L’UE prépare une base de données biométriques pour les contrôles aux frontières Schengen

L’UE prépare une base de données biométriques pour les contrôles aux frontières Schengen

L’Union européenne prépare une vaste base de données qui compilera, à partir de 2022, les empreintes digitales et les portraits de plus de 400 millions de personnes, afin de contrôler les entrées dans l’espace Schengen et les sorties.

La semaine dernière, l’agence européenne chargée de superviser les grands projets technologiques de défense et de renseignement (eu-LISA) a attribué un contrat-cadre à un consortium mené par deux entreprises françaises, pour que celles-ci livrent un nouveau système partagé de correspondances biométriques (sBMS).

Les deux sociétés technologiques basées à Paris, IDEMIA et Sopra Steria, ont déjà collaboré par le passé à d’autres projets communautaires.

Ce nouveau projet constituera « l’un des plus grands systèmes biométriques au monde » et intégrera dans sa base de données les empreintes digitales et les portraits de « plus de 400 millions » de ressortissants de pays tiers.

« Basé sur des technologies biométriques européennes, ce nouveau système répondra d’abord aux besoins d’identification du nouveau système européen d’entrée/sortie (EES), élément central de la protection des frontières européennes », ont déclaré les deux firmes dans un communiqué de presse en date du 4 juin.

Le système servira « à lutter contre l’immigration clandestine et la criminalité transfrontalière » en mettant en commun toutes les bases de données biométriques existantes au niveau national dans les États membres.

À terme, assure le communiqué, cette technologie permettra « d’assurer une protection efficace des frontières extérieures ».

Un montant plafond de 300 millions d’euros

Le contrat attribué au consortium pourrait atteindre « un plafond maximum » de dépenses de 302,5 millions d’euros, d’après le cahier des charges.

Par ailleurs, le projet, qui inclut la création, le suivi et la maintenance de la base de données — est fixé à une durée de quatre ans pouvant être prolongée de deux ans tout au plus.

« Aux côtés de ses partenaires, le Groupe déploiera des technologies biométriques de pointe et s’engage fièrement à contribuer à l’une des bases de données biométriques à grande échelle les plus exigeantes au monde en matière de précision et de rapidité, au service d’une Europe plus sûre », déclare le vice-président exécutif d’IDEMIA, Philippe Barreau, dans le communiqué.

L’espace Schengen, qui regroupe plus de 419 millions d’habitants, permet la libre circulation des personnes dans 26 pays européens. Préserver cette zone de déplacement, que la déclaration qualifie d’essentielle, garantit la cohésion sociale et économique de l’Union.

Une technologie aux implications complexes

Le développement des technologies de contrôle biométrique, tout comme les innovations dans les domaines de l’intelligence artificielle (IA) et de la robotique, est dans le collimateur des associations et des militants des droits numériques.

Parmi les menaces potentielles fréquemment signalées par les organisations figurent notamment l’exploitation gouvernementale de ces technologies à des fins de surveillance massive, les violations de la vie privée et des droits fondamentaux, ou les sanctions pénales imposées à tort à cause d’identifications erronées.

« Malgré la précision croissante de ces technologies de reconnaissance, le risque d’erreur demeure réel, [et cela peut poser des] préoccupations concernant les droits fondamentaux », indique un rapport de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) de 2019.

C’est pourquoi toute utilisation de la technologie biométrique « doit être soigneusement évaluée » afin de déterminer son impact avec précision, notamment en ciblant les groupes minoritaires et en garantissant des droits fondamentaux, comme « la liberté d’expression, d’association et de réunion ».

Pour la fédération européenne des associations de droits numériques, European Digital Rights (EDRi), la Commission doit contribuer activement à la « suppression définitive » de toute forme d’intrusion dans la vie privée des citoyens par ces techniques.

« Au moins 15 pays européens ont testé des technologies biométriques comme la reconnaissance faciale dans les espaces publics, en déployant souvent ces systèmes de façon peu transparente, et [sans vraiment sensibiliser] le public [ou entamer] de débat social », conclut l’EDRi dans un rapport publié en mai dernier.

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