Exécutif et élus de la majorité se réjouissent de l’accord de coalition trouvé mercredi (24 novembre) en Allemagne, très aligné sur les priorités françaises, notamment sur ses ambitions pour l’UE.
L’enthousiasme est palpable du côté français à la suite de la publication de l’accord entre les futurs partis de coalition qui dirigeront l’Allemagne post-Merkel.
S’il s’agit d’une bonne nouvelle pour Paris, c’est que le contrat passé entre les sociaux-démocrates du SPD, les Verts et les libéraux du FDP, au titre évocateur « Oser plus de progrès — alliance pour la liberté, la justice et la durabilité », semble très bien s’accorder avec la vision française, sur l’Europe particulièrement.
« C’est très positif ce qu’il se passe en Allemagne », se réjouit la nouvelle coprésidente de la délégation française du groupe Renew au Parlement européen, Valérie Hayer. Alors que « la France est de nouveau ambitieuse sur la scène européenne » et qu’elle « n’a pas toujours eu le soutien espéré de son partenaire historique », elle se félicite du « renouveau de la dynamique du couple franco-allemand ».
« Quand le couple franco-allemand est fort, l’Europe est forte », résume l’eurodéputée pour EURACTIV.
Le ministère des Affaires étrangères a par ailleurs indiqué vouloir « travailler rapidement avec le prochain gouvernement allemand », dans la perspective de la présidence française du Conseil de l’UE (PFUE) qui doit débuter en janvier 2022.
« Il y a une forme d’euphorie autour de cet accord puisqu’il semble y avoir une vraie volonté, et non pas une nécessité de gouverner ensemble » de la part des trois partis qui « ont réussi à trouver ce qu’ils avaient en commun », analyse Paul Maurice, chercheur au comité d’étude des relations franco-allemandes de l’Institut français des relations internationales (IFRI), pour EURACTIV.
Une Europe plus fédérale
Listes transnationales aux élections européennes, un « système de Spitzenkandidat obligatoire », droit d’initiative pour le Parlement européen, respect de l’État de droit, suites à donner à la Conférence sur l’avenir de l’Europe, « l’évolution de l’UE vers un État fédéral européen »… tout y est pour satisfaire Paris et son projet pour les 27, détaillé par le président de la République lors de son discours de la Sorbonne de septembre 2017.
« Plus de fédéralisme européen, ça veut peut-être dire aussi plus de marge de manœuvre pour la France », souligne M. Maurice, anticipant que ces convergences entre Paris et Berlin pourraient aider Emmanuel Macron à se positionner comme le leader en Europe, avec le soutien allemand.
La référence à davantage de « souveraineté stratégique » pour l’Europe est également très bien accueillie par la France. « C’est de bon augure pour la PFUE », note Mme Hayer.
L’eurodéputée Nathalie Loiseau (Renew) se réjouit également que le FDP ait « poussé pour un agenda d’autonomie stratégique ». Ce gouvernement est à la fois « le signe d’une continuité », confirmant l’affection du peuple allemand pour l’Europe, et « une évolution positive », confie l’ancienne secrétaire d’État aux Affaires européennes à EURACTIV.
Le contrat de coalition fait aussi la part belle aux relations franco-allemandes. « À la page 136, on parle de l’assemblée parlementaire franco-allemande », souligne le député de la majorité Christophe Arend, ravi.
« C’est le signe fort que le futur gouvernement allemand va compter sur cette assemblée pour lever les éventuels obstacles », explique celui qui en préside le bureau à EURACTIV. Il appelle le gouvernement français à également emprunter cette voie.
L’énergie nucléaire
La question, très sensible, de l’énergie nucléaire n’est pas directement abordée dans le l’accord de coalition. Il s’agit pourtant d’une divergence majeure au sein du couple franco-allemand, anticipé par les observateurs politiques.
La nouvelle coalition se fixe un objectif ambitieux de 80 % d’énergies renouvelables d’ici à 2030, sans pour autant revenir sur l’abandon en cours de ses centrales nucléaires.
« Les Verts restent quand même très opposés au nucléaire », souligne M. Maurice. Le parti doit d’ailleurs hériter de nombreux portefeuilles et notamment ceux regroupés au sein d’un « super » ministère de l’Économie, du Climat et de l’Énergie.
Une posture qui ravit leurs homologues français. « J’attends ce gouvernement sur la taxonomie. Il est très important qu’il contre les Français, qu’il fasse pression pour que le nucléaire en soit exclu », défend l’eurodéputée Michèle Rivasi au cours d’un échange avec EURACTIV.
L’eurodéputé David Cormand salue, quant à lui, un « projet très mature », « une feuille de route publique qui semble plus démocratiquement mature que ce que l’on peut voir en France ».
La France, quant à elle, plaide pour davantage de nucléaire dans le mix énergétique des États membres, afin d’atteindre les objectifs climatiques qu’ils se sont fixés, et défend ainsi sa place dans la future taxonomie verte européenne.
« Nous envisagerons une action juridique si Emmanuel Macron parvient à imposer le nucléaire dans la taxonomie. Si le climat est LA priorité en Europe, le nucléaire est en dehors des clous », prévient Mme Rivasi.
Laurence Maillart-Méhaignerie, présidente de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à l’Assemblée nationale, se montre plus pragmatique. Si ce contrat de coalition montre l’ambition de l’État allemand « à être au rendez-vous des enjeux climatiques », « les enjeux de décarbonation de l’Allemagne sont autrement difficiles que ceux de la France » compte tenu de son mix énergétique et sa dépendance aux centrales à charbon, explique-t-elle à EURACTIV.
« [Les Allemands] sont embêtés sur le nucléaire car les Verts n’en veulent pas. Mais pour le moment, nous ne voyons pas comment, à court terme, nous pouvons nous passer du nucléaire pour atteindre la neutralité carbone », ajoute la députée macroniste, notant « qu’avec l’électrification de l’industrie, du parc automobile, la rénovation énergétique, etc. les besoins en électricité vont augmenter ».
L’UE devrait très prochainement trancher sur l’inclusion ou non du nucléaire dans la taxonomie.
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