Emeutes urbaines dans plusieurs villes de France

Emeutes urbaines dans plusieurs villes de France

Des émeutes urbaines ont lieu chaque nuit depuis deux jours dans plusieurs villes de France après la mort de Nahel, jeune homme de 17 ans tué par un policier lors d’un contrôle routier mardi à Nanterre (Hauts-de-Seine).

Une vidéo qui met en cause les policiers

Le drame s’est produit mardi matin près de la station de RER Nanterre-Préfecture, en banlieue parisienne. Dans un premier temps, des sources policières avaient affirmé qu’un véhicule avait foncé sur deux motards de police.

Mais une vidéo circulant sur les réseaux sociaux, authentifiée par l’AFP, a montré qu’un des deux policiers tenait le conducteur en joue, puis qu’il a tiré à bout portant quand la voiture a redémarré. Dans la vidéo, on entend « tu vas te prendre une balle dans la tête », sans que l’on puisse attribuer cette phrase à quelqu’un en particulier.

La voiture a fini sa course quelques dizaines de mètres plus loin, encastrée dans un poteau. La victime, Nahel M., 17 ans, est décédée peu de temps après avoir été atteinte au thorax. Il était déjà connu de la justice, notamment pour refus d’obtempérer.

Policier mettant en joue le jeune Nahel ©AFP

Nanterre au coeur des émeutes

Des violences ont éclaté à Nanterre, en particulier dans la cité Pablo Picasso. La ville se réveille, jeudi 29 juin, encore groggy de la nuit : une odeur de fumée est ressentie dans une partie de la municipalité, du mobilier urbain ainsi que des voitures ont été détruits.

Un incendie s’est par ailleurs déclaré dans un centre Enedis, rue Montesquieu, a indiqué le distributeur d’électricité. L’incendie a touché une dizaine de véhicules d’intervention qui étaient situés à l’extérieur du bâtiment, dans une cour et il s’est propagé à quelques bureaux du site, a constaté un journaliste de franceinfo sur place. Il est donc « sans conséquence sur la fourniture d’électricité« , affirme Enedis qui précise qu’une enquête est en cours afin de déterminer si cet incendie est d’origine criminelle suite à une intrusion.

Incidents en Ile-de-France et en régions

Une partie de la région parisienne s’est embrasée dans la nuit de mercredi à jeudi, émaillée par d’importantes tensions et dégradations. Dans la soirée de mercredi, des incidents se sont aussi produits dans le reste du pays, à Nice, Toulouse, Lyon ou encore Roubaix.

D’autres, comme à Saint-Étienne, à Lille et à Rennes, ont eu lieu en marge de rassemblements de soutien aux Soulèvements de la Terre, mouvement écologiste récemment dissous.

Mais c’est bien dans les banlieues de Paris où les tensions ont été les plus importantes.

©AFP/EPA-EFE

Scènes de chaos dans toutes les banlieues

Même scènes également à Issy-les-Moulineaux, Meudon et Boulogne-Billancourt, où du mobilier urbain a été incendié, a constaté un journaliste de franceinfo. Selon la préfecture, plusieurs commissariats ont été visés par des feux, ainsi qu’une mairie annexe de Châtenay-Malabry. Le tribunal d’Asnières-sur-Seine a également été visé par un incendie. À Clamart, une rame de tram (T6) a été brûlée à l’arrêt George Pompidou. La ligne T6 ne reprendra pas avant 10 heures, indique France Bleu Paris. 

Des incidents sont aussi survenus à Argenteuil (Val-d’Oise), avec des tirs de mortiers et des feux de poubelle, a appris franceinfo de source policière. À Montreuil (Seine-Saint-Denis), des tirs de mortiers d’artifice ont été lancés sur la mairie, a constaté une journaliste de franceinfo. Un bus a été incendié à Viry-Châtillon (Essonne), indique le maire de la ville à France Bleu Paris. A Fresnes, c’est la prison qui a été attaquée, provoquant le déclenchement de l’alerte sonore générale dans la ville.

Embrasement en régions

Dans le Nord, plusieurs centaines de feux de poubelles et de voitures sont survenus à Lille, Roubaix et Valenciennes, rapporte France Bleu Nord. Plusieurs bâtiments publics, dont la mairie de Mons-en-Baroeul, ont été incendiés. « La mairie et le poste de police municipale ont été complètement détruits« , se désole le maire Rudy Elegeest, soulignant qu’aucun blessé n’est à déplorer. Aux alentours de 23h, « un grand nombre d’individus, extrêmement équipés«  ont commencé à s’attaquer « aux bâtiments publics du centre-ville avec des tirs de mortiers d’artifice », décrit le maire. L’édile déplore des « dégâts absolument considérables » et dénonce les agissements d’une « horde sauvage« . 

À Lille, des tensions ont aussi éclaté dans la soirée, a appris franceinfo de source policière. Les forces de l’ordre ont été caillassées par des manifestants qui s’étaient rassemblés devant la préfecture. Il n’y a pas eu de blessé. 

Dans la Somme, des violences ont éclaté dans la nuit à Amiens. Le réseau de bus Ametis a annoncé qu’aucun bus ne circulera dans les quartiers Etouvie, Amiens Nord et Salamandre jusqu’à nouvel ordre, rapporte France Bleu Picardie. Dans le quartier d’Etouvie, une médiathèque, en cours de construction, a été incendiée et la mairie d’Amiens-Nord a été prise pour cible. 

À Toulouse (Haute-Garonne), 13 personnes ont été interpellées et 20 véhicules brûlés, selon le dernier bilan de la préfecture communiqué à France Bleu Occitanie. Aucun blessé n’est à déploré. Dans un communiqué, le maire Jean-Luc Moudenc « en appelle à la responsabilité de chacun » après les incendies. « Nous souhaitons tous que la lumière soit faite sur les circonstances du décès du jeune Nahel, mais laisser prise à la violence et attiser les colères, qui plus est dans cette période de forte tension ambiante, ne permettra jamais de faire apparaître la vérité« , ajoute-t-il.

Dans le quartier du Mirail, un grand incendie, provoqué par des feux de poubelles, a notamment démarré vers 19 heures, mercredi, rapporte France Bleu Occitanie. Au moins trois voitures ont été brûlées. Une cinquantaine de personnes s’étaient réunies vers 18 heures dans le quartier, avant que la situation ne se tende vers 19 heures. 

Les pompiers de la caserne de Toulouse-Carsalade ont été caillassés lors de leur intervention, tout comme des policiers présents sur place, indiquent les pompiers à France Bleu Occitanie. De nombreux effectifs de police ont été mobilisés, notamment des CRS, qui ont fait usage de gaz lacrymogène.  

Enfin, dans deux quartiers de la ville de Nice (Alpes-Maritimes), des échauffourées ont également éclaté dans la nuit de mercredi à jeudi. Des tirs de mortiers en direction du commissariat des Moulins et dans le quartier de l’Ariane ont été constatés, selon France Bleu Azur. « Je veux condamner avec une extrême fermeté les tirs de mortiers en direction du commissariat Saint-Augustin aux Moulins« , a indiqué sur Twitter le maire de Nice Christian Estrosi, ajoutant qu’ils n’ont « heureusement pas fait de dégâts« .

Mais des tensions avec les pompiers et les représentants des forces de l’ordre ont, aussi, éclaté en Meurthe-et-Moselle, notamment à Vandœuvre-lès-Nancy et Mont-Saint-Martin, indique France Bleu Sud Lorraine. La bibliothèque de Mont-Saint-Martin a été incendiée, l’école maternelle a subi des dégradations et plusieurs véhicules ont été incendiés. A Vandoeuvre, des policiers ont également été visés par des tirs de mortiers d’artifice, selon la préfecture. À Nancy, dans le quartier du Haut-du-Lièvre, des tensions ont éclaté, le bâtiment qui jouxte le poste de police a subi des dégradations, avec un départ de feu.

La nuit a également été très agitée en Moselle avec des tensions dans plusieurs villes du département. Selon les informations de France Bleu Lorraine, des voitures ont été incendiées et du mobilier urbain dégradé dans les quartiers sensibles de plusieurs villes de Moselle, à Metz, Thionville, Fameck, Forbach, Berhen-les-Forbach, Woippy, Uckange, Florange.

A Belfort, des poubelles et des voitures ont été incendiées, dans les quartiers des Résidences et des Glacis. Les pompiers précisent qu’il n’y a eu aucun incident lors de leur intervention. Le calme est revenu aux alentours de 4 heures du matin.

En Bourgogne, dans des quartiers de Dijon, les autorités ont fait état de containers de poubelles incendiés et de tirs de fusées d’artifice. Un véhicule a été incendié et deux autres ont été endommagés, rapporte France Bleu Bourgogne. D’après la préfecture, de nombreux tirs de mortiers ont visé la police et les pompiers. Ces affrontements ont provoqué des blessures légères pour neuf policiers, surtout des acouphènes. Une personne a été interpellée. 

Pour finir, des incidents ont également eu lieu en Bretagne et en Normandie. A Brest, une cinquantaine de jeunes ont allumé des incendies dans plusieurs quartiers selon la préfecture du Finistère, l’un s’est propagé à un commerce, rapporte France Bleu Breizh Izel.

Dans l’agglomération de Caen, au moins sept voitures ont été incendiées. Les policiers ont aussi été visés par des tirs de mortiers d’artifice, mais aucun fonctionnaire n’a été blessé selon les premières informations communiquées ce matin. Dans l’Orne, des voitures ont aussi été détruites par des incendies volontaires.

Regardez l’interview de la députée EELV des Hauts-de-Seine sur TV5MONDE

Marche blanche organisée ce jeudi

Quelques heures avant la multiplication de ces incidents, les appels au calme ont fusé de toutes parts, et les pouvoirs publics ont multiplié les prises de parole pour éviter un embrasement, sans que cela ne semble empêcher les affrontements de la nuit.

La mère de Nahel a appelé dans une vidéo postée sur TikTok à une marche blanche jeudi à 14h00 devant la préfecture des Hauts-de-Seine, tout près des lieux du tir mortel, en exprimant sa « révolte pour (son) fils ».

Ce jeune garçon de 17 ans a été la cible d’un tir à bout portant par un policier, mardi matin lors d’un contrôle routier.

Une vidéo circulant sur les réseaux sociaux a montré qu’un des deux policiers intervenus tenait le jeune conducteur en joue, puis qu’il a tiré à bout portant quand la voiture a redémarré. Mercredi, Emmanuel Macron avait évoqué un acte « inexplicable » et « inexcusable ».

Le drame a ému tout le pays, de nombreuses personnalités ayant réagi ces dernières heures. « Nahel aurait pu être mon petit frère. Et j’ai le cœur brisé quand j’entends sa mère parce que c’est la voix de ma mère que j’entends », a notamment écrit Aurélien Tchouaméni, joueur du Real Madrid et de l’équipe de France de football.

Laisser un commentaire

Laisser un commentaire