14 juillet : la fête à zéro

14 juillet : la fête à zéro

Ce n’est pas un énarque du terroir qu’il nous faut, mais un exorciste : Notre-Dame qui flambe, le défilé du 14 juillet qui flanche. Pourvu qu’elle tienne, la Tour Eiffel, avec cette scoumoune, un coup de vent l’emporterait.

Dans le monde d’avant, le 14 juillet à l’Elysée, c’était bien jusqu’à la caricature. Des ministres, des archevêques, des militaires, des enfants, des journalistes, comme un cocktail à la Résidence de l’Ambassadeur, en mieux, parce qu’il y avait justement les enfants et le Président, avec son nuage de courtisans comme la Reine des abeilles.

Dans le monde d’aujourd’hui, sans défilé, il y a toujours des ministres et des journalistes, mais pas d’enfants -trop dangereux- remplacés par des médecins, infirmiers, administrateurs du Covid et personnels de santé. Héros tous les soirs applaudis à vingt heures. On aurait pu ajouter les pompiers, et pourquoi pas les malades, les rescapés, et aussi les pompes funèbres pour donner un peu d’allure au cortège à la place des chars de combat.

Ma tante me disait : « c’était mieux pendant la guerre, au moins on pouvait sortir avant le couvre feu. »

Et bien non ! Le 14 juillet c’est la fête.

La Garden party de l’Elysée, si on veut, mais surtout les huiles en plein soleil levant le nez vers la Patrouille de France, le feu d’artifice et le bal des pompiers. A Tegucigalpa, avec la complicité du maire, j’avais organisé un bal populaire sur la place centrale, des affiches dans toute la ville et des petits drapeaux français. Succès total. Même les Américains n’avaient pas çà. L’année suivante, une entreprise française avait construit une Tour Eiffel miniature, elle est encore sur une place : la place de Paris. Toujours la fête.

La fête, c’est comme les Saturnales, le Carnaval, ou la saint Jean : on tape des pieds (on danse) et on crie (on chante) pour chasser les démons.

La France doit chasser ses démons. Rarement notre pays n’a été si morose. Ma tante me disait : « c’était mieux pendant la guerre, au moins on pouvait sortir avant le couvre feu. ». Le Président a nommé Monsieur Déconfinement Premier ministre. Il était temps de déconfiner. Tout, radicalement. Du sol au plafond. De l’air ! Tout est à refaire. Révolution, dit le 14 juillet !

Révolution ? On y est.

Trois entreprises privées américaines ont été choisies pour créer une base humaine sur la lune. Ellon Musk, autre lunaire, porte Tesla, sa firme de voiture électrique, jusqu’à devenir la première société automobile mondiale par capitalisation, devant Toyota. L’ONU, s’inquiète de la demande mondiale en batteries électriques, qui devrait être multipliée par dix en raison de la transition énergétique. Résultat, au Congo, 40.000 enfants extraient le cobalt, nécessaire aux batteries, dans des mines, (le Congo représente 2/3 de la production mondiale). Le Congo promet d’interdire le travail infantile en 2025. D’un coté la lune, de l’autre la mine.

Un monde de plus en plus petit et à ce point déchiré. Où toutes les contradictions, les aberrations, les anomalies coexistent. Où l’humanité est à la fois unie par force, comme le montre le covid, et où l’humanisme décroit.

Et la France ? Elle compte.

Sinon, on ne lui en voudrait pas tant. Rien que cette semaine, un Turc l’insulte, un Américain et un Chinois la menacent, un Algérien lui demande encore des excuses. Rarement elle a semblé aussi isolée en termes diplomatique.

Et rarement on a eu autant besoin de la France pour rassembler les partisans du droit plutôt que de la force. Même s’il faut aussi de la force pour cela. D’autant qu’on la menacerait moins si elle était plus forte. Elle pourrait l’être. A condition de chasser ses démons. La peur d’abord. Les plaintes et pleurnicheries ensuite. Rétrécissement moral et mental. Les Russes et les Turcs sont bien plus faibles que nous, ils voudraient faire la loi en Méditerranée.

Rares sont les pays pour lesquels la fête nationale est un message universel. C’est pourquoi on ne peut pas l’annuler.

Il faut revenir à la fête, à son universalité, sa gaieté, son espérance. Invitez vos voisins et amis expatriés comme vous. La joie est la meilleure façon de chasser ses démons. S’ouvrir sur le monde, et ouvrir le monde à la France, c’est une façon d’être fidèle au 14 juillet. La fête est à zéro ? Il faut donc repartir de zéro.

 

Laurent Dominati

A.Ambassadeur de France

A. Député de Paris

Pdg de la société éditrice du site « lesfrancais.press »

 

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