La Commission européenne a déjà promis de doubler sa flotte dans les années à venir. En plus des 12 avions et de l’hélicoptère européens de la réserve RescUE, 12 nouveaux avions devraient être opérationnels en 2029.
Fin de mission pour les 361 pompiers polonais, allemands, autrichiens, roumains qui ont lutté pendant près d’une semaine avec leurs homologues français sur le site de Landiras (Gironde), où 7400 hectares de pins furent anéantis entre le 9 et le 14 août.
Par deux fois cet été, la France a fait appel au mécanisme de protection civile de l’UE, créé en 2001. La première fois le 14 juillet – avec des avions fournis par la Grèce, puis l’Italie -, et la seconde fois le 9 août, avec l’arrivée du contingent européen.
Outre la France, la Slovénie, le Portugal ou encore l’Albanie ont eux aussi déclenché le processus d’aide durant l’été. « Le mécanisme de protection civile de l’UE a été activé neuf fois par cinq pays, avec un degré de solidarité manifesté par les États membres de l’UE sans précédent », s’est félicité le commissaire européen chargé de la gestion des crises Jansez Lenarčič.
29 avions, huit hélicoptères, près de 400 pompiers et plus de 100 véhicules ont ainsi pu être déployés à destination des pays de l’Union dont les moyens nationaux étaient insuffisants. En France, au plus fort de la crise en Gironde, un tiers des pompiers luttant contre les feux et la moitié de la flotte française de Canadairs provenaient de pays étrangers. La France a en effet bénéficié de 6 avions Canadairs de la réserve européenne RescUE sur les 12 qu’elle possède aujourd’hui.
Mobilisation forte et rapide
Pour les pouvoirs publics français et européens, ces interventions montrent qu’une véritable « solidarité européenne est à l’œuvre » comme l’exprimait Emmanuel Macron dans un tweet le 11 août dernier.
« Il faut noter la forte et rapide mobilisation des 400 pompiers européens. Les Roumains sont arrivés en 15 heures sur le théâtre des opérations ! » confie à EURACTIV France Adina Revol, porte-parole de la Commission européenne en France. Cela montre un aspect concret et humain de l’Europe. Sans compter qu’il n’y a eu aucune perte de vie humaine ».
Autre motif de satisfaction pour Bruxelles, le service de cartographie d’urgence par satellite Copernicus de l’UE. Des images très précises ont pu aider les autorités à identifier les zones brûlées, les foyers actifs ou encore les zones d’habitations à protéger. Le service a été activé 46 fois par 15 pays, dont la France.
Globalement, le personnel politique a bien accueilli la réaction européenne, y compris dans l’opposition qui pointait surtout le manque de moyens des pompiers français depuis de nombreux mois.
Sur les réseaux sociaux, l’on déplore également l’absence de réintégration des 5 000 pompiers français non-vaccinés contre la Covid, ce d’autant plus que leurs homologues européens sont rentrés sur le territoire avec un simple test négatif, sans obligation vaccinale.
La cellule de vérification de Libération CheckNews admet qu’il est par exemple impossible de connaître la situation vaccinale des pompiers allemands « pour des raisons de protection des données ».
24 avions européens en 2029
Pour Jean-Frédéric Biscay, vice-président du syndicat national des pompiers Avenir Secours, il est encore trop tôt pour faire un bilan de l’intervention européenne, mais il reconnaît que le dispositif a été « vertueux ». La « mutualisation » des équipes est indispensable, et va devoir s’accentuer selon lui.
« Avec le réchauffement climatique, nous avons de nombreux feux en simultané – en même temps en Gironde et dans le Sud de la France cet été -, avec des vitesses de propagation importantes. Nous avons atteint nos limites de moyens terrestres et aériens », assure le lieutenant-colonel à EURACTIV.
La Commission européenne a déjà promis de doubler sa flotte dans les années à venir. En plus des 12 avions et de l’hélicoptère européens de RescUE, déjà présents en Croatie, en France, en Grèce, en Italie, en Espagne et en Suède, 12 nouveaux avions devraient être opérationnels en 2029. Deux avions seront localisés au Portugal, deux en Espagne, même chose en France (dès 2026), en Italie, en Croatie et en Grèce.
« Ces avions appartiendront à chaque pays hôte, mais sont financés à 100% par l’UE qui organisera la coordination européenne des opérations. Les pilotes seront fournis par le pays hôte mais l’UE financera le personnel » détaille Adina Revol.
Selon la porte-parole de la Commission, bien que les avions puissent être utilisés par le pays qui les détient, ils sont considérés comme « une capacité extra-nationale », c’est-à-dire mobilisable par l’Europe en cas de besoin.
« Nous devons maintenant travailler sur des dispositions de formations plus homogènes, car nous n’avons pas toujours les mêmes approches, les mêmes façons de travailler entre Européens », souligne le vice-président d’Avenir Secours qui tente, avec son syndicat, de faire bouger les lignes au niveau européen.
Un autre chantier important, pour Jean-Frédéric Biscay : que l’Europe se dote d’avions transatlantiques. « Pour que l’Europe puisse intervenir dans le monde, par exemple en Guadeloupe, en Martinique rapidement, il faut pouvoir traverser l’Atlantique pour acheminer du fret, des moyens humains, des secours. »
Vers une force civile européenne ?
À l’image d’une armée européenne qui peine à voir le jour, se dirige-t-on vers une future force civile européenne ? L’idée n’est pas neuve. Dès 2006, le commissaire de l’époque, Michel Barnier, avait lancé l’idée d’une force permanente de protection civile de l’UE – l’« Europe aid » – à la suite du tsunami en Asie du Sud-Est.
Or pour l’instant, « la protection civile relève de la compétence nationale des États membres […] L’UE ne peut pas se préparer à quelque chose pour laquelle elle n’est pas compétente ou responsable » expliquait récemment le commissaire européen à la gestion des crises, Janez Lenarčič à EURACTIV.
L’UE ne peut donc pas faire beaucoup plus dans le cadre juridique actuel.
« Peut-être qu’en matière de sécurité civile, on fera un jour ce qu’on n’a pas réussi à faire sur le plan militaire, espère Jean-Frédéric Biscay. C’est important au regard des grandes crises et catastrophes que nous allons connaître dans les années à venir, face aux feux de forêt, mais aussi face aux grandes inondations. »
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