Vérités en deçà des Pyrénées

Vérités en deçà des Pyrénées

Gestion de crise, les chiffres n’expliquent pas tout.

L’état d’urgence justifié par la crise sanitaire a donné au Gouvernement, des pouvoirs sans précédent en période de paix, que ce soit en matière de sécurité, de santé ou d’économie.

Présenté le mardi 28 avril dernier par le Premier Ministre Édouard Philippe, le plan de déconfinement prévoit un retour à la normale très réglementé. Ce plan sera complété d’ici l’automne d’un programme de relance qui devrait s’articuler avec celui que l’ensemble des États européens sont censés préparer. Les statistiques de l’épidémie sont très délicates à utiliser car la comptabilisation des décès s’effectue de manière différente selon les Etats.

Au-delà des chiffres, il est admis que l’épidémie a été plus violente en Italie, en Espagne, en Belgique, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni qu’en Allemagne ainsi que dans les pays d’Europe du Nord. Certains pays à forte mortalité ont opté pour des confinements très sévères quand des pays moins touchés ont choisi des restrictions d’activité plus légères. Il est admis que les décisions de distanciation sociale prises très rapidement ont conduit à limiter la mortalité.

Au-delà de ces quelques considérations, les analyses sur le niveau des dépenses de publiques et sur les modes d’organisation ne permettent guère d’apporter des conclusions définitives.

La dépense publique ne fait pas tout

Ce ne sont pas les États qui ont les plus forts taux de dépenses publiques et notamment de santé qui obtiennent les meilleurs résultats. A 56% du PIB, le taux de dépenses publiques en France était le plus élevé d’Europe. Avec la crise, ce taux devrait dépasser 60 % du PIB. En moyenne, ce taux était de 46,7% du produit intérieur brut (PIB) au sein de l’Union européenne en 2018, de 48% en Italie, et de 44% en Allemagne. A contrario, l’Espagne avec un taux de 41% est en-dessous de la moyenne européenne.

Les déficits publics n’ont pas un lien direct avec la situation sanitaire ; ils traduisent néanmoins une capacité à bien gérer les ressources publiques. Les pays les plus vertueux, parfois accusés de l’être même trop, comme l’Allemagne ou les Pays Bas, ont un meilleur bilan. Les Etats comme la France, l’Espagne ou l’Italie en indélicatesse avec leur gestion publique ont été ceux qui ont connu des taux de mortalité élevé. Au-delà du montant des déficits, c’est peut être l’organisation des systèmes de santé et de prévention qui est en cause.

La proportion des dépenses de santé n’a pas d’incidence directe sur la mortalité constatée pour le covid-19. Ainsi, les États-Unis dont le taux de mortalité au covid-19 est élevé, est également le pays de l’OCDE qui dépense le plus en matière de santé. Pour expliquer ce piètre résultat, l’importance des inégalités aux États-Unis est mise en avant. Cette explication ne tient pas, en revanche, pour la France qui consacre 12% du PIB aux dépenses de santé avec un des plus faibles restes à charge pour les ménages au sein de l’OCDE.

Plus de lits, mais surtout moins d’admissions.

Le nombre de décès en France serait la conséquence de l’insuffisance du nombre de lits d’hôpitaux en particulier en soins intensifs. Depuis une dizaine d’années, notre pays a privilégié les soins ambulatoires et réduit assez drastiquement le nombre de lits. Au sein des pays européens qui enregistrent jusqu’à maintenant de faibles taux de mortalité au covid-19, les établissements de santé n’ont pas été saturés à cause du grand nombre de lits disponibles mais en raison d’un nombre plus faible d’admissions. En Allemagne, les autorités ont même décidé de réduire, fin avril, de 25 % le nombre de lits destinés au covid-19 en raison de leur inutilisation.

Décentralisation n’est pas désorganisation

Le nombre élevé des décès en Italie a été mis sur le compte du caractère décentralisé du système de santé. En Allemagne, la santé est de la compétence des Länder sans que cela ait nui à l’efficacité dans la lutte contre le covid-19. En France, le système est centralisé. La question ne serait pas la nature fédérale ou centralisée du système de santé mais celle de sa capacité d’adaptation. L’organisation du système de santé est complexe avec la présence d’un grand nombre d’acteurs communiquant et coopérant avec difficulté sous l’autorité hégémonique de l’État.

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