La reprise économique en France est manifeste. La croissance pourrait dépasser 6 % cette année, un niveau jamais atteint depuis 1973. Ce résultat, s’il est à mettre au crédit de la bonne résilience de nos entreprises, se doit néanmoins d’être relativisé car il est en grande partie la conséquence du recul historique du PIB en 2020, un des plus importants de l’OCDE.
La France a été plus durement frappée par l’épidémie que ses partenaires. Elle a connu un nombre de décès plus élevé que la moyenne. Le secteur des services jouant un rôle central dans son économie a été lourdement entravé par trois confinements ; le tourisme, en particulier international, ayant été réduit à néant ou presque.
Le soutien massif de l’État avec le chômage partiel, le fonds de solidarité et les prêts garantis ont permis tout à la fois de maintenir le pouvoir d’achat des ménages et de limiter les faillites d’entreprises. Il n’y a jamais eu aussi peu de défaillances en 2020 que lors de ces cinquante dernières années. Avec la multiplication des plans de relance, les différents secteurs d’activité ont renoué, fort logiquement, avec l’expansion qui s’accompagne même de goulets d’étranglement, en particulier en ce qui concerne les microprocesseurs et la main-d’œuvre.
Les faiblesses structurelles de l’économie française s’accentuent
Au-delà des statistiques encourageantes, l’épidémie a révélé avec encore plus de netteté les faiblesses structurelles de l’économie française, faiblesses qui loin de se résorber s’accentuent. Le déficit de la balance commerciale n’en finit pas de s’aggraver avec le retour à la normale de la consommation. L’industrie qui n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant-crise et qui est très loin de celui d’avant 2008, est en voie de marginalisation. L’aéronautique a longtemps masqué l’absence de renouvellement et la perte de compétitivité de ce secteur. L’automobile ou encore les laboratoires pharmaceutiques, longtemps fleurons de notre économie, ont perdu de leur lustre.
Après avoir raté le tournant de l’électronique et de l’informatique, la France semble également manquer celui des techniques de l’information et de la communication. Pendant des années, le débat s’est focalisé sur le coût du travail pour expliquer la perte de compétitivité.
Transfert des coûts salariaux sur la dette de l’Etat
Depuis le début des années 1990, les gouvernements de droite et de gauche ont mis en œuvre des politiques d’exonération des charges sociales centrées sur les bas salaires. Elles ont abouti à transférer une part croissante des coûts salariaux sur la dette de l’État et des régimes sociaux. Les contribuables et les épargnants ont été appelés à financer les salariés sous couvert d’un complexe processus de socialisation des revenus. Ces politiques ont échoué tant pour la réduction du chômage que pour la sauvegarde de l’outil industriel. Elles ont été, sans nul doute, contreproductives. Elles n’ont pas encouragé les entreprises à accroître leur budget de recherche et développement, à réaliser des gains de productivité et à monter en gamme. Elles ont ainsi pénalisé l’industrie en la maintenant sur le créneau de la gamme moyenne quand l’Allemagne faisait le pari gagnant du haut de gamme. Elles ont également conduit à un nivellement des salaires vers le bas, toute augmentation pouvant amener à la perte des exonérations sociales.
L’industrie du luxe française a conforté sa première place au niveau mondial en jouant sur l’innovation et sur les compétences de ses salariés. Le retour de l’industrie en France ne s’effectuera pas d’un coup de baguette magique. Il exige de la persévérance, un programme de revalorisation des filières d’enseignement technique et scientifique ainsi qu’un effort important en matière de recherche. Il suppose avant tout un changement d’état d’esprit vis-à-vis du progrès, de la science qui doivent être perçus comme des moteurs d’une croissance plus durable que nous appelons tous de nos vœux.
Laisser un commentaire