Les autorités maliennes, dominées par les militaires, ont décidé d’expulser l’ambassadeur de France, a annoncé, lundi 31 janvier, un communiqué lu à la télévision d’Etat.
Des coups d’Etat en cascade
Au Mali, après un mois de consultation nationale, les Assises de la refondation ont recommandé une prolongation de la transition de six mois à cinq ans, sans fixer une date pour les élections. Des conclusions qui signifient la prolongation de la junte au pouvoir.
Ce qui fait dire à plus d’un qu’après avoir renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) par un coup d’État en août 2020 et déposé Bah N’Daw (militaire, président de la transition de septembre 2020 à mai 2021, écarté par des proches du colonel Goïta), le colonel Assimi Goïta perpétue ainsi son troisième coup de force à travers l’organisation de ces Assises nationales, dont l’une des recommandations phares est la prolongation de la durée de la transition.
La France avait pourtant fini par taper du poing sur la table. En réprobation aux deux coups d’Etat qui ont conduit un général de l’armée à prendre la tête de l’Etat dans l’attente des élections, l’opération Barkhane avait été suspendue cet été pour finalement reprendre avant que le président français Emmanuel Macron décide une « transformation profonde » de la présence militaire française au Sahel, et la mise en place d’une alliance internationale antidjihadiste dans la région.
Face au refus de mettre en place un dispositif démocratique par le colonel Assimi Goïta, l’ambassadeur de France Joël Meyer, en poste depuis 2018, n’a pas hésité à publiquement s’opposer aux décisions de la junte.
Le combat contre les djihadistes noyauté par les Russes
Une junte, qui sentant la relation avec la France se fragiliser, a décidé de faire appel à des mercenaires russes pour s’assurer la maîtrise du territoire malien pourtant régulièrement en proie aux actes des islamistes.
Ainsi une dimension supplémentaire vient s’ajouter à la crise au Sahel avec l’arrivée ces derniers jours d’hommes en armes russes au Mali, qui viennent de bâtir leurs premiers camps. Des militaires selon Bamako, des mercenaires du groupe Wagner selon Paris et ses alliés, le conflit dans la région, qui se nourrissait de tensions religieuses, communautaires, économiques et environnementales, devient également objet de rivalités internationales.
En effet, les Russes n’hésitent pas à propager l’idée que la France désire envahir le Mali avec l’Otan. Un discours qui vient comme en écho à la situation en Ukraine. Ces discours finissent par faire mouche auprès d’une population peu habituée aux ficelles de la géopolitique. Les Français qui restent sur place (beaucoup ont quitté le pays au cours des deux dernières années) sont de plus en plus inquiets pour leur sécurité comme nous le raconte Claude (son prénom a été changé) qui travaille pour la France.
« La tension est vive aux abords des bâtiments officiels français ou à l’entrée des quartiers où vivent les occidentaux. On peut régulièrement à notre passage entendre des « A bas la France ! A mort les Français »
Claude (le prénom a été modifié), employé consulaire au Mali
L’ambassadeur expulsé, quid des forces militaires ?
Neuf ans après le lancement de l’opération Barkhane, les difficultés s’accumulent. Il y a le coût humain et financier, mais aussi le risque de s’enliser. Les violences djihadistes perdurent, le sentiment anti-français a gagné du terrain et la France a peiné à mobiliser les Européens sur le terrain malien. A cela se rajoutent donc la présence d’un gouvernement illégitime sur place, la pression russe et désormais l’expulsion de notre ambassadeur.
L’expulsion de l’ambassadeur de France au Mali, Joël Meyer, 60 ans, « fait suite aux propos hostiles et outragés du ministre français de l’Europe et des affaires étrangères tenus récemment, à la récurrence de tels propos par les autorités françaises à l’égard des autorités maliennes en dépit des protestations maintes fois élevées », dit le communiqué lu à la télévision malienne, canal de communication privilégié des autorités.
La junte, qui entend se maintenir plusieurs années à la direction du Mali, s’est braquée en invoquant la souveraineté nationale. Elle vante aussi la qualité de sa coopération avec la Russie. Elle a déjà demandé la révision des accords de défense avec la France. Le ministre des affaires étrangères malien, Abdoulaye Diop, avait prévenu vendredi que son pays n’excluait « rien » dans ses relations avec la France, y compris une dénonciation de ces accords qui mettraient de fait immédiatement fin au déploiement de nos troupes sur place.
Dans ces conditions, est-ce que des Français doivent continuer à risquer leur vie pour un pays qui ne veut plus de nous ? Aujourd’hui c’est la Russie comme hier dans d’autres pays du continent ce fut la Chine… Les Africains voient dans l’Européen l’héritier des colonisateurs des deux siècles précédents mais ne voient pas l’impérialisme de ces deux pays continents. Ils sont nombreux à regretter les yuans chinois, qu’en sera-t-il pour les fusils russes ?
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