Alors que certains souhaitent une liste commune de la gauche aux élections européennes de 2024, d’autres opposent des différences trop importantes entre les membres de la coalition NUPES sur les sujets européens et internationaux, comme Yannick Jadot mercredi (31 août).
Depuis les élections législatives de juin dernier, La France insoumise (LFI), le Parti socialiste (PS), Europe Ecologie-Les Verts (EELV) et le Parti communiste français (PCF) sont réunis au sein de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (NUPES).
Une alliance que certains verraient bien durer dans les années à venir, mais qui se heurte à l’obstacle des élections européennes de 2024, prochain rendez-vous dans le calendrier électoral français.
Comme à l’époque de la négociation de la NUPES, c’est La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon qui est à l’origine de la proposition. Manuel Bompard, député LFI et négociateur de l’accord électoral de juin 2022, a confirmé qu’une nouvelle alliance en vue des européennes était « un objectif » et qu’il y était favorable.
La différence avec les scrutins successifs de 2022 réside dans les rapports de force entre les partis potentiellement intéressés.
Les écologistes en ordre dispersé
Côté EELV, les violons ne semblent pas être encore tout à fait accordés.
D’une part, le candidat malheureux à l’élection présidentielle Yannick Jadot balaie l’idée d’une gauche unie aux européennes et déclare souhaiter une liste écologiste autonome.
Les différences « avec La France insoumise notamment […] sur l’Europe et la politique internationale » justifieraient de concourir avec des listes distinctes, assurait M. Jadot sur France info mercredi (31 août). Selon lui, la gauche unie aurait « moins d’élus que si on valorise notre diversité », vu le mode de scrutin proportionnel de l’élection européenne.
Mais dans l’aile gauche du parti écologiste, l’alliance n’est pas écartée par principe : la leader du courant radical d’EELV Sandrine Rousseau a indiqué à EURACTIV qu’il était nécessaire de « revoir les équilibres au sein de la NUPES afin que [les écologistes] puissent prendre le leadership au moment des européennes », qui sont « les élections phares de l’écologie ».
En effet, avec 13,5 % aux élections de 2019, la liste EELV menée par Yannick Jadot arrivait en troisième position (derrière le Rassemblement national et Renaissance), mais loin devant les autres partis de gauche – les Insoumis et les socialistes dépassaient de peu les 6 %.
Ainsi, si alliance il devait y avoir, détaille Mme Rousseau, ce serait aux Insoumis de s’aligner sur les positions d’EELV – historiquement fédéraliste – et non pas l’inverse. En tout état de cause, conclut-elle, « la NUPES a levé un espoir, qui est à entretenir ».
Les socialistes sceptiques
Au Parti socialiste, les voix sont aussi parfois discordantes. Le député Jérôme Guedj ne ferme pas la porte à une éventuelle alliance tout en reconnaissant que « la question européenne n’est pas la plus facile, car c’est là où historiquement la gauche se fracture ».
Mais le député socialiste appelle malgré tout à « essayer [de] parvenir » à une union, « a minima avec un socle commun de propositions NUPES et idéalement une liste commune ».
Au contraire, certains considèrent, comme le sénateur PS Rachid Temal, que « les différences sur la politique européenne et internationale […] conduisent à ne pas faire de liste commune avec LFI »pour le scrutin de 2024.
D’autres élus du Parti socialiste, sollicités par EURACTIV, n’ont pas souhaité nous répondre une fois le sujet évoqué, nous laissant comprendre qu’un certain malaise existe face à ces interrogations.
Les communistes ouverts mais pas enthousiastes
Le Parti communiste français est en réalité celui qui a le plus intérêt à sceller une telle alliance. Faute d’un résultat suffisamment élevé (2,5 %), il n’avait fait élire aucun eurodéputé sous son étiquette en 2019.
Mais ils ne se montrent pas pour autant très enthousiastes : pendant l’été, un cadre du parti assurait à EURACTIV que la proposition de LFI était intéressante, mais qu’il était conscient des « différences importantes » qui pouvaient exister notamment avec les Verts et les socialistes.
La porte n’est donc pas fermée par le PCF, surtout à l’égard de LFI, qui serait le mouvement de la NUPES le plus proche sur les questions européennes, mais aussi internationales.
L’union, un casse-tête électoral
Mais l’éventualité d’une union confronte les partis de gauche à des questions et des intérêts contradictoires : d’une part, la maximisation du nombre d’eurodéputés qui seront finalement élus, et d’autre part la survie de l’alliance dans le temps, pour les échéances électorales suivantes.
D’un point de vue strictement arithmétique et électoral, « dans un scrutin proportionnel, les coalitions de partis ont intérêt à partir séparées », explique Mathieu Gallard, directeur de recherche à Ipsos France, contacté par EURACTIV. Une liste commune « pourrait faire fuir des électeurs radicaux qui refusent de voter pour des modérés et inversement ».
Mais se présenter avec des listes distinctes en 2024 risque d’engendrer un effet « contreproductif » pour la coalition, selon M. Gallard : les débats et les programmes pourraient mettre en exergue des différences entre les partis, après s’être unis lors des élections législatives. Cela « peut avoir des conséquences négatives sur la NUPES à l’Assemblée nationale » – et sur les échéances électorales suivantes.
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