Placé « sous régime de protection juridique », Jean-Marie Le Pen, 95 ans, pourrait échapper à son procès

Placé « sous régime de protection juridique », Jean-Marie Le Pen, 95 ans, pourrait échapper à son procès

Jean-Marie Le Pen, 95 ans, a été placé « sous régime de protection juridique », une mesure qui pourrait compromettre la participation du « Menhir » à son procès, prévu à l’automne, dans l’affaire des assistants parlementaires européens.

L’ancien président du Front national (rebaptisé RN) a été placé « sous régime de protection juridique », a indiqué mercredi (3 avril) le vice-président du RN Louis Aliot.

Il fait l’objet depuis mi-février d’« un mandat de protection future », a détaillé à l’AFP son avocat, Me François Wagner, confirmant une information de RMC.

Cette disposition civile, comparable à une tutelle, a été activée sur demande de la famille par le tribunal de proximité de Puteaux (Hauts-de Seine), après une expertise médicale constatant l’inaptitude de Jean-Marie Le Pen.

Elle fait de ses trois filles – Marie-Caroline, Yann et Marine Le Pen – ses mandataires, leur permettant de réaliser divers actes au nom de leur père, seules ou de concert.

Selon plusieurs de ses proches, Jean-Marie Le Pen a vu sa santé largement décliner depuis un accident cardiaque survenu en avril 2023.

Désormais, la question de sa capacité à participer à son procès dans l’affaire des assistants d’eurodéputés, prévu à partir du 30 septembre, est posée.

« Je pense que le tribunal devra prononcer une mesure constatant qu’il ne peut ni se rendre, ni témoigner, ni participer à ce procès », a considéré mercredi sur BFMTV/RMC Louis Aliot, également poursuivi dans ce dossier.

Le tribunal correctionnel de Paris doit se prononcer sur ce point le 3 juillet, après avis d’experts médicaux.

« M. Le Pen ne peut plus se déplacer et ses facultés sont considérablement altérées », avait indiqué au tribunal Me François Wagner, lors d’une audience préparatoire.

Si l’activation du mandat de protection future n’emporte pas automatiquement l’impossibilité de comparaître, il en constitue toutefois un indice sur l’état de santé.

Les magistrats vont devoir constater à la fois l’incapacité de se déplacer de Jean-Marie Le Pen, mais également « son absence de capacité à pouvoir appréhender les charges », a expliqué une source judiciaire.

Le tribunal pourrait ainsi constater que Jean-Marie Le Pen ne peut assurer pleinement sa défense et ordonner la « disjonction » de son cas du reste du dossier, ce qui le renverrait à un procès séparé, sine die, dans l’attente d’un illusoire rétablissement.

Jean-Marie Le Pen
Désormais, la question de sa capacité à participer à son procès dans l'affaire des assistants d'eurodéputés, prévu à partir du 30 septembre, est posée. [JULIEN DE ROSA/EPA-EFE]

Défense « entravée » des autres prévenus

Cette hypothèse d’un procès principal sans Jean-Marie Le Pen complexifierait encore davantage un dossier déjà tentaculaire.

Parmi les prévenus, outre l’ancien président du Front national, figurent Marine Le Pen, Louis Aliot, aujourd’hui vice-président du RN et maire de Perpignan, l’ex-numéro 2 du parti Bruno Gollnisch, le vice-président exécutif de Reconquête! Nicolas Bay, l’ex-trésorier du FN Wallerand de Saint-Just ou encore le député et porte-parole du RN Julien Odoul.

L’ex-eurodéputé Jean-François Jalkh est également visé, mais lui aussi pourrait faire l’objet d’une disjonction de son cas, pour des raisons de santé.

Au total, une dizaine de personnes ayant été élues eurodéputés sur des listes anciennement Front national, douze autres ayant été leurs assistants parlementaires, ainsi que quatre collaborateurs du parti doivent être jugés.

Mais, si Jean-Marie Le Pen et Jean-François Jalkh devaient finalement ne pas comparaître, la défense de nombreux prévenus – à commencer par celles de leurs assistants – pourrait être « entravée », ont souligné plusieurs sources proches du dossier, en mettant en exergue « l’indivisibilité des poursuites ».

L’enquête avait débuté en mars 2015. Le Parlement européen avait annoncé avoir saisi l’office anti-fraude de l’UE d’éventuelles irrégularités commises par le Front national concernant des salaires versés à des assistants parlementaires.

Les magistrats soupçonnent le parti d’extrême droite d’avoir « de manière concertée et délibérée » mis en place un « système de détournement » des enveloppes (21 000 euros mensuels) allouées par l’Union européenne à chaque député pour rémunérer des assistants parlementaires.

Ces derniers auraient travaillé en réalité tout ou partie pour le FN, lui permettant ainsi des économies substantielles de salaires.

Le Parlement européen, partie civile, avait évalué en 2018 son préjudice à 6,8 millions d’euros pour les années 2009 à 2017.

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