la Commission européenne dévoile sa loi sur les marchés numériques !

la Commission européenne dévoile sa loi sur les marchés numériques !

La Commission européenne a dévoilé ce 15 décembre un vaste ensemble de mesures réglementaires, réunies dans la loi sur les marchés numériques, visant à réprimer les géants mondiaux du numérique, dans le cadre de deux textes historiques qui remanieront le fonctionnement de l’économie des plateformes dans l’UE.

Dans le cadre de la législation sur les services numériques (DSA), dont un projet a été obtenu par Euractiv, les plateformes risquent de se voir infliger des milliards d’euros d’amendes si elles ne respectent pas les nouvelles règles dans différents domaines, notamment la transparence de la publicité, la suppression des contenus illicites et l’accès aux données.

La loi sur les marchés numériques (DMA), quant à elle, proposera une série d’interdictions ex ante ainsi qu’un « outil d’enquête de marché » pour détecter les comportements anticoncurrentiels dans l’économie des plateformes.

Comme pour la DSA, les sanctions pour violation des règles comprennent des amendes pouvant aller jusqu’à 6 % du revenu annuel d’une société donnée. Des sanctions supplémentaires pour avoir fourni des « informations incorrectes, incomplètes ou trompeuses » en vertu des obligations de déclaration ou pour ne pas s’être « soumis à une inspection sur place » ont été placées à 1 %.

Les plateformes comptant au moins 45 millions d’utilisateurs seront soumises à ces règles, soit un nombre équivalent à environ 10 % de la population de l’UE.

Transparence des publicités et contenu illégal

La Commission cherche à faire avancer les choses dans le domaine de la transparence de la publicité en ligne, en proposant de nouvelles règles qui donneront aux utilisateurs des plateformes en ligne des informations immédiates sur les sources des publicités qu’ils voient, y compris des renseignements détaillés sur les raisons pour lesquelles une personne a été ciblée par une publicité spécifique.

En ce qui concerne les contenus illégaux, les plateformes devront prouver qu’elles n’ont pas « connaissance concrète » de la présence de ces contenus sur leurs sites pour éviter toute responsabilité, ou montrer qu’elles auraient « agi rapidement » pour supprimer ou désactiver l’accès à ces contenus.

L’exécutif européen a conçu un cadre général pour la définition des contenus illégaux, y compris les discours haineux illégaux, les contenus terroristes, les contenus discriminatoires illégaux, les contenus pédopornographiques, le partage illégal d’images privées sans consentement, le harcèlement en ligne, la vente de produits contrefaits et l’utilisation non autorisée de contenus protégés par des droits d’auteur.

Les plateformes seront également tenues de procéder à des évaluations annuelles des risques visant à en analyser la gestion.

Ces études d’incidence devraient également servir de base à diverses « mesures d’atténuation » que les plateformes devraient prendre en compte « afin de décourager et de limiter la diffusion de contenus illégaux ».

Il pourrait s’agir de mesures correctives « telles que l’arrêt des recettes publicitaires pour des contenus spécifiques, ou d’autres actions, comme l’amélioration de la visibilité des sources d’information faisant autorité ».

Dans le but de faciliter la lutte contre les contenus illicites, des mécanismes efficaces de « notification et d’action » devraient être mis en place pour permettre aux individus de « les informer de la présence – sur leur service – d’éléments d’information spécifiques que l’individu ou l’entité considère comme des contenus illicites ».

« Enquêtes d’initiative volontaire »

Le projet n’est pas opposé à l’idée que les plateformes prennent leurs propres mesures « volontaires » pour « détecter, identifier et supprimer ou désactiver l’accès aux contenus illégaux », et précise que la responsabilité sera toujours garantie si les plateformes décident de mener de telles enquêtes volontaires.

Le texte indique clairement qu’il maintiendra l’interdiction d’une obligation générale de surveillance dans la directive de 2000 sur le commerce électronique.

Coordinateurs des services numériques

En outre, les États membres de l’UE devront nommer un « coordinateur des services numériques » pour superviser la transposition du règlement.

Le coordinateur surveillera le nombre d’utilisateurs d’une plateforme « tous les six mois » pour voir si le service en ligne concerné entre dans le champ d’application des 45 millions d’utilisateurs.

De surcroît, les coordinateurs ont reçu le droit de forcer les plateformes à fournir l’accès aux données « nécessaires pour surveiller et évaluer » le respect des règles, et peuvent également demander que les plateformes fournissent des données clés à des « chercheurs vérifiés » qui examineront leurs activités dans le cadre de leurs efforts pour se conformer au règlement.

Un groupe de coordination paneuropéen, appelé « Conseil européen des services numériques », sera également créé pour harmoniser l’application de la DSA.

Loi sur les marchés numériques

En attendant, mardi 15 décembre, la Commission présentera également sa loi sur les marchés numériques (DMA), qui introduit une liste de pratiques interdites ex ante par les gardiens du numérique, ainsi qu’un outil d’enquête sur le marché.

Une fuite de la liste des pratiques interdites au début de l’année a révélé que les grandes entreprises technologiques pourraient être confrontées à des restrictions de leurs activités commerciales, y compris l’utilisation exclusive de données et les activités d’auto-référencement.

Cependant, selon le projet de liste noire tel qu’il est actuellement rédigé, aucune « interdiction générale » des activités d’auto-référencement n’est susceptible d’être proposée, même si la Commission est censée vouloir proposer quatre types spécifiques d’activités d’auto-référencement qu’elle souhaite interdire, sur la base des connaissances acquises au cours des années d’application de la législation antitrust.

Les plans de l’exécutif comprennent également une liste grise potentielle d’activités jugées « déloyales » et qui pourraient donc nécessiter une surveillance accrue de la part d’une autorité compétente.

Une « liste blanche » d’obligations positives pourrait, quant à elle, contenir des responsabilités plus importantes en matière d’interopérabilité et permettre un meilleur accès à certains types de données.

En ce qui concerne l’outil d’enquête sur le marché, l’utilisation de cet instrument est susceptible d’entraîner l’ajout de nouveaux services au champ d’application des interdictions préalables, la désignation de nouvelles entreprises comme gardiennes du numérique et la réglementation de certaines nouvelles pratiques.

L’exécutif de l’UE avait initialement prévu que l’outil permette d’enquêter sur les marchés proches de l’échec, en particulier dans l’économie numérique, de même qu’il prévoyait d’imposer des mesures correctives au cas par cas si nécessaire. Cependant, à la suite des critiques du comité d’examen de la réglementation au sein de la Commission, le pouvoir de l’outil d’imposer des mesures correctives a été édulcoré.

De leur côté, lundi soir (14 décembre), les géants technologiques à Bruxelles ont intensifié leurs efforts de lobbying.

Un message particulièrement direct a été envoyé par Facebook, qui a décidé de cibler son homologue américain Apple.

« Nous espérons que la DMA fixera également des limites pour Apple », a déclaré un porte-parole de Facebook à Euractiv. « Apple contrôle un écosystème entier, de l’appareil à l’App Store en passant par les applications. Il utilise ce pouvoir pour nuire aux développeurs et aux consommateurs, ainsi qu’aux grandes plateformes comme Facebook. »

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