la substitution des énergies carbonées par des énergies renouvelables ne s’effectue pas selon des critères de rentabilité immédiate.

Des inégalités fortes

Avec le coût du stockage de l’énergie rendu nécessaire par l’intermittence de la production, les énergies renouvelables ont une efficience plus faible que les énergies carbonées. Le recours aux énergies renouvelables et aux équipements qui y sont associés (voitures électriques) conduisent à des inégalités fortes et nécessitent la mise en œuvre de politiques redistributives importantes.

La transition énergétique conduit à une forte augmentation de la demande pour certaines matières premières dont les métaux rares, indispensables pour la construction des réseaux électriques ou des batteries électriques. Cette demande s’accompagne d’une hausse des cours qui se répercute sur le prix des énergies renouvelables. En dix ans, le prix du lithium a été multiplié par dix, celui du nickel et du cobalt par plus de deux.

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4 points de PIB chaque année pendant 30 ans

La décarbonation des activités économiques nécessite la réalisation de nombreux investissements. Leurs coûts sont évalués à 4 points de PIB chaque année pendant 30 ans avec, du moins à court terme, une faible rentabilité. Les entreprises industrielles devront modifier leurs équipements. La rénovation thermique des bâtiments touchera les particuliers et les entreprises. L’ensemble de la filière des transports est également concerné par la transition énergétique.

La hausse des taux d’intérêt réels, en lien avec le changement de cap des politiques monétaires des Banques centrales afin de lutter contre, renchérit le coût de ces investissements et impose probablement de recourir à de nouvelles sources de financement.

La transition énergétique repose sur des choix technologiques qui pourraient se révéler hasardeux. L’urgence impose d’opter pour des solutions techniques sur lesquelles des doutes existent ou qui pourraient être moins efficientes que d’autres qui exigent plus de temps pour leur développement.

Le recours au moteur électrique pour les véhicules comporte de nombreux inconvénients (batteries polluantes et lourdes, autonomie faible, etc.) mais cette technique a l’avantage d’être relativement facile à déployer quand le moteur à hydrogène est plus complexe à généraliser (production d’hydrogène vert, création d’un réseau de stations à hydrogène, etc.).

Le changement des comportements

Pour réussir la transition énergétique, le changement des comportements est jugé nécessaire. Or la croissance des deux cents dernières années s’est construite sur la base d’une énergie abondante et bon marché. Les ménages occidentaux ont pris l’habitude de se chauffer, de climatiser, de disposer d’un grand nombre d’équipements électroménagers, d’une ou plusieurs voitures, de prendre l’avion, etc.

La remise en cause du mode de vie occidental sera délicate à mener dans un contexte où les consensus sont de plus en plus difficiles à façonner.

Auteur/Autrice

  • Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.

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