Dans ce podcast, nous recevons Amélia Lakrafi, la députée d’une des plus vastes circonscriptions des Français de l’étranger. Du Cap en Afrique du Sud à Dubaï, la discrète mais ô combien compétente parlementaire exerce son mandat avec passion et engagement.
Ecoutez le podcast avec Amélia Lakrafi
Une francophone dans un espace anglophone
On commence cette interview exclusive avec Amélia Lakrafi en jetant un regard sur sa circonscription géante qui comprend plus de 50 pays, dont la grande majorité ne sont pas francophones.
Et alors qu’en Afrique francophone et ailleurs, on évoque souvent le recul de la France, Amélie Lakrafi se félicite de la dynamique de notre pays et des communautés françaises dans ces pays au fort potentiel économique, culturel et diplomatique.
Mais dans cette vaste région, il y a aussi le futur premier pays francophone, la République Démocratique du Congo (RDC). L’occasion pour nous de revenir sur le voyage d’Emmanuel Macron au début de ce mois de mars. Acteur majeur, « mastodonte » de l’Afrique, Félix Tshisekedi, le chef de l’Etat de la RDC, n’avait pas réservé le meilleur accueil au Président de la République. Amélia Lakrafi, fine connaisseuse de sa circonscription, nous dévoile les dessous de ce rapport diplomatique et ses racines dans la politique locale dont les liens avec le Rwanda.
La fin de la Françafrique ?
Ce voyage fut précédé d’une déclaration du Chef de l’Etat français au Gabon martelant la fin de la Françafrique. Une position à laquelle Amélia Lakrafi adhère, tout en rejetant toute culpabilité, elle approuve d’ailleurs le projet de mémorial. Un avis franc et direct, sans langue de bois, qu’on vous laisse découvrir dans le podcast.
« Nous ne sommes pas comptables des choix politiques faits avant nous ! (…) On ne va pas se flageller toute la vie parce que la France a été un grand colonisateur. »
Amélia Lakrafi – Députée des Français de l’étranger
Le volontariat international
Regardant vers l’avenir, la députée Amélia Lakrafi veut rapprocher les peuples à travers une intensification du Volontariat international. Elle a d’ailleurs présidé un colloque ce vendredi 24 mars à l’Assemblée nationale sur ce thème.
On en profite pour découvrir ce dispositif, si peu connu, ce que la députée déplore, ouvert aux Français, aux citoyens de l’Union européenne et à certains pays francophones en Afrique. Disposant d’un budget annuel de 9 millions, il permet à des jeunes d’aller confronter leur mode de vie, leurs certitudes, à la réalité du terrain. Avec Amélia Lakrafi, on y apprend d’ailleurs que des citoyens de pays africains viennent dans ce cadre découvrir l’Europe et la France en particulier. L’occasion de faire tomber de chaque côté de la Méditerranée les stéréotypes et préjugés !
« Un volontaire malien a été surpris de découvrir que des blancs dormaient aussi dans la rue »
Amélia Lakrafi – Députée des Français de l’étranger
Comme chaque citoyen de notre pays, les jeunes Français de l’étranger ont aussi accès à cette expérience et peuvent ainsi découvrir d’autres pays.
Les communautés françaises de la circonscription
Dans la deuxième partie du podcast, on zoome sur les communautés des Français de l’étranger dispersées sur le vaste territoire de la circonscription d’Amélia Lakrafi. Comme beaucoup, titillés par la curiosité qu’inspire Dubaï, nous avons voulu commencer en évoquant cet émirat : miroir aux alouettes ou véritable opportunité ?
Dubaï : un émirat attractif
Le nombre de Français dans l’émirat explose depuis une décennie avec une intensification ces 5 dernières années. Amélia Lakrafi vous révèle que les émirats attirent de nombreux citoyens pour des raisons pratiques : la météo, la position géographique, etc. Mais aussi et surtout sur ce territoire musulman, nos compatriotes d’origine maghrébine, souvent encore victimes de discriminations en France, accèdent à des emplois qualifiés qu’ils ne décrochent pas dans l’hexagone.
La sécurité est aussi un avantage que met en avant Dubaï, ainsi que sa tolérance religieuse.
« Là bas, personne ne ferme sa maison à clef (…). Les femmes voilées et celles en bikini se croisent à la plage et personne ne se regarde »
Amélia Lakrafi – Députée des Français de l’étranger
L’autre point qui explique ce boom, Amélia Lakrafi nous le relève, c’est la vivacité des services de communication de l’émirat. Pendant la pandémie, les autorités locales ont lancé une grande campagne de communication, profitant de la généralisation du télétravail enclenchée par les mesures liées à la Covid-19 dans les pays occidentaux.
Mais cette qualité de vie a un coût, celui de la liberté ! La députée Amélia Lakrafi s’étonne que les Français opposés à la multiplication des caméras de surveillance, au fichage et autres mesures de contrôle des populations, acceptent le « flicage » intensif des autorités doubaïotes.
Liban : « un pays en demande d’ingérence »
Autre pays qui capte les projecteurs, le Liban. Malheureusement pour des raisons différentes, comme vous le savez, ce pays, un grand ami de la France, où les binationaux sont très nombreux, traverse une crise économique et financière sans aucune mesure.
Pendant que les négociations politiques s’enlisent, le Liban s’enfonce un peu plus chaque jour dans une grave crise économique et sociale déclenchée en 2019, dont la sortie ne pourra qu’être lente et douloureuse. « L’activité économique semble s’être stabilisée en 2022, en raison d’une certaine reprise du tourisme, d’une poursuite du désendettement du secteur privé et des transferts de fonds toujours élevés de l’étranger », mais l’économie du pays reste malgré tout « profondément déprimée », analyse le FMI dans une déclaration publiée jeudi 23 mars 2023 au terme d’une mission de plusieurs jours dans le pays.
Mais comme nous le rappelle la députée Amélia Lakrafi, la France se tient toujours aux côtés des Libanais. Les établissements français sur place ont reçu des enveloppes exceptionnelles pour maintenir l’accès à l’Education française et procéder aux travaux de sécurisation nécessaires (en octobre 2021, des tirs avaient atteint la cour du Lycée géré par La Mission Laïque à Beyrouth). Mais les établissements libanais aussi ont été soutenus avec le centre de crise du Quai d’Orsay, un consulat impliqué et des ONG.
La mobilisation de ces acteurs est allée bien au-delà. Médicaments, nourritures, matériels, ont été envoyés. Mais les autorités françaises ont facilité le retour des binationaux et accordé de nombreux visas à leurs proches non-français.
Cependant, pour ceux encore sur place, la situation est toujours difficile, la chute de la Livre libanaise ayant entraîné une chute du pouvoir d’achat sans aucune mesure. Pour autant, la solution n’est pas forcément dans un retour en France, notre pays étant aussi confronté à ses difficultés, sans famille ou projet dans l’hexagone la députée Amélia Lakrafi déconseille le retour en France.
La retraite et les Français de l’étranger
Enfin dans la dernière partie du podcast, on s’attarde sur les sujets d’actualité qui touchent tous les Français de l’étranger. Mais pas seulement, comme dans le cas du premier thème, la réforme des retraites, tous les Français sont concernés.
Si on a peu parlé de la situation des expatriés, aux retraites complexes à calculer, dépendant de nombreuses dispositions légales et accords de la France avec le pays où a travaillé la ou le Français de l’étranger, c’est tout simplement pour Amélia Lakrafi que l’enjeu est de « sauver notre système par répartition » et non de résoudre des problèmes spécifiques.
Naturellement, elle soutient la proposition du gouvernement et regrette que « les oppositions se soient cristallisées sur le passage à 64 ans. »
« En 2030, on aura 20 millions de retraités. On ne peut pas passer de 10 millions à 20 millions de retraités sans rien faire quand le nombre d’actifs ne croit pas aussi vite. On n’a pas besoin d’avoir fait des études supérieurs pour reconnaître qu’il y a un problème. »
Amélia Lakrafi – Députée des Français de l’étranger
Dans cette interview, elle revient sur les dernières semaines mouvementées que vient de traverser l’Assemblée nationale.
La débancarisation
Deuxième thème qu’on aborde, c’est celui de la débancarisation des Français de l’étranger. Un thème transversal pour tous ceux qui vivent hors de France et dont Amélia Lakrafi s’est emparé, avec ses collègues de l’Assemblée nationale. Elle travaille ainsi avec le ministère de l’Economie, la fédération des banques françaises et avec la Banque de France, afin de trouver une solution pérenne pour faire appliquer le droit aux comptes.
« Se retrouver sans banque c’est un stress ! «
Amélia Lakrafi – Députée des Français de l’étranger
Au cours du premier mandat, la majorité présidentielle avait déjà renforcé ce droit aux comptes tout en simplifiant les démarches mais de nombreux écueils sont encore présents. Ainsi les fermetures de comptes ou les refus d’ouverture se multiplient toujours.
Un sujet qui nous amène logiquement sur la problématique de la numérisation des états civils qui est toujours laborieuse et qui complique, un peu plus, les démarches auprès des banques mais pas seulement. Pourtant c’était un engagement d’Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle, mais comme le Pass culture et la résidence de repli, ces projets ne sont pour l’instant pas prioritaires.
Amélia Lakrafi nous explique qu’elle tient, comme ses collègues, à ce que les promesses soient tenues. Un engagement que peu de politiques prennent ! On a donc pris rendez-vous avec elle pour faire un point sur ces dossiers dans quelques mois. A suivre !
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