La Commission européenne a lancé une nouvelle procédure formelle contre des réformes en Pologne.
Varsovie dispose de deux mois pour apaiser les inquiétudes concernant une loi adoptée en décembre qui, selon l’exécutif européen, menace l’indépendance du pouvoir judiciaire.
Des juges pouvant être sanctionnées par l’exécutif
La loi qui chagrine Bruxelles et a poussé la Commission à ouvrir une nouvelle procédure d’infraction contre la Pologne le 29 avril, instaure une révision du régime disciplinaire des juges. Elle a été adoptée en décembre 2019 et est entrée en vigueur en février dernier.
Elle introduit la responsabilité disciplinaire des juges, notamment pour la remise en cause de l’efficacité de la nomination d’un juge sur recommandation du nouveau Conseil national de la magistrature et pour l’activité publique, ce qui, selon les détracteurs de la réforme, est incompatible avec les principes d’indépendance des tribunaux et des juges.
L’indépendance de la justice garantit par le droit européen
Pour la Commission européenne, ces dispositions empêchent les tribunaux d’appliquer directement certaines dispositions du droit communautaire qui protègent l’indépendance du pouvoir judiciaire.
L’exécutif de l’UE a souligné que la procédure d’infraction avait pour but de « sauvegarder l’indépendance des juges en Pologne », car la loi entrée en vigueur en février permet de punir les magistrats qui critiquent les réformes du système judiciaire effectuées par le gouvernement, et présente des « risques évidents » de contrôle et d’influence politiques sur les décisions judiciaires.
« Les États membres peuvent réformer leur système judiciaire, mais ils doivent le faire sans violer les traités de l’UE. Nous avons lancé aujourd’hui une procédure d’infraction car il existe des bases juridiques solides pour cela », a déclaré Vera Jourova, la vice-présidente de la Commission chargée des valeurs et de la transparence, face aux journalistes.
« Il existe des risques évidents que les dispositions concernant le régime disciplinaire des juges puissent être utilisées pour exercer un contrôle politique du contenu des décisions judiciaires », a-t-elle poursuivi.
Pour Vera Jourova, « c’est une question qui concerne l’Europe car les tribunaux polonais appliquent le droit européen. Les juges d’autres pays doivent pouvoir être certains que les magistrats polonais agissent en toute indépendance. Cette confiance mutuelle constitue le fondement de notre marché unique ».La Pologne a déjà rejeté à maintes reprises les critiques de la Commission sur ses réformes judiciaires
. Les représentants du gouvernement affirment que certaines réglementations instaurées en Pologne existent déjà dans les systèmes juridiques d’autres États membres.
La nouvelle lettre de mise en demeure adressée aux autorités polonaises stipule également que la nouvelle loi contraint les juges à divulguer des informations spécifiques sur leurs activités non professionnelles.
Des dispositions jugées incompatibles avec le droit au respect de la vie privée et avec le droit à la protection des données à caractère personnel, garantis par la Charte européenne des droits fondamentaux. Elles contreviennent également au règlement général sur la protection des données (RGPD).
Le gouvernement polonais dispose désormais de deux mois pour répondre à la lettre. À l’issue de ce processus, d’autres actions pourront être entreprises, telles que le dépôt d’une plainte contre la Pologne auprès de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).
Il s’agirait d’une nouvelle action en justice contre la Pologne devant la CJUE pour non-respect de l’État de droit.
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