L’attaque iranienne contre Israël a été un échec. Était-il négocié ? L’Ayatollah avait promis une punition aux Israéliens, après l’élimination par une frappe israélienne de sept officiers de haut rang à Damas, notamment le chef des « Gardiens de la révolution » qui coordonnait les opérations avec le Hezbollah et la Syrie. Il fallait donc une riposte publique. Selon les Iraniens, les objectifs ont tous été atteints. La base d’où sont partis les avions israéliens a été détruite, le centre de renseignements aussi. En fait, il n’en est rien. Seule victime, une petite fille de sept ans, une Palestinienne israélienne. Les bases n’ont pas été touchées ; le centre de commandement non plus. Les espaces aériens d’Israël, du Liban, de Jordanie ont vite été réouverts. Aucun risque.
Alors que 3000 drones et missiles étaient attendus, pour saturer la défense israélienne, il n’y en eut que 300. La quasi-totalité a été détruite, soit par la défense israélienne, soit par leurs alliés, dont la liste est révélatrice : États-Unis, Royaume-Uni, Arabie saoudite, Jordanie. L’Égypte aussi s’était mis en état d’alerte. La France a fourni des renseignements.
Les États-Unis sont dans une phase isolationniste.
Désormais, la question est de savoir si, après cette attaque, la riposte israélienne frappera l’Iran, notamment ses centres de recherche et de production nucléaire. Israël attend le feu vert américain, qui n’est jamais venu. Même du temps de Trump.
Les États-Unis ne veulent pas d’une extension de la guerre, parce que cela les impliquerait. Ils sont dans une phase isolationniste, entamée depuis Obama en Syrie, qui a laissé le champ libre aux Russes, maintenu le régime de Damas en place. Le retrait américain s’est amplifié par le rappel soudain des forces de Syrie décidé par Trump, puis par l’abandon honteux de l’Afghanistan, en traitant avec les Talibans.
Les États-Unis ne veulent plus s’impliquer. Ils ont du pétrole ( ils sont les premiers producteurs mondiaux), ils ne veulent pas d’une interruption de la navigation dans le détroit d’Ormuz, ne souhaitent pas un nouveau front au Moyen Orient , d’autant qu’ils mobilisent leur attention, et leurs forces, en Asie face à la Chine.
Plus il y a de fronts, plus les Russes ont les mains libres.
Au contraire de Russes, qui veulent disperser les efforts de guerre entre l’Ukraine et le Moyen-Orient. Plus il y a de fronts, plus les Russes ont les mains libres. Quant aux Chinois, ils ne veulent pas d’un front supplémentaire maintenant, parce qu’ils ne sont pas prêts à attaquer Taïwan et que le commerce est leur atout. Une guerre au Moyen-Orient les priverait du pétrole iranien et ferait monter le prix de celui-ci, tout en freinant le commerce mondial qui est leur oxygène alors que leur économie patine.
Les Iraniens ont donc mené une attaque presque symbolique. Les Israéliens attendent l’occasion de convaincre les Américains de frapper directement l’Iran, en attaquant ses sites nucléaires. La réunion du G7 et du conseil de sécurité vise à demander de calmer le jeu; c’est-à-dire de demander à Israël une riposte mesurée. À croire que si les États-Unis avaient prévenu publiquement d’une attaque contre Israël, que si l’Arabie et la Jordanie ont coopéré à la défense d’Israël, c’était avec l’assurance que le jeu n’irait pas plus loin. Eux aussi craignent d’être victimes de l’Iran.
L’assurance que le jeu n’irait pas plus loin.
Ne pas oublier que l’attaque du 7 octobre a été déclenchée parce que l’Arabie saoudite s’apprêtait à signer un accord avec Israël. L’Iran a donc activé le Hamas pour commettre un acte irréparable ; ce qui fut fait. Et Israël a répliqué à Gaza, au lieu de répliquer en Iran. Le résultat est une tragédie palestinienne, à Gaza, et une descente infernale pour Israël. Les bombes ne règlent rien. Pas plus celles de Gaza que celles de l’Iran. Ce sont les cibles qui comptent.
Le raid iranien a démontré qu’Israël était capable de se défendre, avec des alliés puissants, face à l’Iran. L’armement iranien n’est pas au niveau de la défense israélienne. Mais il est possible que cette riposte ait été volontairement mesurée, pour éviter l’embrasement de la région. Alimenter un feu continue sans jamais se brûler, tel est la tactique iranienne. Les foyers sont à Gaza, au Liban, en Mer rouge, au Yémen, dans le Sinaï, partout dans le monde si cela est possible, par des attaques terroristes.
Parvenir à la maîtrise de la bombe nucléaire, qui garantira l’impunité. Et plus encore, la survie du régime.
Pendant ce temps, parvenir à la maîtrise de la bombe nucléaire, qui garantira l’impunité. Et plus encore, la survie du régime.
Car la bombe est un élément du despotisme : personne ne touche à celui qui pourrait déclencher le feu nucléaire. C’est le théorème nord-coréen. Appliqué par Poutine. Si Poutine n’avait pas la bombe, la guerre d’Ukraine serait finie. La Corée du Nord peut opprimer sa population tant que son guide suprême le veut, personne ne le gênera. C’est ce que recherchent les ayatollahs: que personne n’aide à la déstabilisation de leur théocratie, de plus en plus détestée par le peuple et la jeunesse iranienne.
L’Iran ne veut pas de guerre maintenant. La guerre qui importe le plus aux Iraniens n’est pas celle d’Israël ou du grand Satan, elle est contre la jeunesse iranienne. Toute politique étrangère a sa racine dans la politique intérieure.
Échec iranien, échec israélien. Pour un échec et mat, il faudrait détruire les sites nucléaires de l’Iran, ce qui atteindrait le régime en son cœur. La menace perdure. Ce sera donc un pat. La guerre va durer.
Laurent Dominati
a. Ambassadeur de France
a. Député de Paris
Président de la société éditrice du site Lesfrancais.press
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