L’économie française est de moins en moins sensible aux évolutions de l’épidémie. La quatrième vague n’a pas eu d’effets significatifs sur l’activité, cette dernière n’ayant pas donné lieu, il faut le souligner, à l’adoption de confinements (à l’exception de plusieurs régions d’outre-mer). Les économistes de l’INSEE estiment au vu des résultats de cet été que la croissance pourrait dépasser 6% en 2021 (6,25% après -8% en 2020).
La France pourrait ainsi avoir retrouvé le niveau d’activité d’avant crise d’ici la fin de l’année. Les économistes de l’INSEE espèrent une accélération de l’activité dans les prochains mois surtout si les problèmes d’approvisionnement s’estompent. Plusieurs incertitudes pourraient néanmoins corriger à la baisse les prévisions. Le ralentissement de l’activité en Chine avec l’amplification de la quatrième vague ainsi que les menaces inflationnistes pourraient peser sur la conjoncture du dernier trimestre. En juillet et en août, l’activité économique se situait entre -1 et -0,5% par rapport au quatrième trimestre 2019, contre environ -30% en avril 2020 (première vague), -7% en novembre 2021 (deuxième vague), et -6% en avril 2021(troisième vague). En juillet, la consommation des ménages a néanmoins légèrement diminué (-2% sous son niveau d’avant-crise, après -1% en juin). Si les achats de biens ont fléchi, ceux de services avec la réouverture des lieux de loisirs ont continué de progresser.
En août, l’introduction du passe sanitaire aurait eu peu de conséquences sur l’activité. Selon les premières données recueillies par l’INSEE, la consommation dans l’hébergement-restauration serait supérieure au troisième trimestre 2021 à son niveau de l’été 2020, tout en restant inférieure à son niveau d’avant-crise.
La peur de l’inflation est-elle exagérée ?
Avec la sortie des confinements et les plans de relance, des tensions sur les approvisionnements et une remontée concomitante des cours des matières premières sont constatées à l’échelle mondiale. Elles sont également alimentées par la désorganisation des circuits de production du fait des différentes vagues de l’épidémie. Certaines de ces tensions se stabiliseraient, selon l’INSEE. Par ailleurs, les hausses font suite à des baisses importantes intervenues en 2020.
En juillet 2021, les prix de production de l’industrie française, tout comme les prix agricoles à la production, ont ainsi augmenté malgré tout de 8% sur un an. Parmi les services, les prix de production du transport maritime et côtier de fret connaissent de fortes hausses soutenues par la demande. Dans la construction, le coût du béton, du ciment, des plaques en plâtres est également en très vive augmentation. Sur le bois, après une augmentation provoquée par une pénurie mondiale, une détente est enregistrée depuis le mois d’août. Du côté de la production, la part d’entreprises qui se déclarent limitées par les difficultés d’approvisionnement a marqué, en juillet, un point haut par rapport aux années précédentes dans nombre de branches, selon les enquêtes de conjoncture. La production automobile a par exemple nettement rechuté au premier semestre sous l’effet de la pénurie mondiale de composants électroniques.
Les hausses de prix sont beaucoup plus importantes aux États-Unis qu’en Europe et en France en particulier. L’INSEE estime que l’inflation devrait très légèrement repasser au-dessus de la barre des 2% en glissement annuel d’ici la fin de l’année.
Insuffisance de personnel
Au niveau du recrutement, les tensions progressent. Interrogées en juillet dans les enquêtes de conjoncture, environ 15% des entreprises de l’industrie et des services et 40 % de celles du bâtiment se déclaraient limitées dans leur production par l’insuffisance de personnel.
Pour le second semestre 2021, l’INSEE considère que l’activité continuerait à progresser mais de façon plus modérée, après le haut niveau atteint en juin. Pendant la période estivale, et pour la première fois depuis le mois d’octobre 2020, l’économie, sauf en outremer, ne subissait pas de contraintes. Les climats des affaires se situent par ailleurs depuis le mois de mai très au-dessus de leur moyenne de long terme (100) et ce dans l’ensemble des principaux secteurs, traduisant notamment la levée des restrictions les plus pénalisantes. Ils tendent néanmoins à se tasser dans les services. Depuis le mois de janvier, un nombre croissant de dirigeants d’entreprise soulignent la progression des obstacles à la production, notamment en ce qui concerne l’approvisionnement et la main-d’œuvre. L’industrie et le bâtiment sont les plus exposés à ces goulets d’étranglement. 15% des entreprises ont signalé des problèmes de recrutement, ce taux est de 40% dans le bâtiment, part d’entreprises confrontées à des problème d’insuffisance de personnel en % des entreprises.
Une production en progrès
L’INSEE considère que les difficultés d’offre rencontrées par les entreprises tendraient à se réduire d’ici la fin de l’année. L’activité économique retrouverait en fin d’année son niveau d’avant la crise, malgré la persistance de contrastes sectoriels. Le PIB se situerait respectivement à -0,6% et -0,1% en écart à l’avant-crise au troisième puis au quatrième trimestre 2021. Au niveau sectoriel, l’industrie serait à -2% par rapport au niveau d’avant-crise au troisième trimestre puis -1% au quatrième. Elle serait portée par l’agroalimentaire, qui progresserait lentement par rapport au niveau haut de juin, les « autres branches industrielles » (chimie, textile, métallurgie…) et les biens d’équipements, lesquels reviendraient au niveau d’avant-crise. Les pénuries dans l’automobile continueraient de peser sur l’activité de la branche des matériels de transport, occasionnant la fermeture ponctuelle de certaines chaînes de production. L’activité dans la construction poursuivrait sa hausse et se situerait à -2% au quatrième trimestre, par rapport au niveau d’avant-crise.
Dans les services principalement marchands, le fort rebond dans les branches affectées auparavant par les restrictions conduirait d’ici la fin de l’année à des niveaux d’activité inédits depuis le début de la crise. Le commerce reviendrait à son niveau d’avant-crise et dans l’hébergement-restauration, les services de loisirs et les services de transport, l’activité continuerait à progresser sans toutefois rejoindre ce niveau ; certains facteurs pesant de façon structurelle sur la demande (le recours plus fréquent au télétravail, la reprise inégale du tourisme international et des voyages d’affaires…).
Plusieurs branches ont dépassé leur niveau d’avant-crise, les branches de l’ l’information-communication, les services aux entreprises, en particulier. Les services, principalement marchands, se situeraient à 1% sous le niveau d’avant-crise au troisième trimestre, revenant ensuite quasiment à ce niveau au quatrième trimestre. Dans les services principalement non marchands, l’activité rejoindrait également une trajectoire de hausse plus tendancielle. Consommation des ménages, un retour presque à la normale. Après s’être fortement dégradée en avril du fait du troisième confinement, la consommation des ménages s’est redressée en mai et en juin avec la levée progressive des restrictions sanitaires. Elle s’est ainsi située en juin à un niveau proche de celui d’avant-crise (-1 % par rapport au quatrième trimestre 2019, après -4% en mai et -12% en avril), soit une progression de +1,0% au deuxième trimestre, après une stagnation au précédent. En juillet, la consommation a baissé. Elle est ainsi revenue à -2% de son niveau d’avant-crise. Elle a été entravée par la faiblesse des achats des véhicules. En août, la consommation aurait légèrement progressé, atteignant -1 ½ par rapport à son niveau d’avant-crise. La mise en place du passe sanitaire n’aurait que modérément affecté les dépenses des ménages dans les secteurs concernés, notamment la restauration.
L’INSEE estime que la consommation devrait progresser à l’automne avec l’amélioration de la couverture vaccinale. Elle serait inférieure à 1% de son niveau d’avant-crise en septembre. À la fin de l’année, l’écart serait comblé. en 2021. Après la hausse de 1,0% au deuxième trimestre, la consommation des ménages augmenterait de 4,6% au troisième trimestre puis de 1,6% au quatrième. Ainsi, après sa chute historique de 7,2% en 2020, elle rebondirait de 4,5% en 2021. La croissance française accélère sur fond de dépenses publiques très élevées, le déficit devant avoisiner 9% du PIB en 2021. La gestion de la décrue du soutien public sera la question clef des années 2022 et 2023. Pour l’année prochaine, année complexe avec la Présidence de l’Union européenne et un round électoral de premier ordre, la France pourra compter sur les crédits du plan de relance européen. L’assainissement des comptes publics deviendra un sujet sensible certainement à l’automne 2022 quand la Banque Centrale Européenne ralentira sa politique de rachats d’obligations.
Laisser un commentaire