Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance de la République française, et Vincent Van Peteghem, ministre des Finances du Royaume de Belgique, ont signé une nouvelle convention fiscale bilatérale le mardi 09 novembre. Plus de 250 000 Français vivent en Belgique tandis que 100 000 frontaliers travaillent et habitent des deux côtés de la frontière, l’enjeu est donc important pour les deux pays. Les nouvelles règles s’appliqueront en 2023.
Cette nouvelle convention modernise les règles prévues par la convention, en vigueur depuis le 10 mars 1964, qui n’étaient plus adaptées aux derniers standards internationaux, notamment les avancées du projet « BEPS » de l’OCDE (érosion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices), auquel les deux Etats sont attachés.
Concrètement, dès le premier janvier 2023 les nouvelles dispositions vont avoir de lourdes conséquences pour les résidents belges (Belges ou Français) tant sur les revenus issus de l’immobilier et que pour ceux tirés des actions et autres placements.
Tout l’immobilier taxé en France
Alors qu’en Belgique, la taxation sur les biens immobiliers est quasiment inexistante (des évolutions sont en cours suite à une décision de la cour européenne), en France celle-ci est lourde. Afin de l’alléger, les Sociétés civiles immobilières ont été créées.
La SCI permet de profiter de nombreux avantages tels qu’une gestion et transmission facilitées. En effet, créer une SCI offre la possibilité de confier la gestion du patrimoine immobilier à une personne unique afin d’éviter les conflits familiaux liés à une mésentente. De plus, elle garantit la pérennité du patrimoine sur plusieurs générations. La SCI exclut la vente forcée du bien. L’associé qui souhaite partir peut seulement vendre ses parts sociales aux associés. S’il souhaite vendre ses parts à un tiers , il devra obtenir l’agrément préalable des autres associés. La SCI permet également de démembrer la propriété des parts de façon à affecter aux parts sociales des droits différents. La nue-propriété confère les droits politiques relatifs à la gestion alors que l’usufruit donne la jouissance du bien, dont les revenus.
Du côté belge de telles sociétés n’existent pas. Se basant sur la convention fiscale de 1964, les revenus tirés de telles sociétés n’étaient donc pas soumis à l’impôt sur la plus-value immobilière en France (qui peut atteindre 19%). La Belgique ignorant l’assimilation fiscale française, considérait que les revenus distribués par la SCI, société disposant de la personnalité juridique, devaient être considérés comme des dividendes visés à l’article 15 de la convention préventive de la double imposition de 1964 qui attribue le pouvoir d’imposition à l’Etat de résidence du bénéficiaire des dividendes (la Belgique). Les revenus tirés étaient donc soumis à l’imposition belge. Ce qui n’était pas forcément un avantage jusqu’en 2021, nous aborderons ce point dans la deuxième partie de l’article.
Imposition par la France de l’immobilier détenu en propre ou en société
Ainsi, la nouvelle convention prévoit une clause qui confère à l’État où les immeubles sont situés le pouvoir d’imposer les gains de cession d’actions de sociétés à prépondérance immobilière.
Concrètement, « dès l’entrée en vigueur de la nouvelle CPDI, qui devrait intervenir en 2023, la France pourra taxer les plus-values de cession de parts de sociétés immobilières françaises par des résidents belges », explique Denis-Emmanuel Philippe, avocat-associé chez Bloom, au quotidien belge L’Echo, qui estime « considérable » l’impact que cela va avoir sur les nombreux particuliers et entreprises belges qui détiennent de l’immobilier en France au travers d’une société.
Les dividendes français plus taxés que les belges
La nouvelle convention fiscale entre la Belgique et la France réserve une autre mauvaise surprise aux investisseurs résidant en Belgique qui détiennent des actions de sociétés françaises.
De fait, la disposition relative à la quotité forfaitaire d’impôt étranger (QFIE) a disparu. Or, c’est sur base de cette disposition que le fisc accepte (après une longue bataille juridique), depuis 2021, de déduire, à hauteur de 15%, le précompte sur le dividende payé en France du précompte mobilier payable en Belgique. Ainsi, le dividende français n’est plus frappé d’un double précompte, il est même moins taxé qu’un dividende belge.
Mais cet avantage va disparaitre dès 2023 ! Dès l’entrée en vigueur du texte (au plus tôt au 1er janvier 2023), pour un dividende français de 100 euros, la France prélèvera sa part de 12,8%. Sur les 87,2 euros qui passent la frontière, la Belgique prélèvera le précompte mobilier de 30%, soit 26,16 euros. Au final, sur un dividende de 100 euros, il restera 61,04 euros à l’investisseur-contribuable (contre 70 euros s’il s’agit d’un dividende d’action d’une société belge).
Entrée en vigueur
L’entrée en vigueur du nouveau texte interviendra à l’issue du processus de ratification législatif à venir et au plus tôt le 1er janvier 2023.
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