L’UE sonne le glas des véhicules essence et diesel

L’UE sonne le glas des véhicules essence et diesel

Les législateurs de l’Union européenne ont conclu un accord dans la soirée du 27 octobre exigeant que les nouvelles voitures et camionnettes soient neutres en carbone à partir de 2035. Cet accord capital met l’Europe sur la voie d’un avenir où l’automobile sera essentiellement électrique. C’est donc la fin programmée des véhicules essence et diesel !

Le Parlement européen, représenté par l’eurodéputé centriste néerlandais Jan Huitema, et le Conseil de l’UE, représenté par le titulaire de la présidence actuelle, la République tchèque, ont conclu un accord peu avant 21 heures, heure de Bruxelles.

Bien que considéré à l’origine comme l’une des propositions législatives les plus controversées de l’UE dans le cadre du « Pacte vert pour l’Europe », le dossier relatif aux normes de CO2 a progressé rapidement, devenant le premier des dossiers du paquet « Fit for 55 » à être approuvé par les États membres et le Parlement.

Voitures neutres en carbone d’ici 2035

C’est une « décision historique de l’UE pour le climat » scande Pascal Canfin, président de la commission Environnement au Parlement européen, à l’issue de l’accord.

La législation exigera dorénavant que toutes les nouvelles voitures et camionnettes vendues dans l’UE soient neutres en carbone d’ici 2035. La mesure interdit, de fait, la vente de nouvelles voitures à essence et diesel équipées d’un moteur à combustion.

Les législateurs ont également convenu d’un objectif intermédiaire de réduction des émissions de CO2 de 55% d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2021 pour les voitures, et de 50% pour les camionnettes.

Le commissaire européen à l’Action pour le climat, Frans Timmermans, qui a participé à la soirée de négociation, a déclaré que l’accord constitue un signal fort pour l’industrie et les consommateurs.

« L’Europe s’engage dans la voie de la mobilité à émissions nulles. Les constructeurs automobiles européens prouvent déjà qu’ils sont prêts à passer à l’action, avec l’arrivée sur le marché de voitures électriques de plus en plus nombreuses et de plus en plus abordables », a-t-il déclaré dans un communiqué.

Le ministre tchèque de l’Industrie et du Commerce, Jozef Síkela, a déclaré que l’accord « ouvrira la voie à une industrie automobile moderne et compétitive dans l’UE ».

Rapport sur les émissions de CO2 et « clause Ferrari »

Outre l’élimination progressive des voitures à essence et diesel, l’accord introduit une nouvelle méthodologie visant à établir un rapport sur les émissions de CO2 des véhicules sur l’ensemble de leur cycle de vie, que la Commission européenne présentera d’ici 2025.

Conformément à la volonté des États membres, la Commission publiera également, à partir de 2025, un rapport semestriel sur les progrès réalisés en matière de mobilité routière propre. Cela permettra de lancer « un fonds de transition juste dédié pour les salariés de la filière », précise M. Canfin.

Un différend concernant la « clause Ferrari » pour les constructeurs automobiles spécialisés a également été résolu. Dans le cadre de cet accord, les législateurs ont décidé que les constructeurs qui produisent jusqu’à 10  000 voitures et 22 000 camionnettes par an seront exemptés de l’objectif intermédiaire. Ils seront toutefois tenus de respecter l’objectif d’émissions nulles d’ici à la fin de 2035.

Jan Huitema, négociateur en chef du Parlement européen, a salué l’accord, estimant qu’il allait « créer de la clarté pour l’industrie automobile et stimuler l’innovation et les investissements pour les constructeurs automobiles ».

« Je suis heureux que nous soyons parvenus à un accord avec le Conseil sur une révision ambitieuse des objectifs pour 2030 et que nous ayons soutenu un objectif de réduction des émissions de 100 % en 2035  », a-t-il déclaré.

Les carburants neutres en carbone ont le vent en poupe

Malgré les critiques de l’industrie automobile et des eurodéputés conservateurs, le Parlement européen et le Conseil avaient précédemment approuvé l’objectif de 2035.

Le principal point de divergence était une phrase des considérants — une partie non contraignante de la législation — que le gouvernement allemand avait initialement proposée. Celle-ci invite la Commission européenne à faire une proposition visant à autoriser les véhicules « fonctionnant exclusivement avec des carburants neutres en CO2 » même au-delà de 2035.

Les critiques ont mis en garde contre cette proposition, déclarant qu’elle laisserait la porte ouverte aux véhicules fonctionnant avec des carburants de synthèse obtenus à partir d’électricité « verte », appelés e-carburants ou carburants de synthèse.

Le considérant a été intégré à l’accord final, selon une déclaration du Conseil.

L’exception est toutefois destinée à s’appliquer « en dehors du champ d’application des normes relatives au parc automobile », comme le précise le considérant. Cette formulation a suscité une certaine confusion quant à savoir si elle ne s’appliquerait qu’aux véhicules spéciaux tels que les ambulances ou si elle permettrait une utilisation plus large des moteurs à combustion interne.

M. Canfin a cherché à rassurer les critiques, affirmant que le considérant était « très vague » et « n’apporte rien de concret », si ce n’est « stabiliser le soutien de l’Allemagne » sur l’accord.

L’eurodéputé français a également attiré l’attention sur une nouvelle disposition introduite dans l’accord, qui demande à la Commission de faire une proposition « en 2023 » pour accélérer le déploiement des véhicules non polluants au sein des grandes entreprises.

« C’était une demande forte du Parlement d’accélérer la commercialisation des véhicules non polluants et le marché d’occasion des véhicules non polluants », a déclaré M. Canfin, dans un communiqué transmis par courriel.

Le PPE met en garde contre « l’effet La Havane »

Malgré le considérant sur les carburants de synthèse, le groupe PPE (centre droit) du Parlement européen a critiqué l’accord, estimant qu’il ne permet pas suffisamment de diversité technologique.

« L’accord d’aujourd’hui ferme la porte aux nouveaux développements technologiques et met tous les œufs dans le même panier. C’est une erreur », a déclaré l’eurodéputé Jens Gieseke, négociateur du groupe PPE, dans une déclaration après l’accord.

« Avec l’accord d’aujourd’hui, “l’effet La Havane” devient plus réaliste. Après 2035, nos rues pourraient devenir pleines de voitures anciennes, parce que les voitures neuves ne seront pas disponibles ou pas abordables », a averti l’eurodéputé conservateur allemand.

Les Verts, en revanche, ont salué l’accord.

« Ce genre d’ambition prouve que l’UE peut montrer la voie en matière d’action climatique et encouragera d’autres régions à intensifier leurs efforts », a déclaré Bas Eickhout, le négociateur pour les Verts.

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