Le commissaire européen au Commerce, l’Irlandais Phil Hogan, a démissionné mercredi 26 aout, au soir, emporté par le scandale provoqué par sa participation à un dîner de gala en Irlande en dépit des restrictions sanitaires anti-coronavirus.
La pression s’intensifiait depuis plusieurs jours sur ce poids lourd de la politique irlandaise, dont les excuses répétées et les proclamations de bonne foi n’ont pas réussi à apaiser l’indignation dans son pays.
« J’ai présenté ce soir ma démission comme commissaire européen au Commerce à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen », a indiqué M. Hogan, 60 ans, dans un communiqué.
« Il devenait de plus en plus clair que la controverse concernant ma visite récente en Irlande commençait à détourner l’attention de mon travail comme commissaire européen et discréditerait mon travail dans les mois clés à venir », marqués notamment par les difficiles négociations sur un accord post-Brexit avec le Royaume-Uni, a-t-il ajouté.
Il a renouvelé ses excuses, se défendant cependant une nouvelle fois d’avoir violé les règles sanitaires. « Il est important de dire que je n’ai pas enfreint la loi. Comme représentant public, j’aurais dû être plus rigoureux dans mon respect des consignes Covid », a-t-il insisté.
Ursula von der Leyen a accepté sa démission. « Je respecte sa décision », a-t-elle réagi, se disant « reconnaissante pour son travail inlassable » comme commissaire au Commerce, un des postes les plus en vue de l’Union européenne, que Phil Hogan avait décroché en 2019 après avoir été chargé de l’Agriculture.
Le Premier ministre irlandais Micheal Martin et ses partenaires de coalition ont également pris acte de la démission, estimant que c’était « la mesure correcte à prendre ». Ils avaient précédemment dénoncé des « manquements » aux règles sanitaires, sur lesquels la police a ouvert une enquête.
Téléphone au volant
Sous la pression de la présidente de la Commission européenne, Phil Hogan avait décrit mardi, dans un communiqué de quatre pages, ses faits et geste durant son séjour en Irlande du 31 juillet au 21 août.
Fort d’un test négatif au Covid-19, il s’était défendu d’avoir enfreint la quarantaine de deux semaines à laquelle il était soumis après son arrivée dans le pays.
Il reconnaissait toutefois qu’il « n’aurait pas dû assister à ce dîner », organisé pour les 50 ans du club de golf du Parlement irlandais avec plus de 80 invités, qui a conduit plusieurs personnes à la démission, dont le ministre irlandais de l’Agriculture Dara Calleary.
Ce dîner avait eu lieu peu après une décision des autorités de durcir les restrictions sur les rassemblements, interdisant les réunions de plus de six personnes en intérieur, en raison d’une recrudescence de l’épidémie qui a tué près de 1.800 personnes en Irlande.
Phil Hogan a été également surpris en train de téléphoner au volant par un policier irlandais, deux jours avant ce dîner, ce qu’il a dit regretter.
Mauvais timing
Phil Hogan détenait l’un des postes clés de la Commission européenne. Son départ tombe au plus mauvais moment, alors que les relations commerciales de l’UE avec les Etats-Unis, mais aussi avec la Chine sont particulièrement tendues.
La démission, relativement rare, d’un commissaire est toujours une affaire délicate car elle affecte l’ensemble de l’équilibre géographique et politique sur lequel repose la Commission.
Chaque pays de l’UE dispose d’un poste de commissaire. Et l’équipe de 26 personnes présidée par la conservatrice von der Leyen est le fruit d’un savant dosage entre les principales familles politiques de l’UE, en fonction de leurs résultats aux élections européennes de mai 2019.
Un ancien haut fonctionnaire de la Commission, l’Irlandais David O’Sullivan, 67 ans, pourrait être proposé par Dublin pour remplacer Phil Hogan, selon une source européenne citée mercredi par Politico.
Mais rien ne dit que l’Irlande parviendra à garder le prestigieux poste de commissaire au Commerce qu’un autre pays pourrait convoiter en cas de remaniement de l’équipe.
Dans l’histoire européenne, la démission de la Française Edith Cresson, du poste de commissaire à la Science, Recherche, Education et Formation, accusée de « favoritisme », fut la plus retentissante. Son départ provoqua la démission de l’ensemble de la Commission dirigée par le Luxembourgeois Jacques Santer, du jamais vu.
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